Crise à la CÉÉAC: Kinshasa reste «optimiste» pour les négociations de paix, Kigali accuse la RDC d’«obsession militaire»

Tshisekedi ne rencontrera pas Kagame à Nairobi ce mercredi. Photo : TRT Afrika

Le Rwanda s’est retiré le 7 juin de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CÉÉAC), dénonçant une « dérive » en faveur de la RDC, sur fond de conflit dans l’est de ce pays. La CÉÉAC a prolongé d’une année supplémentaire à sa tête la présidence du chef de l’État équato-guinéen, alors que Kigali devait prendre la suite de Malabo. Le retrait rwandais de cette organisation intervient, alors que des discussions de paix sont en cours sous médiation américaine. Pour le porte-parole du gouvernement congolais, le choix de la CÉÉAC « ne compromet en rien les discussions en cours », tandis que le chef de la diplomatie rwandaise affirme que Kinshasa « n’a pas renoncé à […] son obsession d’une solution militaire ».

Le Rwanda a claqué la porte de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CÉÉAC). Kigali dénonce une dérive de l’organisation sous influence de Kinshasa, dans un contexte de fortes tensions entre les deux pays autour de la situation sécuritaire dans l’est de la RDC.

Le 7 juin, la Conférence des chefs d’État et de gouvernement a décidé de prolonger le mandat du président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema Mbasogo à la tête de la CÉÉAC. Une décision mal accueillie par Kigali, qui devait en assurer la présidence tournante.

Cette crispation intervient alors que des discussions de paix sont en cours entre la RDC et le Rwanda, sous médiation américaine.

Cela « ne compromet en rien des efforts ou les discussions en cours »

Ces tensions pourraient-elles compromettre ces pourparlers ? « La République démocratique du Congo, jusqu’au moment où nous parlons, est encore agressée par le Rwanda, répond le ministre congolais de la Communication et des médias Patrick Muyaya à notre journaliste au service Afrique, Patient Ligodi. Si, aujourd’hui, la CÉÉAC, comme communauté, a réagi au regard de cette réalité, je pense que c’est une logique tout simplement qui ne compromet en rien des efforts ou les discussions en cours qui se font sous médiation américaine, de l’Union africaine, sur fond de la résolution 2773. »

Le 21 février 2025, dans ce texte, le Conseil de sécurité de l’ONU avait notamment décidé que le groupe armé « M23 doit se retirer de Goma, de Bukavu et de toutes les zones contrôlées, et démanteler dans leur intégralité les administrations parallèles illégitimes mises en place sur le territoire de la RDC. Il demande également à la Force de défense rwandaise de cesser de soutenir le M23 et de se retirer immédiatement du territoire de la RDC, sans conditions préalables ».

Interrogé sur son optimisme concernant la signature possible d’un accord de paix entre le Rwanda et la RDC, le porte-parole du gouvernement congolais répond : « Nous avons toujours été optimistes. Mais ici, il faut relever qu’il est important, pour la crédibilité de structures et des institutions régionales auxquelles nous appartenons, de tirer des conséquences de certaines attitudes de certains pays membres, lorsque ceux-ci violent impunément les documents basiques qui régissent l’organisation de ces institutions, en l’occurrence la CÉÉAC. »

« Étrange et consternant ! »

Le Rwanda, de son côté, accuse Kinshasa d’entretenir un climat de belligérance, aussi bien sur le plan diplomatique que militaire. Kigali reproche à Kinshasa de recourir à des mercenaires, de se renforcer militairement, notamment par l’usage de drones, dans le but, selon lui, de préparer la guerre.

Olivier Nduhungirehe, ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale du Rwanda, rappelle à notre journaliste au service Afrique, Patient Ligodi : « Nous sommes en train de négocier un accord de paix qui sera signé à la Maison Blanche lorsqu’il sera prêt. D’ailleurs, cette semaine, des experts rwandais, des experts congolais, vont se rendre à Washington pour entamer des négociations en présentiel pour essayer d’avoir un texte de compromis qui pourrait être signé. »

Il poursuit : « Alors que tout ceci est en train d’être fait, la RDC, parallèlement à cela, est en train de parcourir le monde, de parcourir des organisations régionales, des organisations internationales, et même des clubs de football, pour demander des sanctions contre le Rwanda. Étrange et consternant ! Et cela même démontre que la RDC, malgré sa volonté apparente de s’asseoir à une table de négociation, n’a pas renoncé à ça, à une volonté disons guerrière, à son obsession d’une solution militaire, ce qui est assez dommage. »

Les présidents rwandais Paul Kagame et congolais et Félix Tshisekedi, se sont rencontrés mi-mars au Qatar pour discuter d’un possible cessez-le-feu. Les deux pays sont également engagés dans des discussions facilitées par les États-Unis.