Le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré pourra-t-il tenir ses engagements dans le domaine de la lutte contre le terrorisme ? L’analyse de Mahamadou Sawadogo, spécialiste des questions sécuritaires.
La crise sécuritaire a été l’un des enjeux majeurs des élections présidentielle et législatives de novembre 2020 au Burkina. D’abord localisées dans le Sahel, les attaques se sont multipliées depuis 2015 et concernent désormais la quasi-totalité du territoire. Plus d’un million de Burkinabè sont aujourd’hui des déplacés internes, selon le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés, et sur le terrain, malgré les opérations militaires, la situation semble se dégrader.
Chercheur au laboratoire Carrefour d’études et de recherches-action pour la démocratie et le développement (CERADD), Mahamadou Sawadogo, un ex-gendarme devenu spécialiste de l’extrémisme violent et des questions sécuritaires, livre son analyse du degré d’efficacité de la stratégie antiterroriste du Burkina. Il évoque également les risques de voir le phénomène s’étendre encore, notamment vers la Côte d’Ivoire. Il insiste également pour que la réconciliation nationale, pour qu’elle soit aussi un réel outil de lutte contre le terrorisme, ne se limite pas à la seule question du retour de exilés politiques.
Mahamadou Sawadogo, spécialiste des questions sécuritaires © DR
Jeune Afrique : Comment expliquer la reprise des attaques terroristes au Burkina, alors qu’une accalmie avait été observée pendant les élections présidentielle et législatives ?
Mahamadou Sawadogo : Il y a effectivement une nette reprise. Depuis le début de l’année, on enregistre sept à huit attaques par semaine. Elles sont localisées dans la région du Nord, aux alentours de Ouahigouya, dans le Yagha, dans le Soum et à l’Est. Peut-être que le pacte a été rompu…
De quel « pacte » parlez-vous ?
C’était quand même surprenant que, brusquement, pendant la campagne électorale, le rythme des attaques diminue… Concomitamment, les opérations anti-terroristes ont également été moins nombreuses. J’ai discuté avec des leaders locaux. Il s’avère que l’on a demandé à certains d’entre eux de rentrer en contact avec les groupes terroristes et de négocier une trêve, le temps du vote.
Source: Jeune Afrique