Les banques camerounaises, premiers investisseurs en titres publics sur le marché monétaire de la Cemac, attendent les précisions de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) sur son programme de rachat d’obligations publiques. Annoncé il y a quelques jours, il est chiffré à 600 milliards de FCFA et devrait durer six mois avec une prolongation possible de six mois supplémentaires en tant que de besoin et suivant les perspectives économiques en 2021.
L’institution d’émission et de contrôle de la monnaie a annoncé que cette mesure est un autre de ses instruments exceptionnels visant à soutenir les États durant cette période marquée par la pandémie de coronavirus. Mais elle n’a donné aucune information sur la date du début de l’opération et les conditions qui y sont associées. Les banques restent attentives. Il faut dire que cela pourrait leur permettre d’avoir de la trésorerie et de baisser le coût du risque pour les emprunteurs publics.
Selon une source bancaire, le secteur craint surtout que ce programme soit fortement conditionné, comme cela est le cas pour l’augmentation exceptionnelle des injections de liquidités engagée par la banque centrale en avril dernier. Cette opération reçoit d’ailleurs peu de souscriptions. Aussi, les arbitrages pour le secteur bancaire seront complexes. Il faudra calculer entre ce qu’on aurait gagné si on gardait les titres jusqu’au remboursement des dettes et ce que la Beac propose aujourd’hui.
Il faudra aussi mettre sur la balance les besoins actuels de trésorerie. Selon des données sur l’activité de banque à fin avril 2020, le taux des créances douteuses (dont le remboursement est confronté à un risque élevé) atteignait les 16% d’un encours global de crédits de 3650 milliards de FCFA. Cela fait un montant brut de 585 milliards de FCFA de créances douteuses pour les banques commerciales camerounaises dont seulement 456,2 milliards de FCFA sont provisionnés, traduisant un besoin de trésorerie.
Avec les implications économiques du Covid-19, cette situation a pu se dégrader davantage. D’autres personnes proches du secteur financier renseignent que la trésorerie des entreprises non financières est actuellement mise à rude épreuve par la pandémie. La principale organisation patronale (Gicam) quant à elle prévoit une baisse du chiffre d’affaires annuel des entreprises de plusieurs milliers de milliards de FCFA.
La BEAC a indiqué qu’elle effectuerait des rachats de titres publics en tenant compte de la conjoncture. Mais la question est de savoir jusqu’où elle peut gonfler le passif de son bilan sans dégrader ses propres fondamentaux. La deuxième question en effet est celle de savoir jusqu’où elle pourrait aller. Une action trop modeste aurait peu d’impact et une action trop forte provoquerait une rupture dans ses capacités d’intervention.
Source : Investir au Cameroun