Très attendu par l’opinion après l’annonce d’Abdelmadjid Tebboune, le remaniement n’a touché que six portefeuilles ministériels. Le grand changement est attendu à l’issue des élections législatives anticipées, qui devront avoir lieu avant la fin de l’été.
L’annonce a tenu en haleine l’opinion pendant 72 heures. Mais ceux qui s’attendaient à de profonds changements au sein du gouvernement ont été déçus, tandis que les pronostics sur des limogeages ont pour beaucoup été déjoués. Comme il l’avait affirmé à plusieurs de ses visiteurs qu’il avait reçus au siège de la présidence les 13 et 14 février, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a procédé dimanche 21 février à un léger remaniement dans le gouvernement d’Abdelaziz Djerad.
Dans son premier discours adressé à ses compatriotes vendredi 19 février, une semaine après son retour d’Allemagne où il a subi une opération au pied droit, le chef de l’État avait annoncé ce remaniement, la dissolution de l’Assemblée nationale, la tenue d’élections législatives anticipées avant la fin de l’été ainsi que la libération de plusieurs détenus du Hirak.
Les changements opérés au sein de l’exécutif concernent six départements ministériels (Industrie, Énergie, Environnement, Tourisme, Ressources en eau et Travaux publics) ainsi que le secrétariat d’État en charge de l’Industrie cinématographique. Comme il est de coutume, la présidence n’a pas fourni d’explications pour justifier le départ de ces ministres.
Défaillances et erreurs de castings
Devant des responsables de l’opposition qu’il a invités à la présidence le lendemain de son retour de convalescence, le chef de l’État algérien a fait part de son mécontentement et de sa frustration à l’égard de certains départements ministériels en évoquant des défaillances, des erreurs de castings ou encore des ministres dont il n’est pas satisfait.
Il s’est toutefois bien gardé de citer des noms ou de designer les ministères qui allaient faire l’objet de changements. Nommé en janvier 2020, trois semaines après l’élection de Abdelmadjid Tebboune, le gouvernement de Djerrad a essuyé de vives critiques pour son manque d’efficacité et sa gestion de la crise sociale et économique générée par la pandémie.
Des sources à Alger indiquent que cet exécutif pléthorique (36 ministres) porte l’empreinte du général Wassini Bouazza, ancien patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DSGI), qui a réussi à y imposer plusieurs de ses hommes avant de connaître une disgrâce spectaculaire, avec son emprisonnement en avril 2020 et sa condamnation à huit de prison. Ce remaniement permet au président de placer des ministres qui relèvent cette fois-ci de son choix.
Ministre de l’Industrie, Ferhat Aït Ali était l’une des cibles principales des critiques contre le gouvernement. Chargé de lancer le chantier de la relance économique, cet ancien inspecteur des impôts était très attendu sur le dossier de l’industrie automobile et de l’importation des voitures de moins de trois ans. Manifestement, son passage à la tête de ce ministère n’a pas été du goût du président. C’est le cas également de Abdelmadjid Attar, qui perd son portefeuille de l’Énergie au profit de Mohamed Arkab, lequel avait brièvement occupé ce poste entre avril 2019 et juin 2020.
Dans la foulée de ce remaniement, le président Tebboune a décidé de créer dix nouvelles wilayas (départements) dans le cadre d’un plan de réorganisation territoriale qui touche principalement les zones du sud du pays.
Ces décisions du chef de l’État interviennent dans un contexte politique marqué par le deuxième anniversaire du Hirak et des appels à la reprise des manifestations qui drainaient des centaines de milliers de marcheurs avant que la pandémie ne donne un coup d’arrêt au mouvement.
Un nouvel exécutif après les législatives si…
Si ce remaniement ministériel est jugé cosmétique, il faudra certainement y voir la volonté de Tebboune de reprendre les affaires en main après une hospitalisation et une convalescence qui ont duré plus de trois mois. L’issue des élections législatives sera déterminante pour l’avenir du gouvernement de Abdelaziz Djerad. Devant ses interlocuteurs de l’opposition, qu’il a longuement reçus en audience, le président a laissé entendre que le maintien ou le départ de son exécutif sera décidé en fonction des résultats du scrutin et des rapports de forces au sein de la nouvelle l’Assemblée nationale.
D’ores et déjà, le pari de tenir ces élections dans un délai de six mois semble compliqué à tenir. L’abstention massive enregistrée lors du référendum du 1er novembre 2020 sur la nouvelle Constitution constitue un désaveu de l’initiative présidentielle autant qu’elle souligne la défiance des électeurs à l’égard des rendez-vous électoraux. La gestion de la crise du Covid-19 et de ses conséquences sociales pèseront lourdement sur la future campagne électorale ainsi que sur le taux de participation.
Source: Jeune Afrique