Malgré l’éloignement de l’Afrique, de nombreuses guerres entre nations européennes ont directement affecté ce continent. La Seconde Guerre mondiale n’a pas fait exception. Elle a d’ailleurs commencé bien avant, en 1935, lorsque l’Italie a envahi l’Éthiopie.
D’une certaine manière, la guerre s’est poursuivie après 1945, sous la forme de la lutte pour l’indépendance, lorsque les Africains ont exigé la reconnaissance de leur contribution à la victoire des alliés sur l’Allemagne hitlérienne.
Selon Olga Koulkova, chercheuse principale à l’Institut d’études africaines de l’Académie russe des sciences, la Seconde Guerre mondiale a « servi de catalyseur dans la crise des empires coloniaux » et transformé la nature de l’activité politique sur le continent africain.
Vers le début de la guerre, l’Afrique était devenue une tête de pont stratégique pour laquelle une bataille féroce était lancée. À bien des égards, les combats sur le continent ont prédéterminé l’ouverture ultérieure d’un second front. Alors que les alliés se battaient pour l’Afrique, l’Armée rouge avait déjà lancé une contre-offensive.
LES FRANÇAIS SE BATTENT POUR LEURS COLONIES
Des centaines de milliers d’Africains étaient mobilisés dans les métropoles. Beaucoup d’entre eux ne savaient même pas pourquoi ils se battaient. Beaucoup plus nombreux étaient ceux qui devaient desservir les troupes et travailler pour l’effort de guerre. Les Africains ont combattu en Afrique du Nord, en Europe occidentale, au Moyen-Orient, en Birmanie (aujourd’hui Myanmar) et dans la péninsule malaise.
L’académicien Apollon Davidson notait que la politique des métropoles à l’égard de la participation africaine à la guerre était ambiguë. D’une part, elles cherchaient à utiliser au maximum les ressources humaines de l’Afrique ; d’autre part, elles craignaient de laisser les Africains avoir accès à des armes modernes. La plupart d’entre eux ont servi dans des unités auxiliaires, mais beaucoup ont tout de même reçu une formation complète au combat, avec des spécialisations militaires comme chauffeur, opérateur radio et agent de transmission.
Outre la lutte contre l’Allemagne et ses alliés, la lutte de deux régimes français occupait une place particulière sur le continent africain : le gouvernement de Vichy et les partisans de la France libre de Charles de Gaulle s’y confrontaient. Il convient de noter que les origines de la doctrine moderne de la politique étrangère de la France puisent dans la « politique de grandeur » du général de Gaulle et sont directement liées aux événements de la Seconde Guerre mondiale.
Le régime de collaboration de Vichy, qui a émergé dans le sud de la France après sa défaite au début de la Seconde Guerre mondiale et la chute de Paris, a duré de 1940 à 1944. Dans le même temps, le nord de la France et la côte atlantique ont été occupés par l’Allemagne nazie avec l’accord du gouvernement de Vichy.
Le régime de Vichy s’est étendu en Afrique et s’est implanté dans les colonies. Les côtes françaises de Somalie et de Madagascar ont soutenu le maréchal Pétain et sa « révolution nationale ». Le Gabon était également solidaire, jusqu’à ce que les troupes de la « France libre » y ont fait irruption à la fin de l’année 1940. Cependant, la position côtière du Gabon rendait difficile toute opération militaire sur le territoire de la colonie, car le gouvernement de Vichy pouvait envoyer des renforts navals. L’Algérie, la Tunisie et une partie du Maroc étaient également des colonies qui ne s’étaient rangées du côté des alliés et de Charles de Gaulle qu’après l’invasion de novembre 1942. Ce faisant, la Tunisie est devenue un champ de bataille entre les forces italo-allemandes et les alliés pendant encore six mois.
Le mouvement de la France libre créé par de Gaulle en juin 1940, était une association de volontaires qui voulaient poursuivre la guerre aux côtés de la Grande-Bretagne. Les efforts du général et des Britanniques visaient principalement les dirigeants civils et militaires des colonies françaises. Les Britanniques, souhaitant qu’il y ait au moins une voix française pour appeler à la résistance, ont mis à disposition de général de Gaulle la radio londonienne. En outre, dans des télégrammes, il lançait des appels répétés aux autorités des colonies en leur proposant de créer un corps de résistance. Mais il n’y a pas eu de réponse.
Le refus de l’administration coloniale française de poursuivre la guerre signifiait pour la Grande-Bretagne l’échec des projets visant à organiser la résistance française. Seule l’Afrique équatoriale française – l’actuel Congo — Brazzaville, la République centrafricaine et le Tchad — se sont intéressés à la France libre. La population camerounaise était également ouvertement favorable à de Gaulle, c’est pourquoi le gouvernement métropolitain était contraint d’accroître sa pression. Dans ces conditions, le gouvernement britannique a décidé d’élargir son soutien à la « France libre ». Tout d’abord, sur le plan économique.
L’intérêt de l’Angleterre pour l’Afrique équatoriale étant faible, les Français libres ont été confrontés au problème de la création de leurs propres forces armées. À la mi-août 1940, de Gaulle a envoyé en Afrique une mission de quatre hommes chargés d’établir des contacts avec les dirigeants locaux — ses partisans — et les unités militaires des colonies britanniques voisines. L’objectif était de franchir simultanément les territoires de Fort-Lamy (le Tchad), Douala (le Cameroun) et Brazzaville (le Congo) afin que le gouvernement de Vichy ne puisse pas influer sur le cours des événements. La première opération réussie a eu lieu au Tchad.
Informé des événements en Afrique équatoriale, le gouverneur du Gabon, Georges Masson, a informé de Gaulle, le 30 août 1940, de son intention de passer du côté de la « France libre ». Cependant, déjà au 1er septembre, le gouvernement de Vichy a envoyé une escadre navale à Libreville, chef-lieu de la colonie, qui devait empêcher le Gabon de se ranger du côté du général de Gaulle, et a nommé un nouveau gouverneur général de l’Afrique équatoriale. Il devait rétablir le régime de Vichy dans les colonies cédées à la France libre.
Lors d’une opération militaire effectuée du 8 au 9 novembre 1940, les Français libres sont parvenus à prendre le pouvoir à Libreville. Pour la première fois, les événements se sont transformés en une guerre civile et ont fait des victimes dans les deux camps. Le 9 novembre, l’armée gabonaise a demandé l’armistice. Le transfert de l’Afrique équatoriale française dans le camp de la « France libre » a été achevé.
SITUATION PARTICULIÈRE DE DAKAR
Le succès de la France libre en Afrique dépendait en grande partie de sa capacité à prendre le pouvoir à Dakar, le centre administratif de l’Afrique de l’Ouest. S’ils parvenaient à s’emparer de cette ville portuaire, la progression vers l’interieur des terres serait beaucoup plus facile.
De Gaulle avait initialement prévu d’atterrir à Conakry (la Guinée française) et de se diriger vers Dakar par voie terrestre, en annexant des territoires d’Afrique de l’Ouest en cours de route. Cependant, le cabinet de guerre britannique, sous la pression de Churchill, a élaboré un autre plan, qui prévoyait une attaque contre Dakar depuis la mer. De Gaulle a reçu un soutien important des forces de la marine britannique – deux cuirassés, trois croiseurs, un porte-avions, six destroyers, deux bataillons de marines — et deux navires néerlandais. Fin août 1940, l’escadre alliée a quitté Liverpool pour Dakar.
Le conflit entre la France et l’Italie sur le territoire de leurs anciennes colonies couvait depuis longtemps, et l’affrontement entre les régimes pendant la Seconde Guerre mondiale l’a exacerbé. Les deux parties se sentaient assez en confiance en Afrique du Nord-Est.
Les informations sur l’intention des Français libres de s’emparer de Dakar ont obligé le gouvernement de Vichy à prendre des mesures préventives. Pour résister aux forces franco-britanniques, six navires ont quitté Toulon. Dans le même temps, deux navires envoyés précédemment pour restaurer le régime de Vichy en Afrique équatoriale étaient revenu à Dakar. Les défenses du port ont été ainsi considérablement renforcées. Le cabinet de guerre britannique a ordonné l’annulation de l’opération, mais de Gaulle est parvenu à convaincre Churchill de la nécessité d’achever ce qui a été entrepris. Il a été cependant vaincu.
Quelques années plus tard, de Gaulle dira: « Le débarquement à Dakar, idée de Churchill, ne m’a jamais inspiré, m’a semblé une aventure …. ». Dakar était une idée britannique, et ils ont échoué. Cela n’a pas affecté les Français libres’ ».
L’OPÉRATION AU GABON
Le conflit entre la France et l’Italie sur le territoire de leurs anciennes colonies couvait depuis longtemps, et l’affrontement entre les régimes pendant la Seconde Guerre mondiale l’a exacerbé. Les deux parties se sentaient assez en confiance en Afrique du Nord-Est.
Les informations sur l’intention des Français libres de s’emparer de Dakar ont obligé le gouvernement de Vichy à prendre des mesures préventives. Pour résister aux forces franco-britanniques, six navires ont quitté Toulon. Dans le même temps, deux navires envoyés précédemment pour restaurer le régime de Vichy en Afrique équatoriale étaient revenu à Dakar. Les défenses du port ont été ainsi considérablement renforcées. Le cabinet de guerre britannique a ordonné l’annulation de l’opération, mais de Gaulle est parvenu à convaincre Churchill de la nécessité d’achever ce qui a été entrepris. Il a été cependant vaincu.
Quelques années plus tard, de Gaulle dira: « Le débarquement à Dakar, idée de Churchill, ne m’a jamais inspiré, m’a semblé une aventure …. ». Dakar était une idée britannique, et ils ont échoué. Cela n’a pas affecté les Français libres’ ».
OPÉRATION MADAGASCAR
Madagascar était une colonie française pendant la guerre, et le régime de Vichy a permis au Japon d’établir des bases sur l’île. Cette situation aurait compromis le ravitaillement de l’armée britannique. C’est pourquoi, en mai 1942, l’opération « Ironclad » a eu lieu, impliquant des troupes du général de Gaulle et britanniques. Il convient de noter que 15 000 tonnes de carburant pour cette opération ont été fournies aux Alliés par l’URSS.
Du côté du régime de Vichy, environ 8 000 soldats ont participé à l’opération, dont 6 000 étaient des tirailleurs malgaches (soldats d’infanterie coloniaux originaires de l’île). La plupart des autres soldats étaient originaires du Sénégal. Le débarquement des troupes alliées n’a rencontré que peu de résistance, et elles se sont emparées des batteries côtières et des casernes des troupes de Vichy. Cependant, les attaques ultérieures de général de Gaulle et des Britanniques ont échoué. Trois semaines plus tard, des sous-marins japonais sont arrivés pour aider les collaborateurs. Au cours des mois suivants, les combats ont été de faible intensité et ce n’est qu’en novembre 1942 que l’île a été libérée des troupes de Vichy et du Japon.
Il s’agissait de la première opération alliée d’envergure combinant des forces maritimes, terrestres et aériennes. Le général Paul Legentilhomme, de la France libre, a été nommé Haut-commissaire de Madagascar.
Comme de nombreuses colonies, l’île a cherché à obtenir son indépendance après la guerre. En 1947, il y a eu un soulèvement, qui a été réprimé en 1948. Madagascar n’a proclamé son indépendance de la France que le 26 juin 1960.
CAMPAGNE D’AFRIQUE DU NORD
La campagne d’Afrique du Nord (10 juin 1940 – 13 mai 1943) est l’une des plus longues batailles du Maghreb. Elle a opposé les forces italo-allemandes et anglo-américaines, rejointes par les Français libres. C’est en Afrique du Nord qu’ont eu lieu les célèbres batailles entre les Britanniques et l’armée du général allemand Rommel, surnommé le « Renard du désert », ainsi que le débarquement des troupes anglo-américaines au Maroc et en Algérie (opération de débarquement « Torch » en novembre 1942).
Le conflit entre la France et l’Italie sur le territoire de leurs anciennes colonies couvait depuis longtemps, et l’affrontement entre les régimes pendant la Seconde Guerre mondiale l’a exacerbé. Les deux parties se sentent assez confiantes en Afrique du Nord-Est.
Le 10 juin 1940, l’Italie a déclaré la guerre à la France et à la Grande-Bretagne. Dans le même temps, le retard technologique de l’économie italienne dans de nombreux domaines a affecté également l’armée. Presque tous les types de chars et de véhicules blindés dont elle était équipée étaient inférieurs aux chars et aux véhicules blindés britanniques en termes de vitesse, d’armement et de qualité du blindage.
En trois ans, les forces alliées ont lancé une série d’offensives qui ont abouti à la capitulation des forces italo-allemandes le 13 mai 1943. La prise de l’Afrique du Nord par les alliés a considérablement aggravé la position stratégique déjà difficile de l’Axe en Méditerranée.
La campagne d’Afrique du Nord a également eu d’autres conséquences. La défaite des Allemands à El-Alamein, en Égypte, en 1942, a anéanti les plans du commandement allemand visant à bloquer le canal de Suez et à prendre le contrôle du pétrole du Moyen-Orient. Après l’élimination des forces italo-allemandes en Afrique du Nord, l’invasion de l’Italie par la coalition anglo-américaine est devenue inévitable. L’écrasement des forces italiennes en Afrique du Nord a également entraîné le renversement du régime de Mussolini et la fin de guerre pour Rome.
L’IMPORTANCE DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE POUR LES PAYS AFRICAINS
Les pays africains, en tant que colonies des puissances européennes, se sont vus impliqués dans la confrontation, souvent sans comprendre les causes et les objectifs de la guerre. Les métropoles ont utilisé des centaines de milliers d’Africains comme main-d’œuvre, mais n’ont pas apprécié à sa juste valeur accordé leur contribution à la lutte contre le fascisme.
Parlant des résultats et des conséquences des opérations africaines pendant la Seconde Guerre mondiale, l’homme politique sud-africain Ronnie Kasrils note: « La victoire sur le fascisme a sauvé le monde de l’esclavage et de la catastrophe. Elle a également entraîné l’effondrement du système colonial, a contribué à l’indépendance de l’Afrique et à l’émergence de mouvements de libération armés comme le nôtre, soutenu par l’URSS et les pays socialistes ».
La Seconde Guerre mondiale a bouleversé les structures sociales traditionnelles et mis à mal les économies déjà fragiles des territoires africains. Cependant, elle a éveillé la conscience politique des Africains et les a incités à lutter pour l’indépendance.