Dikwa, dans le nord-est du Nigeria, a été de nouveau le théâtre lundi soir d’affrontements entre l’armée et des insurgés, soupçonnés d’être affiliés à l’État islamique. Si aucun bilan n’a pour l’instant été donné, les Nations unies ont « condamné avec fermeté » une attaque violente qui risque fortement d’affecter le soutien apporté à des milliers de personnes.
Dans un communiqué publié ce mardi 2 mars, le coordinateur humanitaire de l’ONU au Nigeria, Edward Kallon fait part de son indignation face à l’attaque contre la ville de Dikwa. Une attaque qui a « directement ciblé » des installations et des travailleurs humanitaires, déplore-t-il.
Plusieurs agences et un hôpital ont été incendiés ou ont subi des dommages lorsque des islamistes présumés ont attaqué lundi soir un camp militaire et un centre humanitaire. Aucun groupe n’a revendiqué l’attaque de la ville, mais dans le même communiqué, l’ONU parle d’« un groupe armé non étatique » comme étant à l’origine de cette « violente attaque. »
Le porte-parole militaire nigérian Mohamed Yerima a de son côté déclaré que l’armée avait repoussé l’attaque sur Dikwa, et a jugé la situation normale à la mi-journée.
Plus tôt dans la journée, d’autres sources affirmaient que la ville était tombée aux mains des assaillants. Une ville pourtant reconvertie en forteresse défensive puisqu’elle accueille l’un des « super-camps » de l’armée. Or, c’est la troisième fois que les jihadistes présumés ont réussi à pénétrer dans Dikwa, signe supplémentaire d’une situation sécuritaire qui ne cesse de se dégrader.
L’aide humanitaire en danger
Une situation qui risque fortement de compromettre l’aide humanitaire dans la région. « Cette attaque affectera le soutien apporté à près de 100 000 personnes qui ont désespérément besoin d‘aide humanitaire, explique Sandy Maroun, chargée de communication du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU au Nigeria. Surtout avec la pandémie qui risque de se propager dans l’État de Borno, leurs besoins vont changer, leur situation va se détériorer. Ça va être un défi. » L’Ocha appelle donc « toutes les parties armées à mettre fin à la violence et à garantir la protection des civils et du personnel humanitaire. »
Il y a dans toute une série de villes secondaires à travers le Borno des camps de déplacés qui sont sous la protection de l’armée et qui dépendent totalement de l’aide humanitaire. Apparemment il y a déjà eu des évacuations d’humanitaires aujourd’hui depuis d’autres endroits du nord du Borno. C’est très préoccupant.
Une campagne abandonnée aux terroristes
Le spécialiste Marc-Antoine Pérouse de Montclos directeur de recherche à l’IRD (Institut de recherche pour le développement) souligne par ailleurs que la petite ville de Dikwa est représentative des cibles actuelles de l’Iswap, une faction liée à Boko Haram. Le groupe terroriste ne mène quasiment plus d’actions dans les grandes agglomérations.
« Depuis l’arrivée au pouvoir du président Buhari en 2015, l’armée s’est retranchée dans des super-camps, des espèces de forteresses, et du coup laisse le champ libre dans les campagnes où les groupes jihadistes divers et variés circulent, souvent avec des voleurs de batailles et différents groupes armés dans la zone. Donc on est là dans une configuration de guerre de guérilla assez classique, le gouvernement tient les villes et les campagnes sont aux mains des insurgés. »
Source: Rfi