Les deux mouvements ont annoncé avoir conclu une coopération militaire, tandis que le gouvernement central a décrété la mobilisation générale.
S’agit-il d’un mariage contre-nature et sans avenir entre deux mouvements autrefois ennemis ? Ou d’une alliance de circonstance qui pourrait faire chanceler le premier ministre, Abiy Ahmed ? Le 11 août, la coopération militaire dévoilée entre les deux principaux mouvements d’insurrections en Ethiopie, le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) et l’Armée de libération oromo (OLA), met un peu plus encore sous pression le gouvernement fédéral.
Plus de neuf mois après le début de la guerre du Tigré, l’Ethiopie se retrouve une nouvelle fois fragmentée. Les rebelles tigréens, après avoir repris le contrôle de la majorité de leur province fin juin, continuent leurs opérations dans les régions voisines, Amhara et Afar. En lançant cette contre-offensive éclair, le FPLT espère, dans un premier temps, faire sauter le blocus imposé au Tigré.
Son autre objectif, moins explicite à ce jour, est de renverser le gouvernement d’Abiy Ahmed, lauréat du prix Nobel de la paix en 2019. C’est le message que les rebelles envoient à Addis-Abeba à travers cette nouvelle alliance qui n’en est, pour l’heure, qu’à ses balbutiements. Du moins, officiellement. L’OLA assure que l’accord a été signé il y a quelques semaines. D’autres sources avancent que la coordination des deux mouvements date de plusieurs mois.
Importante percée
« Ce n’est pas surprenant, assure la porte-parole du premier ministre, Billene Seyoum. Cela fait deux ans que nous indiquons que le FPLT utilise l’OLA comme un relais dans leur entreprise de destruction de l’Ethiopie. » En mai, le Parlement éthiopien a adopté une loi qui désigne les deux groupes comme des organisations terroristes.
Encore loin de manœuvrer côte à côte sur le champ de bataille, les mouvements rebelles « échangent pour l’heure principalement du renseignement », assure Odaa Tarbii, le porte-parole de l’OLA. Une donnée importante au vu des récents mouvements militaires. Alors que le FPLT effectue une importante percée à travers la région Amhara, les rebelles oromo opèrent à la frontière sud de cette même province. En d’autres termes, leurs fronts respectifs, aujourd’hui distants d’environ 200 kilomètres, se rapprochent.
D’après plusieurs observateurs du conflit, il est encore trop tôt pour évaluer l’influence que peut avoir cette alliance sur le cours de la guerre. « Sur le plan militaire, l’armée nationale est déjà en déroute, glisse un diplomate occidental à Addis-Abeba. Le gouvernement s’appuie de plus en plus sur les forces régionales amhara. »