Tanzanie: après la mort de Magufuli, peut-on s’attendre à un assouplissement du régime?

AFP - ERICKY BONIPHACE La vice-président Samia Hassan et le président tanzanien John Magufuli, le 24 juillet 2019 à Dar es Salaam.

La Tanzanie aura prochainement une présidente. Après l’annonce du décès du président John Magufuli, à l’âge de 61 ans, officiellement en raison de problèmes cardiaques, la vice-présidente Samia Suluhu Hassan, doit prendre les rênes du pays et assurer l’intérim. John Magufuli, élu une première fois en 2015, puis réélu fin 2020 lors d’un scrutin contesté, est connu pour sa politique de grands travaux, mais aussi accusé de dérive autoritaire. Ce changement à la tête du pays peut-il inverser la tendance ?

L’opposition tanzanienne appelle déjà à un changement. Tundu Lissu, le vice-président du principal parti d’opposition Chadema, déclarait jeudi à la télévision kényane que la vice-présidente se dirige vers une impasse, si elle prend le même chemin que John Magufuli, tout en soulignant que Samia Suluhu Hassan n’a pas le même tempérament que lui.

Le chercheur Fergus Kell, analyste au think tank Chatham House relève lui aussi que la future présidente du pays a une personnalité différente de celle de son prédécesseur. Il juge son approche « moins conflictuelle », et « plus ouverte sur l’extérieur ». Elle a aussi « exprimé son désaccord sur certaines de ses déclarations controversées », pointe Fergus Kell. Mais il estime toutefois qu’un changement de personne ne sera pas « nécessairement suffisant pour inverser la tendance ». D’autant que de nombreuses personnalités publiques de premier plan étaient en phase avec le président Magufuli.

« Je pense qu’il est important de rappeler que c’est aussi un défi institutionnel pour la Tanzanie, souligne le chercheur Fergus Kell. De nombreuses personnalités publiques de premier plan, comme le président du Parlement ou le ministre des Affaires étrangères, étaient très en phase avec le président. Donc, il n’est pas certain que la nouvelle cheffe de l’État puisse affirmer son autorité sur ce point et impulser un changement important dans la trajectoire plus autoritaire que la Tanzanie a prise. »

Par ailleurs, Samia Suluhu Hassan, qui ne semble pas bénéficier d’une grande popularité parmi les proches du président défunt, devra nommer un vice-président, après consultation de son parti, et son choix devra être validé par l’Assemblée nationale. Pour l’analyste tanzanien Thabit Jacob, l’actuelle vice-présidente devra gouverner avec une base plus faible, qui sera contrôlée par le clan Magufuli et les renseignements et aura du mal à construire sa propre base

Samia Hassan est originaire de l’archipel de Zanzibar. De confession musulmane, elle est issue d’une famille modeste. Après un parcours universitaire sans faute, elle intègre plusieurs postes dans l’administration du gouvernement de Zanzibar. Puis Samia Hassan se tourne vers le milieu humanitaire : elle dirige pendant neuf ans, le bureau du PAM à Zanzibar.

Sa carrière politique démarre en 2000 : elle est nommée membre du Parlement de Zanzibar par le parti présidentiel tanzanien. Entre 2000 et 2010, elle a assumé plusieurs portefeuilles ministériels. Discrète et posée, en tant que vice-présidente, elle avait jusque-là endossé un rôle de l’ombre, avec un acquis à son actif : l’interdiction des sachets plastiques.

D’après la Constitution, Samia Hassan devrait achever le mandat du président défunt et assumer les fonctions de Cheffe de l’Etat pendant cinq ans, à savoir jusque 2025.

Ça, c’était un bon président Magufuli. Il a tout fait, les routes, l’électricité, l’accès à l’eau, tout ! Il a fait plein de bonnes choses pendant son mandat. Il n’y aura pas d’autres présidents comme Magufuli !

  Source: RFi