Maroc : un jihadiste appelle au carnage depuis l’Allemagne

© DR L'ex-détenu salafiste Mohamed Hajib.

Mohamed Hajib, ex-détenu et figure du salafisme marocain, a appelé publiquement ses compatriotes désireux de se suicider à commettre des attentats au Maroc. En Allemagne où il vit, les autorités n’ont, pour l’heure, pas réagi.

Dans une vidéo diffusée sur sa chaine YouTube début mars, Mohamed Hajib, ex-détenu au Maroc entre 2010 et 2017 pour terrorisme, appelle ses compatriotes qui voudraient en finir avec la vie à le faire avec « honneur » et de façon « utile ». Comprendre : plutôt que de se donner la mort, commettre des attentats-suicides.

« Si vous avez dépassé la peur de mourir au point de vouloir mettre fin à vos jours, alors faites-le en hommes et en femmes dignes de ce nom, et emportez avec vous ces « chiens » qui vous entourent », les interpelle-t-il dans ses vidéos diffusées depuis l’Allemagne, où il vit et dont il possède la nationalité. « Plutôt que de perdre inutilement la vie et de vous présenter devant Dieu en suicidés (considéré comme un péché majeur chez les musulmans comme dans toutes les religions monothéistes, ndlr), servez une cause juste et mourrez avec honneur et dignité, en martyrs ».

Incitations au terrorisme

Des incitations au terrorisme qui ne sont pas passées inaperçues, et qui ont provoqué de vives réactions, y compris du côté de la mouvance salafiste marocaine. « Tu es un lâche terroriste ! », s’est ainsi indigné Bouchta Charef, son ex-compagnon de cellule, pointant au passage les méthodes de Hajib, ancien volontaire du jihad en zone pakistano-afghane.

Selon Bouchta Charef, celui qui se présente comme un adepte de la mouvance prosélyte Jamaat Al Tabligh irait jusqu’à tatouer son corps à l’aide de henné et de ghassoul (argile) pour simuler des traces de torture de la part des autorités marocaines. Il évoque par ailleurs des liens de l’ex-condamné pour terrorisme avec Al-Qaïda.

Malgré l’aspect alarmant de ces appels au meurtre, Mohamed Hajib continue de couler des jours tranquilles en Allemagne. Du côté des autorités allemandes, aucune réaction n’a d’ailleurs été enregistrée jusque-là.

L’homme n’en est pourtant pas à coup d’essai : condamné pour « constitution d’une bande criminelle » et libéré en 2017 (après que le Groupe de travail sur la détention arbitraire de l’ONU se soit mobilisé en sa faveur), il s’est déjà illustré sur sa page Facebook et sa chaine YouTube à plusieurs reprises en se livrant au « takfir » –pratique qui consiste à désigner comme « mécréants » ou « apostats » les musulmans qui n’adhèrent pas au dogme salafiste, et donc à rendre leur mise à mort « licite ».

Ces menaces perpétrées depuis l’Allemagne surviennent dans un contexte de tensions diplomatiques entre Rabat et Berlin. Une note de Nasser Bourita, le ministre marocain des Affaires étrangères, qui a fuité le 1er mars évoquait des « malentendus profonds » entre les deux pays. Parmi eux, la question du Sahara, des soupçons d’ingérence de fondations allemandes présentes au royaume et le cas justement de Mohamed Hajib, à propos duquel les autorités marocaines estiment que l’Allemagne se montre peu coopérative.

Ce laxisme allemand face aux jihadistes ne concerne pas que le Maroc ou le cas Mohamed Hajib. L’émission « Enquête exclusive » de la chaîne française M6 lui a même consacré un volet dimanche 7 mars, où l’on a pu voir d’anciens bourreaux de Daech, dont le tristement célèbre « Samir », coupeur de tête qui jouait au football avec les têtes de ses victimes, vivre dans l’impunité la plus totale.

   Source: Jeune Afrique