Attaques au Burkina Faso: les premières sanctions tombent, le scepticisme demeure

(Image d'illustration) AFP PHOTO/ISSOUF SANOGO Des militaires burkinabè lors d'un entraînement pour combattre le terrorisme dans l'est du pays, le 13 avril 2018.

Face à la recrudescence et à la violence des attaques des groupes armés terroristes, les populations burkinabè ont manifesté pour exiger des mesures et demander la démission du président Roch Marc Christian Kaboré. Devant cette colère, les premières sanctions commencent à tomber. Deux hauts gradés des forces armées sont démis de leur fonction, et le président Kaboré s’engage. Mais pour les analystes politiques, ces sanctions sont loin de calmer la colère des populations, vu la gravité de la situation.

Partout dans le pays, les populations ont manifesté pour dénoncer les dysfonctionnements au sein de l’appareil sécuritaire et demander la démission du chef de l’État. Le gouvernement a livré un nouveau bilan de l’attaque contre la gendarmerie d’Inata survenue dimanche 14 novembre : 53 morts, 49 gendarmes et quatre civils tués. Pour calmer la colère des Burkinabè, les premières sanctions sont tombées.

Le commandant du groupement des forces du secteur Nord, qui englobe les régions du Centre-Nord, du Nord et du Sahel, en proie à des attaques terroristes répétées, est relevé de ses fonctions. Le commandant de la première région de gendarmerie, qui couvre les groupements départementaux installés à Kaya, Ouahigouya et Dori, est également remercié.

« Nous ne devons plus entendre parler des questions d’alimentation et des questions de primes dans notre armée », s’est indigné le président Roch Marc Christian Kaboré. Dans son allocution, le président a dit que les « dysfonctionnements » qui minent l’armée du Burkina Faso sont « inacceptables », et qu’il « comprend fort bien les différentes réactions de colère exprimées çà et là ». « Nous devons mettre nos hommes dans toutes les conditions qui leur permettent d’affronter le terrorisme avec l’ensemble du courage et la détermination qu’il faut », a encore ajouté le chef de l’État.

Toutefois, les premières sanctions prises sont insuffisantes, selon certains analystes, qui considèrent ces deux commandants comme des victimes collatérales de l’attaque d’Inata. L’analyste politique Lionel Bilgo estime qu’il y aurait fallu des mesures plus drastiques vu la gravité de la situation. « Le problème est plus profond au sein des forces armées. Il y a une espèce de sabotage au niveau du commandement depuis quelques années et il faut des sanctions exemplaires au plus haut niveau », soutient-il.

Roch Marc Christian Kaboré, lui, a promis qu’une fois l’enquête terminée, les personnes ayant failli à Inata « feront l’objet de sanctions disciplinaires sans exception ». « Je le précise : sans exception », a-t-il martelé.

Les gendarmes étaient à cours de vivres

Roch Marc Christian Kaboré a évoqué des problèmes de logistique, de primes et d’alimentation. Des questions « dont nous ne devons plus entendre parler » a-t-il déclaré. Car le détachement de gendarmerie d’Inata était à cours de vivres, au moment de l’attaque. Selon un document qui a fuité sur les réseaux sociaux et que RFI a pu authentifier, les hommes de la gendarmerie d’Inata étaient en rupture totale de nourriture. Dans cette communication interne à la gendarmerie, qui date du 12 novembre, la veille de l’attaque, le chef de détachement d’Inata demande « un ravitaillement urgent » de vivres. Il explique que depuis deux semaines déjà, les hommes doivent parfois quitter leurs postes pour aller chasser des animaux aux alentours de la caserne. « Cette défaillance provient forcément d’une erreur humaine » explique ce jeudi matin, une source proche du dossier qui assure que le Burkina dispose de vivres en quantité suffisante pour nourrir ses soldats, ainsi que des moyens aériens pour les acheminer.

 Source: Rfi