Une foule d’étudiants, d’enseignants et de sympathisants a défilé à Alger, comme chaque mardi, pour réclamer la libération des détenus d’opinion, et réaffirmer la pluralité et l’unité du mouvement pro-démocratie du Hirak face aux risques de divisions, selon des journalistes de l’AFP.
« Libérez les détenus », « libérez Miloud Benrouane », un étudiant emprisonné à Biskra (nord-est) depuis octobre 2020, ont scandé les manifestants en tapant dans les mains.
Certains brandissaient des portraits de prisonniers.
Une des figures de la contestation étudiante, Abdenour Aït-Said a été arrêté vendredi à Alger, lors du défilé hebdomadaire du Hirak, avant d’être remis en liberté dimanche. Il a été accusé d’ »incitation à attroupement ».
« Nous constatons que +le système+ a peur s’il arrive à mettre des étudiants en prison alors qu’ils ont des examens à passer, comme Abdenour Aït Said qui a été derrière les barreaux arbitrairement », a déclaré à l’AFP Ilyes, un étudiant de 25 ans.
« Peut-être que le pouvoir ne se rend pas compte qu’en emprisonnant Abdenour ou d’autres, ils ne feront que créer des milliers d’autres Abdenour, les manifestations ne s’arrêteront pas », a renchéri Massoum, 22 ans.
Malgré la libération récente d’une quarantaine de détenus d’opinion, une trentaine de personnes sont toujours en prison pour des faits liés au Hirak et/ou aux libertés individuelles, selon le Comité national pour la libération des détenus(CNLD), une association de soutien.
« Presse libre » et « Pour un Etat de droit », ont-ils encore crié, avec, comme à l’accoutumée, les slogans historiques du Hirak: « Etat civil et non militaire », en faveur de la démilitarisation du régime.
Une partie du cortège a exprimé bruyamment son rejet des élections législatives anticipées organisées le 12 juin par « les gangs au pouvoir » pour tenter de sortir de la grave crise politique qui fragilise le pays le plus peuplé du Maghreb.
« Les élections aggraveront la crise », pouvait-on lire sur une pancarte.
– « Cas de torture » –
Certains protestataires ont également dénoncé le recours à la torture par les services de sécurité contre les opposants et accusé de « complicité » ceux qui restent silencieux.
Dans un communiqué, la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH), faisant état de témoignages d’activistes, a renouvelé mardi son appel à l’ouverture d’enquêtes et d’instructions judiciaires sur des cas de torture à l’encontre de militants du Hirak.
« Les révélations (…) mettant en accusation les services de sécurités pour actes de torture et de viol, lors de la garde à vue ou en détention, se poursuivent alors que la torture est formellement interdite et punie par la loi », accuse la LADDH.
La marche algéroise s’est dispersée sans incident en début d’après-midi.
Des rassemblements de moindre importance se sont déroulés à Oran (nord-ouest), et en Kabylie (nord-est), à Béjaïa et Tizi Ouzou, où la marche a de nouveau été empêchée par la police, selon le site d’information en ligne TSA.
Né en février 2019 du rejet massif d’un 5e mandat du président Abdelaziz Bouteflika, impotent et reclus, le Hirak réclame un changement radical du « système » politique en place depuis l’indépendance du pays en 1962.
Ce mouvement populaire inédit en Algérie est pacifique, pluriel – des laïcs aux islamistes — et sans véritable leadership ni structure politique à ce jour.
De son côté, le régime, par la voix du quotidien gouvernemental El Moudjahid, estime que le Hirak « est érigé aujourd’hui en nébuleuse aux mains des extrémistes de tous bords et des résidus de l’ancien régime (Bouteflika) aux abois ».
La justice algérienne a par ailleurs annoncé mardi l’arrestation de cinq personnes soupçonnées de projeter des actions « terroristes » à Tizi Ouzou et à Béjaïa, lors de défilés du Hirak.
Les cinq suspects ont comparu devant un juge d’instruction qui a ordonné l’incarcération de l’un d’eux. Les quatre autres ont été laissés en liberté sous contrôle judiciaire.
Source: La Minute Info