La terre est sacrée a-t-on coutume de dire. Mais pourquoi donc les nombreux problèmes et querelles qu’a toujours connus le Burkina Faso pour la gestion de ses terres ? En effet, plusieurs crises ont jalonnées la gestion de la terre au Burkina Faso parce que les intérêts des différents acteurs divergent. C’est encore le cas de nos jours avec le projet de loi initié par le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la ville.
« Le Pays des Hommes intègres » a traversé des crises liées à la gestion de la question agraire et foncière. Des crises parfois très violentes qui ont conduit à des morts dans certaines localités. Des familles se sont disloquées du fait de problèmes liés à la terre parce que certains membres ont spéculé sur des propriétés familiales à l’insu des autres. Les différents lotissements qui se sont succédé n’ont pas facilité les choses. Bien au contraire, ils sont venus compliquer davantage les choses. Plusieurs maires ont spéculé sur le foncier en violation totale et flagrante des textes en vigueur. Ce qui n’a fait qu’ajouter les problèmes aux problèmes. Créant une situation explosive latente qui dégénère de temps à autre. Ces crises étaient prévisibles du fait de la gestion mafieuse du foncier par les différentes autorités qui se sont succédé aux affaires. Alors qu’en la matière, plus de responsabilités devraient prévaloir quant à la gestion des terres. Mais ce n’est malheureusement pas le cas et le sujet fait toujours polémique.
L’action de certains acteurs du domaine que sont les sociétés immobilières et promoteurs immobiliers est aussi vivement critiquée par certains burkinabè. Ils sont accusés d’accaparer les terres au détriment des braves populations. Tous ces problèmes ont amené le ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la ville à initier un projet de loi pour faire des réformes qu’il juge nécessaire. En effet, pour le ministre de tutelle, Me Bénéwendé Stanislas Sankara on ne peut pas continuer sur cette lancée. Aussi, la réforme proposée vise pour l’essentiel à redonner à l’Etat toutes les prérogatives de puissance publique sur la question et faire de lui l’unique propriétaire des terres. Une pilule manifestement difficile à faire avaler à certains acteurs du domaine auxquels la présente loi qui régit le domaine donne certaines prérogatives et compétences. C’est le cas des promoteurs immobiliers et propriétaires terriens. Ils semblent avoir fait chorus pour ne pas accepter la réforme proposée. En témoigne les sorties de presse de ces derniers temps. Sorties dans lesquelles ils se sont démarquées du projet de loi.
Le clash parait inévitable
Le ministre en charge de la question a fait clairement comprendre que le projet de loi en préparation allait passer et n’entend donc pas reculer sur le sujet. Pour lui, il y a trop de spéculation sur la propriété foncière. Toute chose qui a entrainé des conséquences : rareté des terres, naissance de zones d’habitats spontanés. Il explique que de vastes domaines sont engloutis par les promoteurs immobiliers qui font uniquement des affaires et s’enrichissent aux dépens des populations. Evidemment, les promoteurs immobiliers ne sont pas du tout d’accord avec une telle lecture des choses. Roger Sam Nikiema, est le Directeur de l’aménagement du foncier et de la promotion immobilière de la société d’Assistance technique et de travaux publiques(ATTP) et également président de l’association des promoteurs immobiliers du Burkina.
Pour lui, il n’est pas question pour les promoteurs immobiliers de soutenir la réforme proposée par le ministre : « Le promoteur ne fait que mobiliser le foncier et faire des projets de promotion immobilière ». Et cela en toute légalité parce qu’exerçant avec un agrément délivré par les autorités compétentes de l’Etat. Il indique que la loi portant Réforme agraire et foncière au Burkina Faso donne compétence à trois entités en matière agraire et foncière. Il s’agit de l’Etat, des collectivités territoriales et des particuliers. Et c’est auprès de ces derniers que sont les propriétaires terrains que les promoteurs acquièrent les terres de façon légale. Il réfute les accusations d’accaparement des terres dont on les accuse. Et pointe plutôt du doigt les agro businessmen ainsi que les cortèges de lotissements sauvages enregistrés au Burkina. Il prévient que si le projet de loi venait à être adopté, cela créerait des remous sociaux.
D’ailleurs « il s’agira d’une loi passive qui ne sera pas respectée » a-t-il lancé. Il accuse l’administration de ne pas traiter les dossiers de promotion immobilière et d’avoir totalement démissionné du domaine. Toute chose qui a contribué à créer des problèmes. « La loi en question vise à nous ramener à des années en arrière et nous n’allons pas l’accepter » a déclaré Roger Sam Nikiema.
Ce que dit la loi
A l’état actuel des choses, la loi est du côté des promoteurs immobiliers et propriétaires terriens. En effet, sous le Conseil national de la révolution(CNR), la loi N84-050/CNR/PRES du 04 août 1984 portant Réorganisation agraire et foncière(RAF) et son décret d’application N85-404/CNR/PRES du 04 août 1985 visait à résorber les difficultés de l’époque. L’objectif était d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et garantir le logement pour tous. L’Etat avait donc une maitrise totale du foncier. Cette loi à subi par la suite plusieurs modifications pour aboutir à celle N034-2012/AN du 02 juillet 2012. Dont le souci premier est de faire de la terre un outil de promotion du développement. On a alors vu les collectivités territoriales et les particuliers avoir des attributions en matière agraire et foncière. Les choses sont donc assez claires à ce niveau car c’est sur la base de cette disposition légale que les promoteurs arrivent à acquérir les superficies auprès des propriétaires. Que ce soit sous forme de cession gratuite ou onéreuse, les promoteurs sont dans leurs bons droits. Les problèmes sont venus du fait de la rareté actuelle des terres.
La spéculation a été faite à outrance. Si bien que les terres de production agro-sylvo-pastorale ont été cédées à certains promoteurs pour mener des activités de promotion immobilière. Cela contribue aussi à étendre les villes à perte de vue et à favoriser la naissance des zones non loties par manque de superficies à aménager pour les populations. Et si les choses se passent toujours comme c’est le cas actuellement, il est clair qu’on est à l’horizon d’une grave crise foncière. C’est donc conscient de cela et pour prévenir que le ministère en charge de la question entend revoir la copie. Toute chose somme toute aussi légitime pour le gouvernement qui exécute un programme qui est celui du Président du Faso. Chacun des acteurs luttent donc pour ses intérêts. Intérêts qui semblent à l’heure actuelle inconciliable. Mais il faut impérativement impliquer tous les acteurs dans le processus afin que les réformes proposées fassent l’objet d’un consensus général.
sont très surtout qu’elle fait vivre plusieurs millions de burkinabè qui n’ont que pour seule et unique bien la terre.