Bombardement de Bouaké : l’ancien patron de la DGSE revient sur «l’épisode togolais»

AFP PHOTO PHILIPPE DESMAZES Des soldats français au milieu des ruines du lycée Descartes de Bouaké, le 10 novembre 2004.

Au procès du bombardement de Bouaké, la cour d’assis de Paris a continué à se pencher sur une des zones d’ombres. Le 16 novembre 2004, dix jours après l’attaque, le Togo alerte : 8 ressortissants biélorusses et 2 ivoiriens ont été arrêtés à la frontière avec le Ghana en provenance de Côte d’Ivoire. Parmi ce groupe visiblement composé de mercenaires, les pilotes du raid, soupçonne-t-il. Mais ces hommes seront finalement relâchés, car la France ne donne pas suite. Pourquoi ? Mercredi 7 avril, c’est de Pierre Brochand, l’ancien patron des renseignements extérieurs, la DGSE, que la cour a tenté d’obtenir des réponses.

Quelles suites ont été données à la note envoyée par l’agent de la DGSE à Lomé qui contenait les informations sur l’arrestation du groupe et les photocopies de leurs passeports ? « On ne lui a pas dit de “ne rien faire”, mais de “ne pas prendre d’initiative sans en référer”, ce qui est différent », affirme Pierre Brochand.

« Ces 8 Biélorusses, on n’en avait pas trace dans notre base de données et on n’avait pas encore les photos des pilotes prises à Yamoussoukro. Bien sûr, concède-t-il, qu’ils se disent “mécaniciens agricoles” semblait bizarre, mais on n’avait pas moyen de faire le rapprochement avec les pilotes ».

« Le ministre togolais avait pourtant exprimé ses doutes », pointe le président. « Nous en avions aussi, mais aucun élément de preuve ». « Mais vous auriez pu tenter un recoupement en actionnant vos services en Côte d’Ivoire ? » relance le président, sceptique. « Dans le domaine des forces armées, nous étions dans les mains du renseignement militaire, qui transmet certains éléments et pas d’autres ou plus tard », soutient Pierre Brochand.

« J’ai l’impression que tous les services se renvoient la patate chaude », soupire le président. « Oui, mais j’ai l’esprit tranquille », réplique l’ex-chef des renseignements, qui maintient que ses services n’avaient ni les moyens d’investigation nécessaires ni vocation à « s’ingérer dans une procédure judiciaire ».

« Mettre son agent en stand-by, c’est un peu à s’en laver les mains ? » s’agace un avocat. « Non, c’est toute la question des rapports entre Paris et les postes sur place, rétorque Pierre Brochand. La DGSE n’est pas un service qui prend des décisions politiques. » « Et on n’a reçu aucune instruction », rappelle-t-il.

  Source: Rfi