Guerre en Ethiopie: au moins 750 civils tués au deuxième semestre 2021, selon un organisme public

Au moins 750 civils ont été tués au deuxième semestre 2021 dans les régions de l’Afar et l’Amhara, touchées depuis juillet par les combats qui ravagent le nord de l’Ethiopie, selon un rapport publié vendredi par la Commission éthiopienne des droits humains (EHRC).

Cet organisme indépendant mais rattaché au gouvernement éthiopien fait également état de nombreuses violations des droits de l’homme -viols, torture, enlèvements- commis par les belligérants des deux camps.

Forces progouvernementales et rebelles de la région du Tigré, voisine de l’Afar et l’Amhara, s’affrontent dans le nord de l’Ethiopie depuis novembre 2020.

Les 16 mois de guerre, jalonnés de nombreux récits d’exactions, ont fait des milliers de morts, et déplacé et affamé des millions de personnes.

En Afar et Amhara, où se sont concentrés les combats depuis juillet, « au moins 403 civils sont morts (…) à la suite de tirs d’artillerie lourde, de raids aériens et d’attaques de drones », affirme l’EHRC, et « au moins 346 civils ont été victimes d’exécutions illégales et extrajudiciaires par les parties au conflit, principalement par les forces du Tigré ».

L’organisme accuse également les rebelles tigréens de « violences sexuelles généralisées, cruelles et systématiques, notamment de viols collectifs sur des femmes (…), y compris des filles et des femmes âgées ».

Il affirme qu’ils se sont aussi livrés « à des enlèvements et à des disparitions forcées d’une manière qui constitue des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ».

Selon des chiffres gouvernementaux cités par l’EHRC, plus de 2.400 infrastructures médicales ont par ailleurs cessé leurs activités dans ces deux régions « en raison des destructions, des dégâts et des pillage subis » et plus de 1.000 écoles ont été détruites.

– Déterioration « significative » –

Ce rapport fait suite à celui rédigé conjointement par l’EHRC et le Haut Commissariat des Nations unies aux droits humains portant sur la période du 3 novembre 2020 au 28 juin 2021, qui évoquait déjà des violations dont certaines pouvaient « constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ».

Sur cette période, les troupes éthiopiennes et érythréennes, venues leur prêter main forte, sont accusées d’avoir commis la majorité des violences dénoncées.

Une commission d’enquête de l’ONU, dirigée par l’ancienne procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI) Fatou Bensouda, est chargée d’enquêter sur les violations des droits humains commis par tous les belligérants depuis le début de ce conflit.

La guerre dans le nord de l’Ethiopie a éclaté en novembre 2020, quand le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé l’armée au Tigré pour destituer les autorités régionales dissidentes, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF).

Les rebelles ont repris le contrôle de la quasi-totalité du Tigré en juin dernier, avant d’avancer en Afar et Amhara puis de se rapprocher de la capitale Addis Abeba.

En décembre, le TPLF a annoncé se replier au Tigré. Mais il a lancé en janvier des opérations en Afar en réponse, affirme-t-il, à des attaques des forces progouvernementales contre ses positions.

Lundi, la Haute-Commissaire de l’ONU aux droits humains, Michelle Bachelet, a affirmé que la situation en termes de droits et de sécurité s’était « significativement détériorée » ces derniers mois dans le nord de l’Ethiopie.

Plus de 300 civils ont notamment été tués entre fin novembre et fin février dans des bombardements de l’aviation éthiopienne, principalement au Tigré mais aussi en Afar. Des attaques contre des cibles civiles ont été également perpétrées par d’autres parties au conflit, dont les rebelles du TPLF.

– « Tendu et imprévisible » –

Selon un rapport du Bureau des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) jeudi, « la situation générale dans le nord de l’Ethiopie reste très tendue et imprévisible ».

« La situation dans certaines parties de la région de l’Afar continue de se détériorer avec des affrontements armés signalés » le long de la frontière tigréenne, souligne notamment Ocha.

Ces combats bloquent le principal axe terrestre d’acheminement d’aide humanitaire vers le Tigré, où 4,6 millions de personnes -soit 83% de la population- se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire, dont deux millions en « pénurie extrême de nourriture », selon des estimations du Programme alimentaire mondial fin janvier.

Au Tigré, « les stocks d’aide et de carburant pour la réponse humanitaire sont presque entièrement épuisés », explique Ocha.

De l’aide a été acheminée par trois vols, mais la distribution hors de la capitale tigréenne Mekele est très limitée en raison de la pénurie de carburant.

Afp