Le dirigeant du principal parti d’opposition tanzanien, Freeman Mbowe, a comparu pour la première fois mardi devant la Haute Cour de Dar es Salaam, où il est poursuivi pour « terrorisme » dans un procès qualifié de politique par ses partisans.
Freeman Mbowe, 59 ans, est en détention depuis le 21 juillet, date à laquelle il a été arrêté avec d’autres figures du parti Chadema après avoir appelé à un rassemblement dans la ville de Mwanza (ouest) pour demander des réformes constitutionnelles.
Accusé de « financement du terrorisme » et de « complot terroriste », il affirme avoir été torturé en détention et avoir enregistré des déclarations sous la contrainte.
Son arrestation a suscité l’indignation de son parti et d’organisations de défense des droits civiques.
Lors de l’audience mardi, à laquelle les journalistes n’ont pas été autorisés à assister, son avocat Peter Kibatala a fait valoir que la Division de la corruption et des crimes économiques du tribunal, devant laquelle Mbowe comparaissait, n’avait aucune compétence pour juger l’affaire.
Cette juridiction « ne peut pas entendre (une) affaire de terrorisme », a-t-il déclaré aux journalistes, réclamant la libération de son client.
Les procureurs ont, eux, au contraire assuré que le tribunal avait « pleine autorité » pour mener le procès.
La Haute Cour se prononcera mercredi sur sa compétence.
La veille, Freeman Mbowe avait été entendu pour des poursuites qu’il a engagées contre de hauts responsables judiciaires et policiers, affirmant que ses droits constitutionnels ont été violés lors de son arrestation et de sa mise en accusation.
Ses avocats affirment qu’il a été détenu sans inculpation pendant cinq jours, puis inculpé sans la présence de son avocat.
– « Dictature » –
Des représentants des ambassades britannique et américaine étaient présents à l’audience de mardi, à laquelle ont également assisté des dirigeants de Chadema.
L’opposition a dénoncé ces arrestations comme un retour au régime autoritaire de l’ancien président John Magufuli, décédé subitement en mars et remplacé par sa vice-présidente Samia Suluhu Hassan.
Les procureurs ont toujours affirmé que les accusations contre Freeman Mbowe n’avaient pas de rapport avec la conférence prévue à Mwanza en juillet, mais qu’elles relevaient d’infractions présumées l’année dernière dans une autre partie du pays.
Selon Chadema, les procureurs accusent M. Mbowe d’avoir planifié une attaque contre un fonctionnaire et d’avoir donné 600.000 shillings tanzaniens (220 euros) pour l’organisation d’attentats contre des stations-service et des rassemblements publics, et pour abattre des arbres pour bloquer les routes.
Les dirigeants de Chadema affirment que ces arrestations reflètent une dérive de plus en plus prononcée vers la « dictature », accusant la présidente Samia Suluhu Hassan de renouer avec les pratiques de son prédécesseur, surnommé le « Bulldozer » pour son style intransigeant.
Les avocats de Freeman Mbowe ont notamment demandé mi-août l’abandon des poursuites et l’annulation du procès, accusant implicitement la cheffe de l’Etat d’ingérence dans l’affaire.
Dans une interview à la BBC publiée quelques jours plus tôt, elle avait déclaré que les accusations portées contre Freeman Mbowe n’étaient « pas politiques » et résultaient d’une enquête de près d’un an.
« Je soupçonne que, connaissant les charges auxquelles il était confronté, il a calculé que s’il était arrêté, il pourrait prétendre que c’était parce qu’il faisait pression pour une nouvelle Constitution », avait-elle estimé.
Source: La Minute Info