Le nouveau Premier ministre de Côte d’Ivoire Patrick Achi, homme d’expérience de 66 ans nommé vendredi, aura la difficile mission de poursuivre la politique de réconciliation nationale dans un pays à l’histoire récente marquée par les violences politiques.
Patrick Achi succède à Hamed Bakayoko, Premier ministre décédé le 10 mars en Allemagne des suites d’un cancer à 56 ans, dont il assurait l’intérim depuis le 8 mars.
Hamed Bakayoko, qui avait lui-même succédé en juillet 2020 à Amadou Gon Coulibaky également décédé de maladie, était apprécié dans tous les partis politiques pour sa capacité à écouter et prendre en compte les avis divergents.
Dans une Côte d’Ivoire meurtrie par les violences politiques depuis plus de vingt ans – dont celles liées à la dernière présidentielle d’octobre 2020 qui ont fait près de cent morts – il a oeuvré à la tenue le 6 mars d’élections législatives apaisées.
Ce scrutin s’est tenu sans violences et pour la première fois depuis dix ans, les grands partis d’opposition y ont participé. S’ils ont contesté certains résultats devant le Conseil constitutionnel, ils n’ont pas appelé à le faire dans la rue.
En présidant mercredi le dernier Conseil des ministres du gouvernement Bakayoko, le président Alassane Ouattara a déclaré que pour « honorer sa mémoire, nous devons poursuivre le dialogue politique, le développement de notre pays avec engagement et détermination dans une Côte d’Ivoire apaisée et ouverte à tous ».
En annonçant la nomination de M. Achi, la présidence ivoirienne a précisé qu’il devait proposer un nouveau gouvernement au chef de l’Etat « dans les plus brefs délais ».
Ce gouvernement devrait théoriquement être formé avant mercredi, jour habituel de la réunion du Conseil des ministres, à la veille de la rentrée solennelle de l’Assemblée nationale et de ses nouveaux députés, 137 du parti au pouvoir et 91 de l’opposition.
Patrick Achi, métis né le 17 novembre 1955 à Paris d’un père ivoirien originaire du sud du pays et d’une mère française, est un transfuge du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), ancien parti unique aujourd’hui principale formation d’opposition.
« Sa nomination est la preuve que le PDCI est une grande maison qui a formé et continue de former des cadres de grande valeur », a d’ailleurs noté N’Goran Djedri, un des dirigeants de ce parti.
– « Figure des années tumultueuses » –
M. Achi a occupé son premier poste ministériel dès janvier 2000, comme ministre des Infrastructures économiques et porte-parole du gouvernement d’un pays alors dirigé par l’ex-président Laurent Gbagbo.
Il est resté aux Infrastructures économiques pendant 17 ans sous cinq chefs de gouvernement, avant d’être nommé par le président Ouattara ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence.
Lors des dernières législatives, il a été réélu député de son fief d’Adzopé (sud), ville de la région de la Mé dont il préside également le Conseil régional.
« C’est une figure politique très connue de ces vingt dernières années tumultueuses », note l’analyste politique Rodrigue Koné. En tant qu’ancien du PDCI, « il peut parler à tout le monde, naviguer entre plusieurs acteurs », estime-t-il.
Un signe fort de la politique de réconciliation nationale et du dialogue voulu par le chef de l’Etat serait le retour de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire.
Acquitté en première instance de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI) pour son rôle présumé dans des violences électorales qui avaient fait quelque 3.000 morts en 2011, M. Gbagbo a annoncé ce retour pour « bientôt ».
La CPI l’a autorisé à quitter la Belgique, où il réside depuis sa libération conditionnelle en janvier 2019, dans l’attente d’un éventuel appel de la procureure de la CPI qui décidera d’y donner suite ou non le 31 mars.
Source: la Minute Info