Au Soudan, près de deux semaines après le coup d’État d’Abdel Fattah al-Burhan, les organisations de la société civile ont appelé ce dimanche 7 novembre à deux nouveaux jours de désobéissance civile et de grève générale. Des dizaines d’enseignants qui organisaient une marche pacifique devant le ministère de l’Éducation ont été violemment dispersés. Plus de 80 d’entre eux auraient été arrêtés, tout comme plusieurs militants des comités de résistance. Des atteintes aux droits difficiles à documenter.
Des dizaines d’enseignants manifestant devant le ministère soudanais de l’Éducation ont été violemment dispersés ce dimanche matin, à Khartoum. Selon le syndicat des enseignants, 87 professeurs ont été arrêtés et une enseignante a eu la jambe cassée dans la dispersion. Plusieurs militants des comités de résistance ont aussi été interpellés. Au total, la police et les services de renseignement auraient embarqué au moins 119 personnes, selon un avocat.
Dans la capitale, les quartiers de Umbada, Burri ou Shajara ont été particulièrement ciblés par les forces de l’ordre. Des témoins racontent qu’après avoir été dispersés au gaz lacrymogène, ils ont été pourchassés dans les ruelles et ont eu à essuyer des tirs à balle réelle. Ils mentionnent la présence de pick-up banalisés, chargés d’hommes habillés en civil qui se déchaînaient sur les citoyens, rappelant l’ancien régime.
RFI a suivi ce dimanche deux militants qui tentent, dans l’anonymat ou du moins en secret, de documenter ces atteintes aux droits de l’homme (écouter l’audio). « Les militaires ne montrent aucun signe de bonne volonté, confie Yehya. Ils nous font croire qu’ils négocient, mais ils sont en train de gagner du temps. Ils disent aux diplomates qu’ils vont faire des efforts. Mais en réalité, ils arrêtent de gens, les remplacent par des proches du pouvoir. »
Dans le reste du pays, à Atbara au nord, ou à Nyala au Darfour, ainsi qu’à Port-Soudan, des centaines de personnes sont aussi descendues dans les rues ce dimanche. Mais partout les autorités militaires raffermissent leur emprise sur le pouvoir et procèdent à des arrestations décidément difficiles à documenter, puisque Internet est toujours coupé deux semaines après le coup d’État. Les arrestations recensées à Khartoum ne représentent qu’une petite partie de ce qui se trame ailleurs.
« Ce coup d’État devait arriver », estime Doha, pour sa part avocate et qui tente, avec Yehya, de documenter la situation. « C’était clair que les militaires n’allaient pas rendre le pouvoir aux civils comme prévu, ajoute-t-elle. La même chose se reproduit depuis notre indépendance : il y a eu quinze coups d’État. »
Pour l’heure, les généraux putschistes consolident leur assise sur le pouvoir. Depuis que le 25 octobre et l’arrestation de la plupart des dirigeants civils du Soudan, la liste des détenus ne cesse de s’allonger : politiciens, membres des fameux comités de résistance, militants actifs sur les réseaux sociaux, jeunes arrêtés sur des barricades, ou encore hauts fonctionnaires. Tous ont été appréhendés sans mandat d’arrêt.
Source: Rfi