Filière cacao: Côte d’Ivoire et Ghana mettent la pression sur les multinationales du chocolat

REUTERS/Thierry Gouegnon Un agriculteur travaille dans une ferme de cacao en Côte d'Ivoire.

La Côte d’Ivoire et le Ghana sont déterminés à poursuivre leur offensive entamée le lundi 30 novembre 2020 contre deux multinationales américaines du chocolat. Abidjan et Accra accusent Hershey et Mars de ne pas vouloir payer une prime spéciale destinée à mieux rémunérer les agriculteurs qui produisent le cacao. Une rencontre entre les acteurs de la filière doit avoir lieu ce jeudi à Yamoussoukro.

Aller à la rencontre des paysans, sans qui le marché du chocolat manquerait de matières premières, c’est une façon, pour le régulateur ivoirien, de mettre la pression sur les groupes Mars et Hershey. Il leur ait reproché de s’être adressé au marché boursier pour s’approvisionner afin d’éviter de payer la prime spéciale appelée « différentiel de revenu décent ».

Négociée l’année dernière et entrée en vigueur le 1er octobre dernier, la prime a même été discutée en présence des deux multinationales américaines incriminées aujourd’hui, d’où la colère du Conseil Café Cacao et du Cocobod, les organes publics de gestion des filières cacao de ces deux pays ouest-africains.

Les acheteurs ont réussi à contourner cette prime en se fournissant dans des entrepôts certifiés à terme, c’est-à-dire en achetant des fèves produites avant le 1er octobre. « Des stratégies secrètes » pour « contourner le mécanisme d’amélioration des revenus des producteurs dans l’optique de le faire échouer », dénoncent le Ghana et la Côte d’Ivoire.

En réponse, pour la première fois, les deux pays, qui représentent deux tiers de la production mondiale de cacao, ont suspendu Hershey des programmes de durabilité qui certifient que les grands groupes chocolatiers achètent du cacao « éthique », c’est-à-dire des fèves qui ne sont pas issues de plantations ayant entraîné la déforestation ou fait travailler des enfants.

 « Les chocolatiers seront toujours vainqueurs »

La réunion de Yamoussoukro sert aussi à rassurer les producteurs, sur la détermination des gestionnaires de la filière en Côte d’Ivoire et au Ghana de contraindre les multinationales à respecter leurs engagements. Car aujourd’hui, la situation des planteurs de cacao est préoccupante en Côte d’Ivoire et au Ghana.

« L’objectif pour nous sera de ramener chaque partie à respecter l’accord que nous avons conclu. Donc avec Hershey nous sommes en train de discuter. Ce sont nos partenaires. Nous avons quelques mésententes. On discute. On va s’entendre », explique à RFI le président du Conseil Café Cacao de Côte d’Ivoire, Yves Brahima Koné qui espère que cette réunion permette de débloquer la situation et de rappeler aux différents acteurs de la filière leurs engagements.

Un combat perdu d’avance pour certains. « Bras de fer entre gouvernement et chocolatiers ? Tout le monde sait que les chocolatiers seront toujours vainqueurs. Ce sont des gens qui ont en stock des mois et des mois à leur disposition. Or nous, on ne peut pas garder notre cacao pendant des mois », remarque Moussa Koné, le président du Syndicat national pour le progrès en Côte d’Ivoire. Il regrette notamment de ne pas être convié à la table des négociations. « Prendre des décisions sans nous, c’est prendre des décisions contre nous », tranche-t-il.

 « Les cacaoculteurs ont intérêt à faire un bras de fer, ils ont tout à gagner »

 Source: rfi