La nouvelle du massacre s’est répandue dans la matinée après une attaque survenue dans la nuit à la périphérie de la ville d’Oicha, dans le territoire de Beni, l’épicentre des ravages perpétrés depuis des années par les Forces démocratiques alliées (ADF), affiliées à l’EI, dans la province du Nord-Kivu.
Dans la matinée, l’information s’est répandue d’une nouvelle tuerie, avec au moins 26 morts, dans le territoire de Beni, au nord de la province, épicentre des exactions des ADF (« Allied Democratic Forces »).
Rebelles ougandais à l’origine majoritairement musulmans, les ADF sont actifs depuis le milieu des années 1990 dans cette région de l’est de la République démocratique du Congo, où ils ont tué des milliers de civils.
En 2019, ils ont prêté allégeance au groupe jihadiste État islamique, qui revendique désormais certaines de leurs actions et les présente comme sa « province centrafricaine ».
Tout récemment, sur le territoire ougandais, ils ont été accusés d’avoir tué trois personnes, dont deux touristes étrangers, le 17 octobre dans le parc Queen Elizabeth. Action revendiquée le lendemain par l’EI.
Lundi soir et jusqu’à l’aube de mardi, des assaillants présentés par les autorités comme des miliciens des ADF ont attaqué un quartier périphérique de la ville d’Oicha, pillant et tuant, principalement à coups de couteau.
« Nous venons de déposer 26 corps à la morgue », a déclaré dans la matinée Darius Syaira, rapporteur de la société civile pour le territoire de Beni. Ce bilan de 26 tués a été confirmé ultérieurement par un porte-parole de l’armée.
Des manifestants en colère ont incendié des véhicules humanitaires qui s’apprêtaient à distribuer de la nourriture. « Nous n’avons pas besoin d’aide humanitaire, nous voulons la sécurité », a déclaré un manifestant.
“De pire en pire”
A l’autre bout de la province, les combats qui s’étaient intensifiés depuis début octobre entre les rebelles du M23 et les groupes armés progouvernementaux se sont rapprochés à une vingtaine de kilomètres au nord de Goma, ville de plus d’un million d’habitants bordée par le lac Kivu et soutenue par près de la frontière rwandaise.
“Il y a des combats à Kibumba depuis ce matin”, a déclaré à l’AFP une source sécuritaire ayant requis l’anonymat.
« Les rebelles affrontent les +wazalendo+ (nom donné aux groupes armés dits « patriotes »). Le M23 vient de nous tirer deux bombes et nous sommes en train de réagir”, a ajouté cette source.
Officiellement, l’armée respecte un cessez-le-feu exigé par la médiation régionale, mais des témoins affirment que soldats et « patriotes » combattent ensemble contre le M23, une rébellion soutenue par le Rwanda selon de nombreuses sources.
Dans l’après-midi, le porte-parole du gouverneur militaire a accusé les rebelles “soutenus par l’armée rwandaise” d’avoir attaqué une position de l’armée.
“Face à cette provocation, toutes les mesures ont été prises”, a-t-il déclaré dans un communiqué. Selon une autre source sécuritaire et un témoin civil, l’armée a utilisé un avion de combat Sukhoi-25 contre les rebelles.
« La situation est de pire en pire. Les deux camps échangent des tirs d’armes lourdes », a déclaré un habitant. « Nous sommes obligés de fuir. »
Dans un point de situation, la coordination humanitaire des Nations Unies (Ocha) en RDC a estimé lundi à près de 200 000 le nombre de personnes qui ont dû fuir leurs foyers depuis le 1er octobre dans les territoires de Rutshuru et Masisi.
Les combats, qui touchent également le territoire de Nyiragongo, plus proche de la capitale provinciale, ont également fait plusieurs dizaines de morts, tant civils que combattants, ces dernières semaines.
Le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a évoqué lundi une “énième incursion” de l’armée rwandaise la semaine dernière et “une cinquantaine” de civils tués par les rebelles.
Un porte-parole du M23 a fermement démenti cette information.
Le M23 (« Mouvement du 23 mars ») est une rébellion à majorité tutsie qui a repris les armes fin 2021 et s’est emparée de larges pans de territoire au Nord-Kivu.
Une force est-africaine est déployée dans la province mais, comme celle de l’ONU, se retrouve très critiquée par Kinshasa qui lui reproche de ne pas avoir obligé les rebelles à déposer les armes.
L’est de la RDC est en proie depuis près de 30 ans à la violence de nombreux groupes armés, locaux et étrangers, dont beaucoup sont hérités des guerres qui ont ensanglanté la région dans les années 1990 et 2000.
Africa News