Éthiopie : un soldat érythréen de 16 ans prisonnier de la rébellion tigréenne

(image d'illustration) EDUARDO SOTERAS AFP/Archivos Un tank du TPLF, abandonné au sud de Mehoni, dans le Tigré, en Ethiopie.

En Éthiopie, le Premier ministre Abiy Ahmed a reconnu après des mois de dénégations la participation de l’armée érythréenne aux combats dans le Tigré contre le TPLF. Aujourd’hui, le voile commence à se lever sur la réalité vécue par les soldats d’Asmara, dont des mineurs, envoyés se battre en Éthiopie. À l’image de l’histoire de Rodanim, un lycéen enrôlé de force et aujourd’hui prisonnier de la rébellion tigréenne.

C’est avec stupéfaction que Rozit Yemane a retrouvé la trace de son petit frère. Elle regardait les informations de Dimtsi Weyane, la télévision du TPLF, le 23 mars, quand la présentatrice du journal a nommé Rodanim Yemane parmi les prisonniers de guerre érythréens capturés dans les combats.

Depuis son exil suédois, elle raconte aujourd’hui l’histoire du cadet de sa famille à RFI : Rodanim venait de fêter ses 16 ans, au mois de novembre ; il était encore lycéen, en quatrième. Le 15 décembre dernier, il a été enrôlé de force par l’armée devant chez lui dans son quartier d’Asmara, au cours d’une « giffa », ces rafles de conscrits régulièrement organisés par le régime érythréen. Puis il a été envoyé au camp d’entraînement de Himbirti, puis à la caserne de Kormenae, près de Barentu. À la fin du mois de février, après avoir maintenu un lien téléphonique avec lui, sa famille a perdu le contact.

Rodanim est donc désormais prisonnier du TPLF, quelque part dans les montagnes du Tigré. Selon les informations diffusées par Dimtsi Weyane, Rodanim dit aujourd’hui qu’il avait pour mission, croyait-il, de « capturer Debretsion » Gebremichael, le chef de la rébellion. « C’est horrible et déchirant, déplore sa sœur Rozit. Ils l’ont armé et forcé à se battre. » Désemparée, elle dit espérer que la Croix-Rouge pourra s’occuper de son cas.

La conscription d’enfants soldats par le régime érythréen « est illégale, mais pas nouvelle, explique la directrice de l’ONG Human Rights Concern-Eritrea, Elizabeth Chyrum. Cependant, envoyer des jeunes de 16 ans dans une bataille meurtrière est un pas de plus dans la maltraitance des enfants, dit-elle. Cela crée un précédent que même le président érythréen Isaias Afewerki n’avait pas osé créer ouvertement dans le passé. »

En 2015, une commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme de l’ONU avait déjà dénoncé l’enrôlement de conscrits mineurs dans l’armée érythréenne. Tous les lycéens du pays doivent en effet passer leur dernière année d’études au camp de Sawa, un immense complexe militaire non loin de la frontière soudanaise, après quoi ils sont maintenus dans l’armée ou envoyés se perfectionner dans un institut technologique, et maintenus sous les ordres du ministère de la Défense pour une durée indéterminée.

  Source: Rfi