Résurgence du conflit israélo-palestinien : les nouveaux alliés arabes d’Israël sur la corde raide

MOSA'AB ELSHAMY / AP Un protestataire tient un drapeau palestinien lors d’une manifestation de soutien aux Palestiniens de Jérusalem à Rabat, au Maroc, le 10 mai 2021.

Les Emirats arabes unis (EAU), le Bahreïn, le Maroc et le Soudan, qui ont signé des accords de normalisation avec l’Etat hébreu, se trouvent en porte-à-faux face au retour au premier plan du conflit israélo-palestinien.

Climat de guerre civile judéo-arabe, pilonnage de Gaza, tirs de roquettes du Hamas jusqu’en Galilée : le « nouveau Moyen-Orient », censé surgir des accords de normalisation conclus l’an passé entre l’Etat hébreu et plusieurs pays arabes, n’a jamais autant ressemblé à l’ancien. Le retour au premier plan du conflit israélo-palestinien place en porte-à-faux ces Etats qui, sans le dire, avaient parié sur l’effacement de cette question, ou du moins sa relégation définitive tout en bas de l’agenda diplomatico-médiatique.

Les Emirats arabes unis (EAU), le Bahreïn, le Maroc et le Soudan, qui ont l’un après l’autre reconnu Israël, entre les mois d’août et de décembre 2020, à l’instigation de l’administration de Donald Trump, alors finissante, doivent désormais se livrer à un délicat exercice d’équilibrisme : d’un côté les dividendes stratégiques que cette décision, grassement monnayée auprès de Washington, leur a offerts et qu’ils ne veulent pas ruiner ; de l’autre, l’émotion grandissante de leur population, largement acquise à la cause palestinienne, qu’ils ne peuvent pas complètement ignorer.

Les EAU, le troisième pays arabe à franchir le pas de la normalisation, après l’Egypte en 1979 et la Jordanie en 1994, ne devraient pas avoir trop de difficultés à tenir ce grand écart. Le cyber-autoritarisme en vigueur dans cette pétromonarchie ne laisse aucune marge de protestation possible aux neuf millions d’habitants, qui sont à 90 % des migrants étrangers. Très peu politisés de nature, un effet de la rente pétrolière qui leur assure un niveau de vie très confortable, les Emiratis n’ont guère l’habitude, de toute façon, de questionner les choix de leurs dirigeants.

Un symbole qui ne laisse pas insensible

Reste que dans cette fédération de sept principautés, comme dans tout le monde arabo-musulman, Jérusalem est un symbole qui ne laisse pas insensible. Samedi 8 mai, alors que la répression israélienne dans la partie orientale de la ville sainte s’intensifiait, en prélude à l’embrasement tous azimuts auquel on assiste aujourd’hui, les autorités d’Abou Dhabi ont diffusé un communiqué relativement ferme et étoffé.

Le texte a condamné « l’assaut » contre la mosquée Al-Aqsa, dont les fidèles ont été délogés à coups de grenades lacrymogènes, le « déplacement » des familles de Cheikh Jarrah, un quartier palestinien en butte aux convoitises des colons juifs, et les « atteintes » au statut de la Jordanie, traditionnel gardien des lieux saints musulmans de Jérusalem. La déclaration a appelé Israël à « une retenue maximale pour éviter que la région ne dérive pas vers un nouveau niveau d’instabilité ». Le royaume du Bahreïn s’est lui aussi ému, dans un texte plus court, des « attaques » et des « provocations » israéliennes, « qui violent le droit international et sapent les chances de ranimer le processus de paix ».

 Source: le Monde