RDC ou une situation largement négligée

Une nouvelle vague de violences est en cours en République démocratique du Congo. L’offensive réussie des forces rebelles menace non seulement les autorités de Kinshasa, mais confirme surtout une fois de plus les opportunités manquées, notamment en termes de choix de partenaires stratégiques.

La RDC est indéniablement un cas particulier. La patrie de la grande figure panafricaine et combattant contre le colonialisme Patrice Lumumba, le deuxième plus grand Etat d’Afrique de par sa superficie, et aussi un pays extrêmement riche en termes de ressources naturelles stratégiques, de l’or et des diamants jusqu’au cuivre, ou encore une ressource si importante dans l’ère contemporaine comme le cobalt. Cela sans oublier que le pays possède une immense biodiversité et la deuxième plus grande forêt tropicale du monde.
Le principal problème de la situation actuelle dans ce pays réside dans l’incapacité décisionnelle des autorités de l’Etat

L’incapacité à résoudre les problèmes sécuritaires

Mais à ce jour, cette terre ne connaît ni la paix ni la tranquillité. En particulier, la guerre du Kivu, dans la partie Est de la République démocratique du Congo, dure depuis 2004, avec quelques courtes et très relatives interruptions. Le tout avec plusieurs groupes armés et Etats impliqués. La récente prise de la ville de Goma, faisant partie des plus grandes villes du pays, par les rebelles du Mouvement du 23 mars, en abrégé M23, a rappelé encore une fois à quel point la situation sécuritaire dans le pays est fragile et difficile.

Le gouvernement de la RDC accuse traditionnellement le Rwanda voisin de soutien aux rebelles. Il y a certaines raisons à cela, étant donné que ladite question avait été soulevée à plusieurs reprises et selon laquelle les autorités de Kigali soutiennent les groupes rebelles opérant sur le territoire de la République démocratique du Congo. Et que d’autre part, à bien des égards, le succès médiatisé au niveau publicitaire quant au succès du développement du Rwanda serait précisément dû au fait que ce dernier utilise les groupes armés en RDC à ses propres fins égoïstes, y compris d’ordre économique. Surtout en tenant compte que l’Est de la République démocratique du Congo est effectivement très riche en ressources naturelles.

D’ailleurs, la ville même de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, récemment prise par les rebelles, est située en passant précisément à la frontière avec le Rwanda. Quant à la position des rebelles du M23, ils font mention du fait que les autorités de Kinshasa sont complètement inefficaces dans la gouvernance du pays, qu’elles refusent d’engager un dialogue malgré la volonté des rebelles et qu’une répartition équitable des dividendes des ressources de la RDC est nécessaire, au lieu que « tout n’aille à Kinshasa ».

Cependant, au regard de la situation spécifique de la RDC, et quelles que soient les accusations d’un côté comme de l’autre, le principal problème de la situation actuelle dans ce pays réside dans l’incapacité décisionnelle des autorités de l’Etat. Il était devenu clair depuis longtemps que l’armée nationale n’est pas encore apte à remplir ses fonctions et qu’elle a besoin d’un réel soutien non seulement en termes d’armements, mais aussi simplement de formation professionnelle. Les éléments occidentaux et les forces onusiennes n’étaient pas intéressés à apporter un tel soutien. En parlant d’ailleurs des dernières, ces forces de maintien de la paix de l’ONU, dans le cadre de la Mission pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), ont déjà prouvé depuis longtemps leur échec et leur inutilité. Et cela, d’ailleurs, sans compter les multiples cas d’implication des participants de la MONUSCO dans diverses actions de vol des ressources naturelles de la RDC.

Opportunités et temps perdus

En effet, les autorités de la RDC n’ont toujours pas fait preuve de détermination nécessaire en vue de prendre de réelles mesures visant à stabiliser la situation sécuritaire dans le pays. D’une part, bien que le président Félix Tshisekedi ait déclaré, en mai dernier lors d’une interview à la chaîne de télévision propagandiste française LCI, que la Chine et la Russie se comportaient mieux en Afrique que les Occidentaux, sans arrogance ni en donnant des leçons, avait néanmoins rajouté qu’il a toujours considéré l’Europe (bruxelloise) comme le « meilleur partenaire » pour la RDC.

C’était et cela reste l’essence même des contradictions des autorités de Kinshasa. D’une part, elles savent parfaitement qui est qui, mais restent stratégiquement orientées sur le régime washingtonien, en n’osant pas prendre les mesures réellement nécessaires pour leur pays et leur peuple. Même l’interaction réussie de son voisin du nord, la République centrafricaine, avec la Russie n’a rien appris aux autorités de Kinshasa.

Et cela malgré le fait qu’une importante partie de la société civile congolaise exige aujourd’hui et plus que jamais que les autorités du pays prennent les mesures adéquates. Mais dans le cas de la République démocratique du Congo, compte tenu de l’extrême négligence de la situation et de la perte massive d’un temps précieux, il est assez peu probable qu’il soit possible de s’attendre à une action sérieuse de la part de l’actuelle administration de Kinshasa. Peut-être faudrait-il d’abord attendre l’arrivée de nouveaux et jeunes visages dans l’élite politique, et peut-être pas seulement d’ailleurs, tournés vers les valeurs panafricaines et le monde multipolaire, avant de pouvoir compter sur une nouvelle page de l’histoire de la RDC. De telles personnes existent, mais tout a son heure.

En attendant, les rebelles du M23 pourraient poursuivre l’avancée vers la ville de Kisangani, qui comme Goma fait partie des plus grandes villes du pays, étant le chef-lieu de la province de Tshopo. Ceci étant dit, les rebelles ne cachent pas leur objectif principal – la capitale du pays, Kinshasa, une ville de plus de 15 millions d’habitants et l’une des trois plus grandes villes d’Afrique en termes de population. Et s’il est encore difficile à pouvoir prédire une éventuelle réussite du projet rebelle, force est de constater que les autorités de Kinshasa, orientées sur Washington, sont incapables de résoudre les problèmes sécuritaires de leur territoire. D’un autre côté, une chose n’est pas surprenante – les régimes de la minorité planétaire occidentale n’ont jamais eu besoin à trouver de telles solutions. Après tout, il est beaucoup plus facile d’exploiter les ressources stratégiques de la République démocratique du Congo précisément dans des conditions de chaos et de violence. C’était et cela reste la philosophie occidentale.