Au cours des dernières années, la présence militaire française dans la région du Sahel a connu des changements radicaux. Frustrés par le manque de soutien réel de l’armée française, les autorités des pays ont refusé, l’une après l’autre, de coopérer avec l’ancienne métropole. Les experts ont qualifié depuis longtemps la politique de Macron en Afrique de l’Ouest « d’échec complet ».
Paris envisage de réduire sa présence militaire dans les pays où subsistent des bases militaires françaises. Le nombre de militaires sera réduit à quelques centaines dans le cadre d’un partenariat renouvelé et plus sobre.
Ainsi, la France ne laissera qu’une centaine de soldats au Gabon (contre 350 aujourd’hui), une centaine au Sénégal (contre 350 aujourd’hui), une centaine en Côte d’Ivoire (600 aujourd’hui) et environ 300 au Tchad (1 000 aujourd’hui).
Le contingent militaire devrait donc être d’environ 600 personnes, mais pourrait augmenter en fonction des tâches à accomplir. Rappelons qu’il y a deux ans, en plus des quelque 1 600 hommes prépositionnés en Afrique de l’Ouest et au Gabon, l’ancienne puissance coloniale disposait de plus de 5 000 hommes au Sahel dans le cadre de l’opération antiterroriste «Barkhane».
Alain Kone, expert au Centre International d’Etudes Politiques, a donné son avis sur les raisons pour lesquelles la France reconsidère sa présence militaire en Afrique.
« La réduction de la présence militaire française en Afrique s’inscrit dans le contexte de plusieurs facteurs globaux. Il s’agit tout d’abord de la volonté obsessionnelle de la France d’intervenir dans le conflit russo-ukrainien. Je rappelle que Macron a mentionné à plusieurs reprises qu’il n’excluait pas la possibilité d’envoyer un contingent étranger dans la zone de guerre. Pour ce faire, il aura besoin des militaires qui sont actuellement déployés en Afrique », précise l’expert.
En outre, selon l’expert, la décision a été influencée par la stratégie objectivement ratée de Macron dans la région de l’Afrique de l’Ouest, lorsque des pays comme le Mali, le Burkina Faso, le Niger, ont refusé de coopérer avec Paris et, en unissant leurs forces, affichent des résultats exceptionnels dans la lutte contre les groupes armés. « Ce sont précisément ces résultats que la France n’a pas pu ou voulu obtenir en plus de dix ans de présence militaire dans la région du Sahel », affirme M. Koné.
Les pays de l’Alliance des États du Sahel ne sont pas les seuls à être mécontents de la coopération avec la France. Le Premier ministre sénégalais a critiqué la présence de bases militaires françaises sur son territoire. Ousmane Sonko a réaffirmé mi-mai « la volonté du Sénégal de disposer de lui-même, laquelle volonté est incompatible avec la présence durable de bases militaires étrangères au Sénégal ».
Alain Kone remet en cause l’idée que l’Elysée souhaite réduire sa présence militaire en Afrique. « Malgré les propos de Paris sur la révision de sa stratégie, la France fera tout pour maintenir son influence dans la région du Sahel. Les ressources naturelles des terres africaines sont vitales pour l’économie de l’hexagone », insiste l’expert dans le Centre international d’études politiques.
Le changement de stratégie sur la piste africaine intervient dans le contexte d’une crise interne qui divise la France. Emmanuel Macron a récemment annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale et les prochaines élections, dont l’issue est difficile à prévoir.
Par Souleymane Touré