La France accuse l’Algérie de faire « monter la tension avec des dossiers importants »

Drapeau français flottant

La France accuse l’Algérie de faire « monter la tension « avec des dossiers qui sont importants », a déclaré mercredi la porte-parole du gouvernement Sophie Primas à la sortie du conseil des ministres.

Évoquant l’incarcération de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, elle indique que les deux pays ne parviennent « pas à aboutir à une solution ».

« Pour le reste, le ministre des Affaires étrangères a proposé d’aller en Algérie, de discuter avec le président Tebboune. Nous sommes dans cette perspective d’apaisement avec l’Algérie mais sans naïveté. Nous devons faire face s’il y a des difficultés face à l’Algérie et ramener nos relations avec l’Algérie au même niveau que nos relations avec d’autres États », a-t-elle plaidé.

Sophie Primas considère, à cet effet, que si la relation entre la France et l’Algérie est « suffisamment compliquée, difficile » elle est aussi « belle parfois », ce qui nécessite de « la ramener à une relation d’État à État ».

Ces déclarations interviennent alors que les tensions entre Alger et Paris se sont accrues ces derniers jours après l’affaire de l’expulsion ratée de de l’influenceur algérien Boualem N., connu sous le pseudonyme de Doualemn, expulsé en Algérie avant d’être renvoyé en France.

Agé de 59 ans, il avait été arrêté à Montpellier pour des faits qualifiés « d’incitation à la violence » sur TikTok, et envoyé vers l’Algérie avant de revenir sur le territoire français sur décision des autorités algériennes.

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait évoqué des mesures de rétorsion si Alger « continue l’escalade ».

Dans un entretien sur LCI, il s’était dit « stupéfait » par le refus de l’Algérie de reprendre l’influenceur. Parmi les options évoquées figurent une révision des quotas de visas, une réduction de l’aide au développement ou des ajustements dans la coopération bilatérale.

« La France n’aura pas d’autre possibilité que de riposter si cette posture persiste » a-t-il misé en garde.

De son côté, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau avait vivement critiqué la décision des autorités algériennes de refuser l’entrée de Doualemn, estimant, lors d’un déplacement à Nantes, que « l’Algérie cherche à humilier la France » et qualifiant cette situation de « seuil extrêmement inquiétant ».

En réaction, la diplomatie algérienne avait, dans un communiqué, dénoncé avec fermeté ce qu’elle a qualifié de « campagne de désinformation » menée par certains courants politiques en France, notamment l’extrême droite, à l’encontre de l’Algérie.

« L’Algérie n’est, d’aucune façon, engagée dans une logique d’escalade, de surenchère ou d’humiliation », avait affirmé la diplomatie algérienne qui accuse « l’extrême-droite revancharde et haineuse, ainsi que ses hérauts patentés au sein du gouvernement français » de mener
« une campagne de désinformation, voire de mystification, contre l’Algérie ».

Jugeant « arbitraire et abusive » l’expulsion de « Doualemn », la diplomatie algérienne considère qu’elle « a fourni à cette partie nostalgique de la France l’occasion de donner libre cours à ses règlements de compte historiques avec l’Algérie souveraine et indépendante ».

« Cette occasion a été bien mal-choisie. En effet, le ressortissant objet de l’expulsion vit en France depuis 36 ans. Il y dispose d’un permis de séjour depuis 15 ans. Il est père de deux enfants nés de son union avec une ressortissante française. Enfin, il est socialement intégré dans la mesure où il exerce un emploi stable depuis 15 ans » poursuivait le communiqué de presse.

Selon la même source, « l’extrême droite, haineuse et revancharde, mène, à travers ses soutiens dans le gouvernement français, une campagne de désinformation contre l’Algérie ».

Le Quai d’Orsay avait à son tour réagi à ces déclarations, via son porte-parole Christophe Lemoine.

« Depuis quelque temps, les autorités algériennes ont adopté une attitude assez hostile vis-à-vis de la France » avait-il déclaré samedi sur France Info.

« Il n’y a pas de désinformation dans l’ensemble de cette séquence », avait-il ajouté, indiquant que la France a « atteint avec l’Algérie, un seuil extrêmement inquiétant » mais soulignant que la « posture de dialogue (…) existe encore à Paris ».

Lemoine était néanmoins resté évasif sur les éventuelles démarches que la France pourrait entreprendre pour répondre à l’Algérie.

« C’est une réflexion qui est en cours entre le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, et tout particulièrement son ministre Jean-Noël Barrot, et le ministère de l’Intérieur », avait-il noté.

À noter que la détention de Doualemn, qui se trouve depuis au centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot, en Seine-et-Marne, avait été prolongée de 26 jours. Ses avocats ont fait appel de la décision.

Un de ses avocats, Me Jean-Baptiste Mousset, avait rejeté les accusations portées contre son client, assurant que les faits reprochés, notamment des propos traduits comme un appel au meurtre ou une incitation à la haine, avaient été mal interprétés.

Me Mousset avait précisé, lors d’une déclaration publique, que les enquêtes menées sous la supervision du procureur de la République de Montpellier avaient conclu à l’absence de tout contenu haineux ou intention de nuire. Selon lui, ces conclusions s’appuient sur des traductions réalisées par des interprètes assermentés et des spécialistes de la langue arabe, en tenant compte des nuances linguistiques propres à l’Algérie.