La France suspend son aide au développement avec le Mali. La décision, qui date déjà de quelques semaines, a été rendue publique ce jeudi. Le Quai D’Orsay met en avant le recours de la junte malienne au groupe militaire russe Wagner, ce que Bamako dément.
Le Quai ajoute que Paris maintient néanmoins son « aide humanitaire » et quelques soutiens à « des organisations de la société civile malienne », sans préciser lesquelles. Cette décision crée l’émoi au sein des ONG. En 2020, La France a fourni 130 millions d’euros d’aide au développement au Mali. Dans une lettre adressée au président de la République, elles dénoncent les conséquences de cette suspension sur les populations vulnérables.
Louis-Nicolas Jandeaux, chargé de plaidoyer au sein d’Oxfam France, dénonce une décision motivée par les tensions entre la France et le Mali. « Toute cette aide au développement est complètement sacrifiée par un échec diplomatique dans la région du Sahel. Il y a une conséquence réelle qui est celle de l’existence même des organisations de la société civile malienne qui vont perdre quasiment tout leur financement. C’est pourtant encore une fois ces dernières qui veillent à l’amélioration de l’égalité femmes hommes dans le pays, qui milite pour la défense de la démocratie. »
Louis-Nicolas Jandeaux souligne le paradoxe entre le changement stratégique annoncé de la France dans la région et cette décision : « C’est totalement paradoxal avec le tournant stratégique souhaité par la France dans la région qui voulait réorienter sa politique vers plus d’actions de développement, de responsabilisation des acteurs sahéliens. C’est vraiment une décision qui va à contre-courant de tout ça. »
« On est dans un processus qui démarre »
Pour Bruno Fuchs, député français de la commission des Affaires étrangères, il est trop tôt pour crier haro : « D’abord, les choses ne sont pas complètement calées. On est dans un processus qui démarre, qui est de dire que politiquement, la France ne peut plus travailler avec l’État malien. Et ensuite, je pense, cas par cas, il faut voir avec quelles associations et dans quelles situations on pourra continuer de travailler au Mali. Il faudra voir également les questions de sécurité, la faisabilité, la capacité à assurer l’aide au développement, mais la France doit rester avec les populations maliennes. »
« On ne peut pas laisser aujourd’hui Wagner et le gouvernement malien face aux groupes armés jihadistes qui, eux, revendiquent de protéger la population, insiste le député français. Donc l’aide d’urgence, ça, c’est sûr, elle va continuer du côté français. Et pour le reste, je pense qu’il va y avoir des discussions à partir des prochains jours pour voir le périmètre de l’aide que la France va continuer à accorder ? »
Rfi