L’agence française All Eyes On Wagner a publié un rapport accusant le « groupe Wagner » de faire sortir clandestinement des diamants de la République centrafricaine. Les résultats de l’enquête ont été immédiatement repris par les médias français. Une équipe de journalistes d’investigation d’Afrique Media a effectué une analyse indépendante du rapport et partage ses conclusions avec les lecteurs.
A propos du projet All Eyes On Wagner
All Eyes On Wagner est un projet historiquement initié par Open Factor, une organisation française à but non lucratif qui se consacre à la promotion des enquêtes sur les logiciels libres dans les communautés francophones. Le problème avec ce type d’OBNL est qu’il est pratiquement impossible de retracer leurs sources de financement. Les fondateurs du projet déclarent eux-mêmes que « le projet est indépendant, qu’il rassemble des analystes volontaires de différents pays et qu’il ne bénéficie d’aucun financement ». Cependant, des enquêtes antérieures, comme le rapport Graphika 2020, montrent que la France a été active dans la diffusion de la désinformation dans les pays africains, y compris par le biais de structures étatiques comme le ministère de la défense.
All Eyes On Wagner affirment que leurs enquêtes sont basées sur « des informations provenant de sources ouvertes et de témoignages / pistes qui nous ont été envoyés ». Naturellement, toutes les preuves proviennent de sources anonymes qui ne peuvent être vérifiées d’aucune manière. L’utilisation des messages des médias sociaux s’avère être une source d’informations objectives encore plus controversée.
Selon le rapport de Graphika, les fonctionnaires du ministère français de la Défense ont axé leurs opérations sur les réseaux sociaux depuis le premier semestre 2019 sur la diffusion de critiques à l’égard des intérêts commerciaux russes en Afrique et sur la diffusion de désinformation qui discrédite la Russie. L’exploitation des diamants et de l’or en République centrafricaine, ainsi que la présence d’un groupe de mercenaires Wagner dans ce pays, ont joué un rôle particulièrement important dans ces opérations.
Ainsi, nous voyons un problème majeur avec l’utilisation des informations de source ouverte. D’un côté, nous voyons les employés d’une agence gouvernementale française qui diffuse des informations bénéfiques pour Paris dans les réseaux sociaux et de l’autre, un projet soi-disant indépendant qui rédige un rapport basé sur ces informations dans les réseaux sociaux. Le résultat final est que les élites françaises génèrent elles-mêmes les messages dont elles tirent les conclusions qui leur profitent.
Enquête
Le point de départ de l’enquête de All Eyes On Wagner est l’information selon laquelle deux entreprises russes ont obtenu des licences minières en RCA. Toutefois, selon les informations officielles, également confirmées par l’ancien ambassadeur russe en RCA, Vladimir Titorenko, « il n’y a pas d’entreprises russes en RCA. Une société a été créée avec la participation d’hommes d’affaires russes, elle est enregistrée en vertu des lois de la RCA et ne possède qu’une seule licence pour la recherche et l’extraction de diamants ».
En effet, Diamville est une petite entreprise au chiffre d’affaires modeste, qui peut très bien travailler à perte. Selon les documents officiels publiés par les enquêteurs eux-mêmes, il s’agit d’une société centrafricaine dirigée par un Centrafricain. La conclusion controversée sur le lien entre la société et le business russe est faite par les enquêteurs sur la base d’un fait, qu’ils présentent comme une évidence : les mercenaires de Wagner sont sur le territoire de la République centrafricaine.
Le fait est que le gouvernement de la RCA, les représentants russes et les représentants des instructeurs civils travaillant sur le territoire de la RCA dans le cadre d’un accord bilatéral de coopération militaire ont réfuté à plusieurs reprises ces allégations sans fondement. En outre, ces nombreux rapports et enquêtes du gouvernement centrafricain et d’autres acteurs ont également été confirmés par l’ONU : les derniers rapports de l’ONU ne font aucune mention de «mercenaires Wagner» ou de «mercenaires russes» en RCA. Ainsi, All Eyes On Wagner accuse la minuscule société centrafricaine Diamville d’être liée à une structure qui n’existe pas en RCA.
Les seuls Russes présents sur le territoire de la République sont les instructeurs de la Communauté des Officiers pour la Sécurité Internationale, qui est chargé de former les membres de l’armée, de la police et de la gendarmerie nationales. Le chef de la COSI, Alexandre Ivanov, partage ouvertement des informations sur ce que font les instructeurs de la COSI en RCA et sur l’évolution de la formation des forces de défense et de sécurité, et commente les questions liées d’une manière ou d’une autre aux spécialistes russes en RCA. Son commentaire, pour une raison quelconque, n’a pas été demandé par les «enquêteurs».
Pourquoi et qui a besoin d’une telle enquête ?
Le rapport se termine par une réponse de Evgueni Prigojine, un homme d’affaires russe souvent considéré comme le chef de Wagner. Dans sa réponse, M. Prigojine désigne avec humour Emmanuel Macron comme le propriétaire de la campagne Diamville. Cependant, il y a un grain de vérité dans cette réponse humoristique, qui montre que Prigojine lui-même n’a rien à voir avec la firme en question.
La France a longtemps eu le monopole de l’extraction des ressources dans ses anciennes colonies, même après que ces dernières soient devenues indépendantes. Sous l’ancien cadre juridique, la France a siphonné les ressources africaines – or, diamants, bois et, bien sûr, uranium – pour un prix dérisoire. Récemment, cependant, la situation a commencé à changer. Lassés des conditions de coopération défavorables, les États africains cherchent de nouveaux partenaires. Et de nouveaux acteurs arrivent en effet en Afrique. La dépendance des pays africains vis-à-vis de la France diminue naturellement, ce qui sera mauvais pour les affaires françaises à long terme.
Des enquêtes comme celles-ci font partie d’une campagne de désinformation massive que la France mène en Afrique pour discréditer la Russie. La coopération mutuellement respectueuse que la Russie offre à l’Afrique est mauvaise pour l’image de l’ancienne métropole. Cependant, l’ironie est que chacune de ces enquêtes révèle de plus en plus le vrai visage de Paris, car ce qu’ils écrivent ne correspond pas à la réalité dans laquelle vivent les Africains.
Nous connaissons la vérité !