Sous pression depuis plusieurs jours et visé par une pétition signée par une soixantaine d’élus, le président du Sénat a finalement pris les devants et remis sa démission, ce vendredi.
Alexis Thambwe Mwamba a donc choisi de ne pas aller au bout du bras de fer. Sous pression depuis plusieurs jours, le président du Sénat a déposé sa démission le 5 février, à quelques minutes du début d’une séance plénière qui devait examiner les pétitions réclamant sa destitution et celle des autres membres de son bureau. La plupart d’entre eux avaient déjà remis leur démission, fragilisant encore plus le président du Sénat. Seul Samy Badibanga, premier vice-président et proche de Félix Tshisekedi, conserve son poste, la pétition qui le visait ayant été rejetée par les élus.
Dans un document adressé aux sénateurs, dans lequel il répond aux critiques qui lui sont adressés, Thambwe Mwamba critique « l’irrégularité de la procédure initiée en violation de la Constitution et du règlement intérieur [du Sénat] ». S’il assure qu’« aucun grief ne peut être retenu » contre lui, il achève néanmoins en annonçant sa démission : « Considérant que la confiance n’existe plus entre un groupe de sénateurs et moi-même et qu’un bureau d’âge [est] désormais opérationnel, je vous remets ma démission en tant que président du Sénat. »
Deux mois après la destitution du bureau de l’Assemblée nationale dirigé par Jeanine Mabunda, une semaine après le vote d’une motion de censure contre le Premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, l’issue de ce nouveau bras de fer semblait inéluctable. Cette démission vient conclure une séquence de cinq jours lors de laquelle tout a basculé pour celui qui était l’un des derniers piliers de la majorité auparavant détenue par Joseph Kabila.
Détournement de deniers publics
Pour le président de la chambre haute du Parlement, les ennuis ont débuté le 1er février. Dans une lettre adressée au Sénat congolais, le procureur général près la Cour de Cassation, Victor Mumba Mukomo, avait demandé au bureau d’autoriser l’audition d’Alexis Thambwe Mwamba sur des soupçons de détournement de deniers publics. Dans le viseur de la justice, le retrait, pour le compte du Sénat, de « trois chèques d’un import respectif de 2 millions d’euros, 1 million de dollars et 1 million de franc congolais », le 6 janvier 2021.
Thambwe Mwamba n’a pas tardé pas à riposter. Le 2 février, à l’issue d’une plénière tendue, il a contesté ces accusations, assurant que les fonds avaient été rapportés dès le 7 janvier, et que l’argent était « traçable ».
La justice congolaise n’est pas la seule à s’intéresser à Thambwe Mwamba. Dans un courrier adressé le 3 février au président du Sénat, le directeur de l’Inspection générale des finances, Jules Alingete Key, lui a demandé de justifier l’utilisation de 107 milliards de francs congolais, mis à la disposition du Sénat entre janvier 2019 et décembre 2020.
Le FCC dénonce des « dérives dictatoriales »
Lors de la plénière du 2 février, une série de pétitions avaient été déposées au Sénat, réclamant la destitution de l’intégralité des membres du bureau. En plus de l’affaire de détournement de deniers publics, les 64 signataires reprochaient à Thambwe Mwamba l’absence de rapport de gestion à chaque session parlementaire ou encore une dépense de plus de 4 millions de dollars dans la rénovation du Sénat sans que la plénière n’en ait été informée.
Après Jeanine Mabunda et Sylvestre Ilunga Ilunkamba, Alexis Thambwe Mwamba est donc la troisième personnalité-clé de l’ancienne majorité de Joseph Kabila a céder face à l’offensive que Félix Tshisekedi mène pour reprendre le contrôle des institutions. Le président congolais, accusé par les pro-Kabila d’être arrivé à ses fins en violant la Constitution, a désormais les mains totalement libres pour former son nouveau gouvernement. Plusieurs proches du président assure que la nomination d’un nouveau Premier ministre devrait intervenir dans les prochains jours.