Le gouvernement algérien a exprimé, mercredi, « sa surprise et son étonnement » face à l’annonce faite par le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barro, faisant état de restrictions d’entrée en France pour « certains dignitaires algériens ».
Dans un communiqué rendu public, le ministère algérien des Affaires étrangères a affirmé que les autorités algériennes « n’ont pas été informées de ces mesures ».
« Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères a fait état de mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire français prises à l’encontre de ressortissants algériens titulaires de documents de voyage spéciaux les exemptant de formalités de visas. Le Gouvernement algérien exprime sa surprise et son étonnement quant à cette annonce dont il n’a été aucunement informé comme le commandent les dispositions de l’article 8 de l’accord algéro-français en matière d’exemption réciproque de visas pour les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service », a précisé le communiqué.
Selon la même source, « les autorités algériennes n’ont aucune connaissance de pareilles mesures restrictives à l’exception de deux cas précis intervenus sur la période récente ».
« Le premier cas, sur demande d’explications algérienne, a fait l’objet d’expression de regrets de la part des autorités françaises et a été qualifié d’incident malheureux dû à une rupture dans la chaîne de commandement. Le deuxième cas intervenu très récemment fait l’objet actuellement d’une même demande d’explications adressée aux autorités françaises », a fait savoir la diplomatie algérienne.
L’annonce de ces mesures « dont l’Etat algérien n’a pas été informé, a ajouté la même source, s’inscrit dans la longue liste des provocations, des intimidations et des menaces dirigées contre l’Algérie ».
Ce faisant, le ministère algérien met en avant le principe de réciprocité. « Celles-ci (Ces mesures, NDLR) sont de nul effet sur notre pays qui n’y cèdera pas. Toute mesure attentatoire à ses intérêts fera l’objet de mesures réciproques, strictes et immédiates », a menacé le communiqué.
Poursuivant, le ministère algérien a estimé que « l’Algérie est manifestement devenue l’enjeu de querelles politiques, intra-françaises, où tous les coups bas politiciens sont permis dans le cadre d’une compétition, dont l’extrême droite est l’instigateur, le référant et le donneur d’ordres ».
Cette campagne, a indiqué le même document, aura des « conséquences incalculables » sur les relations entre les deux pays.
« Cette dynamique qui entraine dans son sillage, non seulement des forces politiques françaises, mais également des membres du gouvernement français, peut avoir des conséquences incalculables sur la relation algéro-française dans toutes ses dimensions », a mis en garde le communiqué.
Pour rappel, le contentieux historique entre l’Algérie et la France est très profond. En plus de la question des archives et la restitution des biens d’Algériens confisqués, l’Algérie réclame aussi des réparations sur les essais nucléaires français en Algérie et l’indemnisation des victimes. L’Algérie réclame aussi la reconnaissance des crimes coloniaux par la France officielle.
Les relations entre les deux pays se sont dégradées davantage, depuis l’été 2024, sur fond de reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. En réaction, l’Algérie a retiré son ambassadeur à Paris et le président Tebboune a annulé un déplacement en France, prévu initialement en septembre 2024.
Plus récemment, l’affaire de l’emprisonnement de l’écrivain algéro-français, Boualem Sansal et le refoulement de migrants en situation irrégulière, dont l’influenceur algérien Doualemn, ont suscité la colère des autorités françaises qui menacent désormais de recourir au « rapport de force », selon les déclarations du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau.
Côté algérien, le président Abdelmajid Tebboune a pointé « des déclarations hostiles tous les jours de politiques français », qualifiant le dialogue avec le président Macron de « perte de temps » et mettant en garde contre « une séparation qui deviendrait irréparable ».
« Nous avions beaucoup d’espoirs de dépasser le contentieux mémoriel (…) Mais, plus rien nʼavance si ce nʼest les relations commerciales. Le dialogue politique est quasiment interrompu », a-t-il déploré.
Mardi 25 février, le ministre français des Affaires étrangères a affirmé que « Paris a mis en place des mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire national pour certains dignitaires algériens ».