Le politologue Aly Tounkara cité par certaines agences de presse a révélé que l’insécurité qui ravage aujourd’hui la zone sahélienne découle de différentes sources : l’intervention de l’OTAN en Libye et les décisions françaises au Mali en sont d’importants facteurs, explique-t-il dans ses propos.
Onze ans jour pour jour après le renversement du président Amadou Toumani Touré, le Mali peine toujours à s’extirper d’une situation sécuritaire délicate, luttant contre les djihadistes et les groupes radicaux. Si les facteurs de la crise sont multiples, l’Occident porte une responsabilité dans l’enchaînement des événements, a expliqué Aly Tounkara, directeur exécutif du Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel.
Or, l’intervention de l’OTAN en Libye a notamment provoqué le retour de certains Touaregs partis s’enrôler dans l’armée de Mouammar Kadhafi. À la chute de celui-ci, ces Maliens sont revenus au pays, rejoignant pour certains les rangs du MLNA et jouant un rôle dans la rébellion de 2012, détaille ainsi l’expert. « La guerre en Libye est un facteur important, particulièrement dans la chute de Amadou Toumani Touré et dans ce qu’il se passe encore au Mali aujourd’hui avec les groupes radicaux violents. La chute de Kadhafi a favorisé le retour des Maliens, qui étaient enrôlés dans l’armée libyenne. Cela s’est ajouté à des volontés sécessionnistes suite à la chute de Mouammar Kadhafi en Libye », déclare-t-il.
Dans ce chapitre il important de noter que la France a lancé son opération Serval au Mali, qui là encore n’est pas exempte de reproches. Paris a notamment fait le choix de dissocier les groupes rebelles des groupes terroristes, alors que les deux partagent de nombreuses similarités. Une erreur de jugement qui a aussi permis au terrorisme de se propager au Sahel, selon Aly Tounkara. « L’insécurité au Sahel c’est aussi l’intervention de la France, associée aux pourparlers de Ouagadougou, qui différencie les rebelles des terroristes. Or, ces deux acteurs ont mis l’État malien en difficulté. Ce sont deux acteurs très liés d’un point de vue anthropologique, ce sont des cousins, des frères, il y a une vraie parenté entre eux », explique-t-il ainsi.
À cela s’est ajouté l’impréparation et le manque de matériel des forces maliennes, qui n’ont pas vu leurs besoins comblés, particulièrement lors de la rébellion touareg, ce qui a alimenté le mécontentement de certains officiers et mené finalement au renversement de Amadou Toumani Touré. Un constat partagé par Bachir Mahamed, vice-président du collectif Urgences Panafricanistes Niger. Ce dernier met toutefois l’accent sur le trouble jeu de la France en Libye, qui aurait attisé les ambitions indépendantistes des Touaregs de l’armée de Kadhafi. Paris leur aurait ainsi promis la constitution d’un État d’Azawad, pour les inciter à faire tomber le dirigeant libyen. « La crise sécuritaire actuelle au Mali est la conséquence directe de la guerre de l’OTAN en Libye. À titre illustratif, parmi les soldats du colonel Kadhafi, il y avait des ressortissants maliens, originaires du nord. La France leur aurait promis la création de l’État de l’Azawad avec Kidal comme capitale, s’ils acceptaient de trahir le Guide », explique ainsi le militant.
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