Au lendemain de l’annonce du prochain départ du Burkina Faso des quelque 400 militaires des forces spéciales françaises, Paris a décidé de rappeler son ambassadeur Luc Hallade «pour mener des consultations».
Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé le 26 janvier le rappel de son ambassadeur au Burkina Faso au lendemain de l’annonce du départ du pays des forces spéciales françaises d’ici «un mois».
«Dans le contexte des derniers développements intervenus au Burkina Faso, nous avons décidé de rappeler notre ambassadeur à Paris, pour mener des consultations sur l’état et les perspectives de notre coopération bilatérale», a expliqué à l’AFP le Quai d’Orsay.
Interrogée sur le rappel provisoire ou définitif de Luc Hallade, la porte-parole du Quai Anne-Claire Legendre a souligné que Paris avait convenu avec les autorités burkinabè «de traiter de ce sujet en bonne entente et dans les formes diplomatiques qui sont habituelles».
Plusieurs semaines de tensions diplomatiques
Pour l’heure, le ministère «profite de sa présence» à Paris pour prendre le pouls de la situation actuelle et des perspectives de la relation bilatérale, a-t-elle ajouté lors d’un point presse. Dans les usages diplomatiques, un tel rappel pour «consultations» signale un mécontentement avec le pays voire une crise diplomatique. Mais le rappel de Luc Hallade coïncide également avec une demande des autorités burkinabè de remplacer l’ambassadeur.
En décembre, une lettre avait en effet été envoyée à Paris pour réclamer son départ, les autorités burkinabè lui reprochant d’avoir fait état de la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays. L’ambassadeur, qui était arrivé à Ouagadougou à l’été 2019, était toutefois resté à son poste. Et la visite de la secrétaire d’Etat française Chrysoula Zacharopoulou le 10 janvier avait laissé entrevoir une possibilité d’apaisement.
Le tournant est intervenu il y a quelques jours quand le gouvernement burkinabè a décidé de dénoncer l’accord de 2018 relatif au statut des forces françaises présentes dans ce pays. Une dénonciation «formellement» reçue le 24 janvier par le ministère des Affaires étrangères.
«Conformément aux termes de l’accord, la dénonciation prend effet un mois après la réception de la notification écrite», a-t-il précisé à l’AFP. La France respectera «les termes de cet accord en donnant suite à cette demande», a ajouté le Quai d’Orsay.
Face à des relations franco-burkinabè dégradées et un sentiment anti-français grandissant à travers le pays, les responsables français martelaient ces derniers mois que les forces spéciales ne resteraient qu’à la demande des autorités burkinabè.
Redéploiement au Niger ?
«La France n’impose rien, elle est disponible pour inventer un avenir ensemble», avait ainsi déclaré la secrétaire d’Etat à l’issue d’un entretien avec le capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat fin septembre.
Pourtant, peu après cette visite, le gouvernement burkinabè avait fait savoir qu’il affirmerait avec force la souveraineté du pays et entendait «diversifier ses partenaires» dans la lutte anti-djihadiste, longtemps menée principalement avec l’aide de la France, ancienne puissance coloniale.
Le Burkina héberge actuellement un contingent de près de 400 militaires des forces spéciales françaises, dans une opération baptisée Sabre. Ces militaires auront quitté le pays «d’ici fin février» et le retrait de tous les matériels devrait être achevé «fin avril», a affirmé le 25 janvier à l’AFP une source proche du dossier.
Selon des sources concordantes, l’option privilégiée serait alors de redéployer ces militaires d’élite au Niger voisin, qui accueille déjà près de 2 000 personnels français.