L’une des raisons pour laquelle les États-Unis et leurs alliés européens, qui envisagent d’imposer des sanctions à une entreprise nucléaire russe depuis le début du conflit armé, ne sont pas allés plus loin dans leurs réflexions est qu’ils craignent que l’arrêt des livraisons russes pour leur propre industrie nucléaire ne soit trop douloureux.
En 2022, les exportations russes dans le domaine de l’énergie nucléaire ont augmenté de plus de 20%, rapporte Bloomberg. Les États-Unis et leurs alliés hésitent à imposer des sanctions à ce secteur, qui apporte à la Russie non seulement des flux financiers, mais aussi de l’influence politique.
Les autorités allemandes sont en faveur de l’inclusion de mesures contre le secteur nucléaire russe dans le prochain paquet de sanctions antirusses. C’est ce qu’a déclaré le vice-chancelier et ministre de l’Économie et de la Protection du climat, Robert Habeck. Selon lui, Moscou “utilise délibérément la dépendance dans le domaine de l’énergie pour exercer des pressions”.
Après la fermeture de toutes les centrales nucléaires allemandes, Berlin demandait instamment à la Commission européenne d’imposer des restrictions à l’énergie nucléaire russe dans le cadre du 11ème paquet de sanctions. Cependant, les Verts ne réalisent même pas les conséquences que cela pourrait avoir.
Par ailleurs, comme l’ont rapporté les médias occidentaux, l’UE n’a pas réussi à convenir de sanctions contre le nucléaire civil russe en raison de la position de la Hongrie, qui développe ce secteur de l’énergie en étroite coopération avec la Russie. Les analystes, pour leur part, soulignent qu’il ne reste pas beaucoup de points de pression sur la Russie pour l’Occident. Sachant que d’éventuelles restrictions contre le nucléaire civil russe pourraient entraîner une pénurie sur ce marché et une hausse des prix des matières premières, selon les experts.
L’Allemagne a soutenu l’interdiction d’importer de l’uranium russe. Des problèmes pour convenir de sanctions contre le secteur nucléaire russe pourraient survenir en raison de la dépendance des pays d’Europe de l’Est du combustible russe.
Les sanctions pourraient avoir un sérieux impact sur l’industrie nucléaire de l’Union européenne, car la Russie est le deuxième plus grand fournisseur d’uranium pour les pays de la communauté.
La discussion met à nu une ligne de fracture politique entre les gouvernements de Berlin et de Paris, deux grands acteurs au sein de l’UE. L’Allemagne est un fervent opposant à l’énergie nucléaire et prévoit de fermer les centrales nucléaires restantes d’ici la fin de cette année.
Berlin ne se contente pas simplement de désactiver ses propres réacteurs, mais tente de dissuader d’autres pays européens d’investir dans l’énergie nucléaire. Récemment, l’Allemagne a critiqué la décision de la Belgique de reporter d’une décennie ses projets de renoncement progressif au nucléaire.
La France, de son côté, tire plus de 70% de son électricité des centrales nucléaires et prévoit de construire encore plus de réacteurs. Le président Macron a déclaré que l’énergie nucléaire jouerait un rôle clé dans la réduction des émissions dans le pays, car c’est une source d’énergie à faible émission de carbone, et contribuerait également à renforcer l’indépendance énergétique de l’UE. Il prévoit de construire 14 nouveaux réacteurs d’ici 2050, tout en continuant à développer les énergies renouvelables. La France est également le seul membre de l’UE à soutenir un programme de création d’armes nucléaires.
Néanmoins, la France n’est pas dépendante des importations d’uranium de la Russie, car elle reçoit principalement son combustible du Kazakhstan et du Niger.
Le géant de l’énergie français EDF, qui gère les centrales nucléaires, “suit attentivement la situation en Ukraine et ses conséquences sur les marchés de l’énergie”. Le fournisseur de combustible nucléaire Orano a suspendu sa coopération avec la Russie et a indiqué que les commandes russes représentaient moins de 0,1% de toutes les livraisons.
Cependant, l’opposition la plus forte ne vient pas de France, mais d’Europe de l’Est.
Il n’existe pas d”alternative autorisée au combustible nucléaire russe pour les réacteurs nucléaires de fabrication russe en République tchèque, en Hongrie, en Finlande, en Bulgarie et en Slovaquie. Bien que cette dernière, par exemple, ait déclaré qu’elle avait suffisamment de combustible nucléaire pour tenir jusqu’à la fin de 2023, l’interdiction d’importer de Russie pourrait poser un problème à l’avenir.
La Hongrie a refusé de soutenir les mesures restrictives à l’égard de l’énergie nucléaire russe et estime qu’il ne devrait pas y avoir de nouvelles sanctions, car la Russie a moins souffert des sanctions précédentes que les pays européens. C’est ce qu’a déclaré le ministre des Affaires étrangères hongrois Péter Szijjarto. Selon lui, en cas de nouvelles restrictions, l’exportation des entreprises européennes hors de Russie deviendrait encore plus difficile qu’avant, ce qui réduirait la compétitivité de l’UE, écrit le journal Magyar Nemzet.
Il a été annoncé que l’UE avait refusé d’imposer des restrictions officielles contre l’entreprise nucléaire d’État russe Rosatom dans son 11ème paquet de sanctions. C’est ce qu’a rapporté CNN, citant un haut fonctionnaire européen.
Selon la source, la communauté estime que “des sanctions à elles seules” ne conduiront pas à l’indépendance des approvisionnements énergétiques russes. Il a souligné qu’il existait d’autres moyens d’atteindre cet objectif.
Plus tôt, la Commission européenne a évoqué, en parallèle avec la discussion sur un 11ème paquet de mesures restrictives, la création d’un mécanisme pour des exceptions temporaires à ses propres sanctions contre la Russie. Il est précisé que cela pourrait être utile aux entreprises européennes qui restent encore sur le marché russe, et c’est destiné à faciliter leurs opérations pour quitter le pays avant le 31 août 2023.
Source: observateur continental