Le président français, Emmanuel Macron, a fermement soutenu le recours à la force dans les relations contre la Russie en ayant annoncé l’envoi de soldats français en Ukraine. Mais, ce dernier a fait volte-face au grand dam des États-Unis et tombe en disgrâce aux yeux d’observateurs US.
Le 27 février dernier, Emmanuel Macron a tenu à faire savoir sur un ton martial que «rien ne doit être exclu» pour l’envoi de soldats français sur le sol ukrainien. Du côté des États-Unis, les déclarations du président français, sont -bien sûr- vivement scrutées. Au départ, «cette annonce décisive a été accueillie positivement par de nombreuses personnes aux États-Unis», rappelle Dylan Motin du Responsible Statecraft car «enfin, une grande puissance européenne faisait preuve de leadership en redynamisant l’ordre international libéral». «Une lueur d’espoir a percé les nuages de l’Ukraine alors que les Européens allaient désormais assumer le fardeau de l’Amérique pour sauver l’ordre fondé sur des règles dans leur propre cour», rapporte-t-il.
Le statut de la France est comme une baudruche. Dylan Motin rejoint ici l’analyse d’Observateur Continental qui annonçait en juin dernier «un coup de bluff de la part d’Emmanuel Macron» sur l’envoi de soldats français en Ukraine. Hélas pour l’image de Macron, de l’autre côté de l’Atlantique, le jugement est brutal. «Cependant, presque aussi brusquement qu’il menaçait de guerre avec la Russie, Macron a disparu des radars», pointe du doigt l’analyste US: «Non seulement, il a atténué sa rhétorique, mais il n’a pas réussi à fournir à l’Ukraine un soutien militaire et financier supplémentaire significatif qui correspondrait au statut de la France en tant que puissance économique et militaire occidentale de premier plan».
Les États-Unis peuvent-ils faire confiance au leadership de Macron pour sauver l’ordre international libéral? C’est sur ce point là -point crucial pour Washington et l’OTAN- que Dylan Motin guide ses lecteurs. Maintenant, pour les observateurs US, Emmanuel Macron souhaitait voir la France jouer son propre rôle afin de rester pertinente sur la scène mondiale et de rester engagée avec la Russie, la Chine et le Sud global. Pour le président français, il -littéralement- s’agissait de faire du théâtre, de faire croire que… alors que pour les Américains, il était question d’agir dans le monde réel. «Pour cela, lorsque la guerre en Ukraine a éclaté, Macron a tenté de jouer le rôle de médiateur», fait simplement remarquer Responsible Statecraft: «Il pensait entretenir de bonnes relations personnelles avec Vladimir Poutine. En 2017, il avait reçu le dirigeant russe au château de Versailles, un honneur rare pour un chef d’Etat en visite. En 2019, Poutine est venu au Fort de Brégançon, le lieu de villégiature du président français, suggérant que la relation était devenue plus personnelle».
Disgrâce de Macron sur la scène internationale et sur celle de la politique intérieure française. Vladimir Poutine a montré, par l’image, en début de février 2022 – en choisissant une grande table pour recevoir le président français – au monde entier que le leader de la France n’était pas pris au sérieux par Moscou. Les observateurs US semblent avoir bien scanné Macron plus tard. Pour les États-Unis, c’était devenu clair – avec les élections européennes se trouvant dans l’agenda du président français – qu’en juin dernier il allait vers une défaite écrasante, car, selon Responsible Statecraft, qui cite la triste période des Gilets jaunes, «Macron n’avait pas grand-chose à montrer au cours de ses sept années au pouvoir». Puis, il y a actuellement les conséquences de la dissolution du Parlement français qui traduisent la disparition du poids de la France dans la politique interieure et internationale n’étant toujours pas capable d’avoir un nouveau gouvernement. Par ailleurs, ici, les votes des Français -après les législatives- n’ont pas été respectés. La France est, ainsi, considérée par ses alliés comme un cheval qui a perdu son cavalier.
Responsible Statecraft traduit l’avis américain sur le poulain français en insistant qu’«il lui fallait» un outil de communication c’est-à-dire «un support de campagne pour les élections européennes». «Macron a continué à faire allusion à une implication directe de la France jusqu’au 7 juin, deux jours avant le vote», martèle le média US. Mais, déjà fin juin, le président français avait promis qu’il n’enverrait pas de troupes françaises en Ukraine dans un avenir proche. La volte-face de l’acteur de l’Élysée fait tourner casaque du côté US.
Sur X, le journaliste expert en géopolitique, Dylan Motin, stipule: «Je soutiens ici que Macron n’a jamais envisagé sérieusement d’intervenir en Ukraine et que sa rhétorique servait principalement à d’autres fins». «Presque aussi brusquement qu’il menaçait de guerre avec la Russie, Macron a disparu des radars. Pourquoi?», questionne sur X Responsible Statecraft.
La réponse est que Macron avait, en fait, trois objectifs. D’après l’analyse de Dylan Motin, «il espérait qu’une menace claire d’intervention directe modifierait les calculs du Kremlin. Face à la perspective d’un affrontement direct avec un pays de l’OTAN, Macron pensait que Poutine serait plus ouvert à la négociation». «Sur le plan intérieur, Macron pensait que sa menace pourrait contribuer à faire de lui le leader efficace de l’UE et de l’Occident contre l’agression russe et à créer un effet de rassemblement autour du drapeau avant les élections au Parlement européen». «Enfin, il pensait qu’une position belliciste servirait également à neutraliser les incitations de l’Allemagne à se réarmer».
Le président français n’est pas pris au sérieux à Moscou et aux États-Unis. Au-delà de l’Ukraine, Macron souhaitait assumer le rôle de sauveur de l’Europe et du «monde libre» pour servir des objectifs électoraux et contribuer à sceller la boîte de Pandore du réarmement allemand. Techniquement, la France n’a pas les moyens des déclarations du président français: «Les officiers français ont averti le président que leurs forces n’étaient pas en mesure d’affronter l’armée russe, bien plus nombreuse et aguerrie, et qu’une petite force expéditionnaire serait probablement décimée sans obtenir grand-chose».
Les États-Unis ayant perdu leur acteur de défense européenne de l’ordre international libéral, la question est de savoir si Washington va continuer à s’engager pour l’Ukraine.