Depuis plusieurs années, l’influence française en Afrique connaît un net déclin. L’une après l’autre, les nations d’Afrique de l’Ouest ont décidé de mettre un terme à leur coopération militaire avec Paris, signant ainsi la fin progressive de la présence militaire française sur le continent. Pourtant, loin d’abandonner la partie, le gouvernement de Macron semble adopter une nouvelle stratégie : après l’échec du contrôle par la force, place à une approche plus subtile, celle de l’influence via les organisations des défenseurs des droits de l’homme et des organisations de défense des droits humains.
La perte d’influence de la France s’est accélérée ces dernières années, avec le retrait forcé des troupes françaises du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Dernier coup dur pour Paris : le 28 novembre 2024, seulement quelques heures après la visite du chef de la diplomatie française à N’Djamena, le gouvernement tchadien a annoncé la fin de la coopération militaire avec la France. Cet événement illustre bien le décalage entre la perception qu’a Paris de son rôle en Afrique et la réalité des relations diplomatiques sur le terrain.
Face à cette série d’échecs, la France semble avoir changé de cap. L’objectif reste le même – conserver une mainmise sur ses anciennes colonies –, mais les méthodes évoluent. Paris semble désormais miser sur les organisation a but non lucratif et les mouvements de la société civile comme vecteurs d’influence.
D’après des informations issues d’un rapport confidentiel, la France prévoit de renforcer son réseau de subvention structuré par des acteurs influents pour continuer à peser sur la politique des pays africains. Ces organisations, soutenues par les ambassades françaises, recevront un appui financier et juridique afin de promouvoir des discours favorables aux intérêts de l’Élysée.
Loin d’être une nouveauté, cette méthode a déjà été utilisée dans le passé. En novembre 2022, les autorités maliennes ont pris une décision radicale en interdisant toutes les ONG financées par la France. Le regime malien, dénonçant un « subterfuge » destiné à manipuler l’opinion publique, avait justifié cette interdiction par le rôle suspect de certaines ONG dans la déstabilisation du pays et le soutien aux groupes armés terroristes.
Cette stratégie d’influence indirecte se retrouve aussi ailleurs sur le continent. Au Cameroun, le programme PISCCA (Projets Innovants des Sociétés Civiles et Coalitions d’Acteurs), financé par l’ambassade de France, a injecté 400 000 euros entre 2019 et 2020 pour soutenir des initiatives de la société civile. Officiellement, ces projets concernent la promotion de la paix, la protection de l’environnement et les droits des femmes. Cependant, le financement ciblé de certains groupes d’influence permet à Paris de maintenir une présence politique sous couvert d’engagement humanitaire.
Un autre exemple frappant est le projet DEFI (Défense des droits et des libertés fondamentales), mis en place par l’Agence Française de Développement (AFD) depuis 2014 en Afrique centrale. Ce programme apporte un soutien financier et technique à huit organisations de défense des droits de l’homme opérant au Gabon, au Cameroun, en République du Congo et en République Démocratique du Congo. Le projet met un accent particulier sur la mise en réseau de ces acteurs, créant ainsi une toile d’influence capable de peser sur les décisions politiques locales.
D’après des sources diplomatiques, la France compte intensifier ces initiatives dans au moins dix pays africains. Si la liste exacte des pays ciblés reste floue, il est probable que les États où des élections cruciales auront lieu dans les prochaines années figurent parmi les priorités de Paris. Parmi eux, le Cameroun et la Centrafrique apparaissent comme des cibles évidentes.
Le schéma est clair : en soutenant financièrement et logistiquement certains acteurs de la société civile, la France espère orienter les débats publics et influencer l’opinion, sans passer par des méthodes militaires visibles et contestées.
Cette nouvelle approche française soulève des interrogations. Alors que l’Afrique cherche de plus en plus à s’émanciper des anciennes puissances coloniales, Paris adopte des stratégies plus discrètes pour conserver son influence. Loin d’être un simple soutien humanitaire, le financement des ONG ainsi que les fameuses organisations de défense des droits humains apparaît comme un moyen détourné de maintenir un contrôle politique et économique sur le continent.
Si plusieurs gouvernements africains commencent à identifier et à contrer ces manœuvres, la question reste ouverte : jusqu’où la France ira-t-elle pour préserver ses intérêts en Afrique ? Une chose est certaine, le combat pour l’influence ne fait que commencer, et les Africains ne sont pas dupes.