Le gouvernement sud-africain a revu à la hausse, jeudi 15 juillet, le bilan des violences qui agitent le pays depuis près d’une semaine.
Le gouvernement sud-africain a revu à la hausse, jeudi 15 juillet, le bilan des violences qui agitent le pays depuis près d’une semaine, annonçant au moins 117 morts quand le bilan précédent faisait état de 72 morts.
Johannesburg, la plus grande ville du pays, retrouvait un calme relatif et commençait à déblayer les gravats des destructions. La mégalopole est « largement calme », a affirmé la ministre par intérim à la présidence Khumbudzo Ntshavheni, attribuant la diminution du nombre d’incidents au déploiement de soldats en renfort de la police.
En tout, 26 personnes y sont mortes dans un contexte de pillages et d’incendies, sur fond de chômage endémique et de nouvelles restrictions anti-Covid-19. Bilan, auquel il faut ajouter 91 morts dans la province du Kwazulu-Natal (est) où les violences ont commencé il y a six jours, après l’incarcération de l’ancien président Jacob Zuma. Là, dans le pays zoulou, « les choses s’améliorent » aussi, « on va vers la stabilité », a ajouté la ministre. A ce jour, 2 203 personnes ont été interpellées dans le pays.
La ministre a évoqué les nombreux endroits du pays, où des Sud-Africains jouent les justiciers, appelant à ne pas prendre « la loi entre vos mains ». « Certains brandissent des armes à feu, en réponse apparente aux incidents. S’ils ont le droit de protéger leur propriété, leur vie, leur quartier », ils doivent s’assurer qu’ils n’agissent pas « en désaccord avec la loi »
« Tensions raciales »
Plus tôt dans la journée, le ministre de la police avait confirmé qu’il y a eu vingt morts à Phoenix, un township près de Durban où des membres de la communauté indienne s’en sont pris à des pillards présumés. Il affirmait que la situation y restait tendue. Bheki Cele avait noté la veille que des « tensions raciales ont entaché ces troubles » à Phoenix, liés à des groupes cherchant à « protéger leur quartier des pillards ». Des vidéos d’une violence inouïe circulent sur les réseaux sociaux, repérés notamment via le mot-dièse #PhoenixMassacre. Elles montrent des hommes d’origine indienne battre brutalement des jeunes hommes noirs à terre.
Ailleurs, comme dans le township de Vosloorus, au sud de Johannesburg, d’autres se substituent aux forces de l’ordre, passant à tabac des présumés pillards avant d’en remettre certains, menottés, aux forces de l’ordre, selon une équipe de l’Agence France-Presse (AFP) sur place.
De nombreux Sud-Africains, ne comptant que sur eux-mêmes, ont également commencé à déblayer et réparer. La présidence sud-africaine a tweeté, jeudi, ses remerciements à « ceux qui s’engagent dans les opérations de nettoyage ». Dans le centre de Johannesburg, beaucoup de magasins sont fermés. Des rues restent bloquées par des barricades calcinées. « Ça ne sert à rien d’être en colère, il faut retrousser ses manches maintenant », témoigne un riverain soucieux de conserver son anonymat.
L’armée pour pacifier
« Le plus terrible, c’est que de nombreux commerçants ne sont pas assurés, ils ne peuvent espérer aucun dédommagement », souligne Michael Sun, politique dans l’opposition municipale.
L’armée va multiplier ses effectifs sur le terrain, pour stabiliser Johannesburg et pacifier les zones plus tendues, notamment les grandes villes du Kwazulu-Natal, le port de Durban et sa capitale Pietermaritzburg. Le président Cyril Ramaphosa avait autorisé, lundi, le déploiement de 2 500 soldats, doublé deux jours plus tard. La ministre de la défense a dit souhaiter jusqu’à 25 000 soldats pour faire face à l’urgence. « Tous les réservistes doivent se présenter à l’aube », jeudi, « dans leurs unités respectives », leur avait annoncé, la veille, le chef de l’armée.
Sur le terrain, ces annonces sont reçues avec soulagement. « Les militaires, c’est une bonne chose, car chez nous, les gens ont bien plus peur d’un soldat que d’un policier », explique Musa Mbele-Radebe, 30 ans, parmi les centaines de personnes qui déblaient le centre commercial ravagé de Jabulani (« réjouis-toi » en zoulou) à Soweto.
Source: Le Monde