En RDC, les prémices d’une extraction responsable du cobalt

Le développement des voitures électriques et des énergies renouvelables a fait exploser la demande mondiale en cobalt, un minerai rare, majoritairement présent dans les sous-sols de la République démocratique du Congo. Alors que les mines – légales et illégales – attirent des populations toujours plus nombreuses et que les dérives sociales et environnementales se multiplient, les multinationales du secteur, comme le chinois CMOC, déploient des initiatives visant à minimiser l’impact de leurs activités tout en redistribuant davantage de revenus aux communautés locales.

Il est bleu, essentiel aux énergies vertes, fait souvent voir rouge aux défenseurs de l’environnement et, parfois, broyer du noir aux populations riveraines des mines d’où il est extrait. En quelques années seulement, le cobalt s’est, du fait de ses extraordinaires propriétés physiques et magnétiques, hissé au rang de ressource stratégique dans un grand nombre de secteurs, de la défense à l’aérospatial, en passant par la chimie et l’automobile. Devenu incontournable dans les technologies bas carbone, le cobalt est notamment présent dans les aimants des turbines des éoliennes, ou encore dans les cathodes des batteries équipant les voitures électriques ou hybrides. En d’autres termes, le précieux minerai est un élément indispensable à la transition énergétique.

Un marché très volatil

Autant de raisons qui expliquent pourquoi la demande mondiale en cobalt devrait, d’ici 2040, être multipliée par vingt, selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie. Problème : les réserves connues ou potentielles ne suffisent pas à répondre à cette demande exponentielle, et celles-ci sont, par les hasards de la géologie, très inégalement réparties sous la surface du globe : aujourd’hui, 70% de la production mondiale de cobalt provient de la seule République démocratique du Congo (RDC). De plus, comme toute activité minière, l’extraction du cobalt nécessite des investissements colossaux et risqués, tout en ayant un impact non-négligeable sur les écosystèmes naturels et les populations voisines des mines. Des facteurs qui, couplés aux constantes avancées technologiques et aux changements de stratégies industrielles des Etats comme des acteurs privés, contribuent à la forte volatilité du prix du cobalt sur les marchés.

Dans cet environnement économique particulièrement sensible et fluctuant, la compétition fait rage entre la poignée de multinationales qui disposent de la surface financière, des compétences et des technologies permettant d’extraire le cobalt. Signe d’un marché en perpétuelle évolution, le numéro un mondial du cobalt, le suisse Glencore, serait ainsi en passe d’abandonner son titre au profit de son concurrent chinois CMOC. Présent sur ce marché depuis 2016 seulement, année au cours de laquelle il a acquis l’immense mine de Tenke Fungurume (TFM) en RDC, CMOC devrait mettre, d’ici à la fin de l’année, en service un second site dans le pays d’Afrique centrale. Situé à Kisanfu, dans le sud de la RDC, la mine a nécessité 1,8 milliard de dollars d’investissements et devrait, à terme, produire 30 000 tonnes de cobalt par an, ce qui ferait d’elle le principal site d’extraction de cobalt au monde.

Quand l’eldorado congolais vire à l’anarchie

Indispensable à la transition écologique, cette frénésie minière n’est pas sans conséquences sur les pays et populations où elle se déploie. C’est là tout le paradoxe. En RDC, défenseurs de l’environnement ou des droits humains dénoncent à intervalles réguliers les dérives liées à l’exploitation minière. Corruption endémique, travail des enfants, accidents, violences, pollution, faibles retombées économiques… : autoproclamée « capitale mondiale du cobalt », la ville de Kolwezi serait ainsi le théâtre d’un véritable « scandale environnemental et toxicologique », dénonce Célestin Banza, un universitaire congolais témoignant dans un documentaire intitulé Cobalt, l’envers du rêve électrique..

Comme le Far West en son temps, l’eldorado congolais attire dans le sud du pays des centaines de milliers de personnes tentant d’échapper à la misère. Toutes ne peuvent être employées dans les mines « officielles » des géants du secteur et beaucoup d’entre elles finissent par travailler, avec les risques associés, dans des exploitations illégales, qui représentent au moins 20% des sites d’extraction en RDC. Beaucoup d’enfants – 40 000, selon certaines estimations – survivent également en travaillant dans ces mines artisanales, quand ils ne tentent pas de s’introduire illégalement sur les sites des groupes étrangers pour dérober, au risque de leur vie, quelques pépites du précieux minerai. Quant à l’Etat congolais, il peine à lutter efficacement contre le phénomène.

Sur son site de TFM, CMOC s’engage auprès des communautés locales

Dans cette véritable jungle, il revient aux multinationales minières de pallier comme elles le peuvent les carences de l’Etat. Toujours dans le sud de la RDC, CMOC a déployé sur son site de TFM un certain nombre d’initiatives visant à améliorer l’impact de ses activités sur son environnement. Le groupe a ainsi mis en place un système, informatisé, de gestion des plaintes, ainsi qu’un groupe de réponse spécialisé. Sur la question environnementale, TFM travaille à réimplanter, via des pépinières et des banques de semences, des plantes adaptées à la forte concentration de métaux naturellement présents dans les sols, participant à la revégétalisation progressive de la région.

Toujours sur le site de TFM, le groupe chinois a renforcé ses protocoles en matière de sécurité, son système de gestion dédié étant, par ailleurs, certifié ISO 45001. CMOC s’engage aussi en faveur de l’égalité des sexes, en soutenant par exemple l’initiative Women in Mining, dont la branche locale est présidée par l’une de ses employées. Enfin, TFM s’engage fortement en faveur des communautés locales, en investissant plus de 30 millions de dollars sur cinq ans dans la santé, l’éducation, le développement économique ou les infrastructures de transport de la région. CMOC reverse aussi 0,3% des revenus de TFM (soit près de 60 millions d’euros cumulés) au Social Community Fund, qui œuvre au bien-être des populations locales. De quoi faire en sorte, sans prétendre régler l’ensemble des problématiques liées à l’exploitation du cobalt, que les habitants du sud congolais profitent, eux aussi, du boom du cobalt et de la transition énergétique des pays développés.