En Afrique francophone, quand l’art s’attaque au Franc CFA

En Afrique francophone, quand l’art s’attaque au Franc CFA

En Afrique de l’Ouest, des murs se transforment en manifestes visuels contre le franc CFA, cette monnaie héritée de l’époque coloniale. À travers des graffitis puissants, des artistes engagés dénoncent l’impact économique et politique de cette devise perçue comme un frein au développement des nations africaines. Ces œuvres interrogent la souveraineté financière des pays concernés et appellent à une réforme urgente.

Utilisé par 14 pays africains, le franc CFA est arrimé à l’euro, conférant à la France une influence importante sur la politique monétaire des États africains. Ce lien, considéré par beaucoup comme une forme de néocolonialisme, limite la compétitivité des produits locaux sur le marché international et freine les efforts d’autonomie économique. La gestion de la monnaie par la Banque de France alimente davantage ce sentiment d’assujettissement.

Les graffitis deviennent des vecteurs de mobilisation dans ce débat complexe. À Ouagadougou, au Burkina Faso, un mur du Lycée Philippe Zinda Kaboré présente une image marquante : le franc CFA représenté comme une arme, accompagné de l’inscription « Sortie du FCFA ». Ce graffiti dénonce cette monnaie comme un outil d’oppression et réclame une souveraineté monétaire.

Des messages multipliés au Sénégal et au Togo

À Dakar, au Sénégal, une fresque illustre la France sous forme d’une tirelire géante, se nourrissant des richesses africaines. Située dans le quartier de HLM 86, elle reflète le désarroi de nombreux jeunes qui perçoivent le franc CFA comme un frein à leurs aspirations économiques.

À Bamako, au Mali, une peinture murale représente Emmanuel Macron métaphoriquement alimenté par l’Afrique, illustrant le déséquilibre des relations économiques. Ce graffiti traduit une frustration partagée par une large partie de la population : un système monétaire jugé obsolète et exploitant les ressources locales.

À Niamey, au Niger, un autre graffiti représente le président français comme un pillard, dénonçant les richesses extraites des pays utilisant le franc CFA. Ce visuel explicite souligne une colère croissante et un désir d’émancipation économique.

À Lomé, au Togo, un graffiti symbolique place le pays à un carrefour : l’un des chemins mène à l’indépendance financière, tandis que l’autre reste ancré dans le franc CFA. Cette œuvre incarne l’urgence de rompre avec les structures héritées de la colonisation pour construire un avenir plus autonome.

Si la contestation du franc CFA n’est pas nouvelle, les appels à une transition vers une alternative, comme l’ECO, restent encore incertains. Malgré les ambitions affichées, l’influence persistante de la France suscite des doutes. Pour beaucoup, seule une monnaie véritablement africaine pourrait libérer les économies ouest-africaines de cette dépendance.

Ces graffitis, bien plus que de simples expressions artistiques, traduisent une résistance collective face à un système monétaire contesté. En mobilisant artistes, militants et citoyens, ils mettent en lumière une revendication essentielle : la souveraineté financière comme clé du développement futur de la région.