Produits pétroliers : le Cameroun perd 8 milliards de recettes douanières par mois pour éviter la hausse des prix

REUTERS / Juda Ngwenya / File Photo Une vue générale du projet gazier de Sasol à Temane, dans la province d'Inhambane, au Mozambique, le 1er juin 2004.

Depuis la décision du ministre des Finances du 29 avril 2022 fixant respectivement à 327 169 FCFA, 314 591 FCFA et 342 933 FCFA par tonne métrique les valeurs douanières à l’importation du super, du gasoil et du pétrole lampant, carburéacteur et essence destinée à l’aviation, le Cameroun perd 8 milliards de FCFA de recettes douanières chaque mois. Ce qui, en 2022, correspond à une enveloppe totale de 72 milliards de FCFA sur les neuf mois suivant la décision de Louis Paul Motazé.

À en croire la direction générale de la douane du ministère des Finances, qui vient de révéler ces chiffres, une note visant à proroger la mise en œuvre de cette décision en ce début d’année 2023 est actuellement en examen. Au demeurant, si celle-ci est prorogée pour le début de l’année 2023, le gouvernement pourrait bien y surseoir en cours d’année, si l’on s’en tient au discours de fin d’année du chef de l’État. « Il est de plus en plus évident que notre pays, comme bien d’autres en Afrique et ailleurs, ne pourra pas indéfiniment échapper à un réajustement des prix des produits pétroliers, si nous voulons préserver nos équilibres budgétaires et poursuivre sereinement la mise en œuvre de notre politique de développement », a prévenu Paul Biya.

En effet, prise « dans le contexte d’augmentation inédite du coût du baril de pétrole (Brent) sur le marché international », la mesure du ministre des Finances du 29 avril 2022 consacre une réduction des valeurs imposables des produits pétroliers, dont les corollaires sont la baisse des tarifs douaniers à payer par les importateurs et le soutien à la subvention colossale de l’État, qui permet d’éviter une augmentation des prix des produits pétroliers à la pompe. Officiellement, cette subvention a atteint une enveloppe record de près 700 milliards de FCFA en 2022 pour les produits blancs (super, gasoil et pétrole lampant) et 75 milliards de FCFA pour le gaz domestique. Autant de ressources financières qui plombent l’équilibre budgétaire de l’État et, selon le FMI, auraient pu contribuer à réaliser d’importants projets d’investissements publics.

Incendie à la Sonara

Pour rappel, depuis l’incendie de la Sonara (mai 2019), l’unique raffinerie de pétrole du pays, le Cameroun importe tous les produits raffinés consommés sur son territoire. À la faveur de cette mutation dans l’approvisionnement du marché en produits pétroliers finis, le prix d’équilibre est tombé de 55 à 40 dollars, selon les simulations faites par la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (CSPH). C’est-à-dire que, lorsque les cours mondiaux vont au-delà, les prix actuels pratiqués à la pompe engendrent des pertes qui doivent être compensées par l’État.

Fort de cette réalité, a-t-on appris le 30 mars 2022 du ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, le prix d’un litre de super revient à 1016 FCFA, alors qu’il continue d’être vendu sur le marché local à 630 FCFA. Le litre de gasoil devrait normalement coûter 1027 FCFA, contre 575 FCFA dans la pratique. Celui du pétrole lampant devrait revenir à 849 FCFA, mais est stabilisé à 350 F à la pompe. Par ailleurs, une bouteille de 12 kg de gaz domestique devrait être vendue à 13 277 FCFA, mais est cédée aux ménages à 6 500 FCFA.

Pour maintenir cette situation inchangée tout au long de l’année 2022 en ce début d’année 2023, dans le contexte international actuel, l’État subventionne la consommation des produits pétroliers. C’est pour éviter une explosion de cette subvention, à un niveau qui imposerait à l’État une revalorisation des prix à la pompe pour ne pas asphyxier le Trésor public, que depuis avril 2022 le gouvernement a revu à la baisse les valeurs imposables applicables à l’importation des produits pétroliers raffinés, se privant ainsi d’importantes recettes.

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