Algérie: grâce présidentielle pour une centaine de prisonniers militants du Hirak

REUTERS/Ramzi Boudina Des manifestants du «Hirak» demandent la libération des prisonniers du mouvement de contestation, à Alger, le 27 décembre 2019.

En Algérie, plus de 100 détenus incarcérés après des manifestations du Hirak vont être libérés malgré leurs condamnations. La grâce vient du président Abdelmadjid Tebboune, officialisée par le ministère de la Justice mercredi dans un communiqué.

En Algérie, les libérations de jeunes détenus du Hirak ont commencé. Ils sont étudiants, coordonnateurs du Hirak ou simples manifestants…. Quarante-six détenus – 44 hommes et 2 femmes – ont été relâchés depuis les annonces du président hier. La plupart avaient été arrêtés lors des manifestations de mai et juin dernier, soit juste avant les dernières élections législatives, et ont déjà passé entre deux et trois mois en détention.

Le président Abdelmadjid Tebboune a ordonné à la justice de « laisser rejoindre leurs familles » malgré leurs condamnations. L’annonce a été officialisée par le ministère de la Justice. Elle concerne 101 personnes. Trente d’entre elles seulement avaient déjà été jugées et condamnées en comparution immédiate, souvent à moins d’un an d’emprisonnement. Les 71 autres sont toujours en attente de leur procès.

Faut-il y voir un changement de cap dans la politique répressive des autorités ? Ou bien ces libérations sont-elles un trompe-l’œil, comme le pensent les militants du Hirak ?

Rupture de confiance

Officiellement, ces libérations et grâces présidentielles ont été décidées dans le cadre des célébrations du 59e anniversaire de l’indépendance, le 5 juillet dernier. Mais pour le militant politique Hakim Addad, fondateur du Rassemblement action jeunesse, elles n’occultent pas la réalité du régime

« La répression fait partie de la stratégie choisie par les autorités algériennes, et ce n’est pas parce qu’il a libéré 101 personnes que, pour l’instant tout du moins, nous pouvons dire que cette stratégie de répression a changé et qu’il est plus dans le fait de tendre la main ou d’écouter les revendications pacifiques et populaires. »

Pour le militant, si ces libérations représentent un soulagement, elles ne sont pas une fin en soi, car « malheureusement, il reste au minimum 200 détenus politiques ou d’opinion dans les prisons en Algérie. Et parmi les 101 personnes libérées, 71 sont libérées provisoirement et seront encore en attente pendant des mois de leur procès ! »

Pour le politologue spécialiste de l’Algérie à l’International Crisis Group, Michael Ayari, la rupture entre l’État et les citoyens est toujours bel et bien présente malgré les tentatives d’ouverture du gouvernement.

Quand on discute avec les Algériens et Algériennes, c’est un peu le mythe de l’éternel retour, un pouvoir qui n’en finit pas de finir, d’utiliser les mêmes recettes. Il y a quand même eu quelques efforts […] mais pas de changements profonds […] Le rapport entre l’État et le citoyen ne change pas aux yeux de la majorité des Algériens

Avant ces libérations et selon le Comité national de libération des détenus (CNLD), plus de 300 personnes étaient en prison pour des faits en lien avec le Hirak ou les libertés individuelles.

  Source: Rfi