A l’occasion de la visite d’Emmanuel Macron au Cameroun, l’ingénieur financier camerounais, Babissakana, lui a adressé une lettre ouverte pour plaider notamment la clôture du compte des opérations de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) en France. C’est à travers ce compte que les pays de la Cemac peuvent acheter des biens en devises et qui, selon certains experts, garantit, en partie, la convertibilité et la parité fixe du FCFA à l’euro.
Babissakana explique sa position en indiquant que le fait pour les États membres de la Beac (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad) de devoir déposer leurs avoirs extérieurs (3 798 milliards de FCFA au 31 décembre 2021) dans ce compte des opérations, logé au trésor français est « sans justification soutenable ».
Pour l’expert financier, il s’agit d’une ingérence française dans la souveraineté monétaire de la Cemac qu’il faut restituer. Il affirme que la décision de restitution de cette souveraineté monétaire peut être prise par la France en application de l’article 17 de la convention de coopération monétaire qui lie les États membres de la Beac à la République française depuis le 23 novembre 1972. Cet article dispose que « tout État signataire peut dénoncer la présente convention. Cette décision prend effet à compter de la date de sa notification à l’État dépositaire. La négociation des arrangements nécessaires sera entreprise immédiatement entre les États signataires à la diligence de l’un quelconque d’entre eux. »
L’ingénieur financier plaide aussi pour le retrait des représentants de la France du Conseil d’administration de la Beac, du collège des censeurs de la Beac, du Comité de la politique monétaire de la Banque centrale et de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale ; l’annulation par la France de sa garantie de convertibilité du FCFA vers l’euro pour soutenir le régime de change fixe.
« Dans cette optique de restauration de notre souveraineté monétaire, le changement ou non du nom de la monnaie tout comme le choix du régime de change incombent aux chefs d’État de la Cemac. Dans le cas où le régime de change fixe conventionnel est maintenu comme instrument de quête de stabilité monétaire, la garantie de la France prétendument dénommée “garantie de convertibilité illimitée” sera remplacée des instruments financiers plus adaptés pour une meilleure maitrise du risque de liquidité internationale (le risque d’épuisement ou de manque des réserves internationales dont dispose la Beac pour honorer ses engagements internationaux), et surtout un développement durable de la crédibilité du régime de change et de la parité de notre monnaie », conclut Babissakana.
L’expert financier avait adressé une lettre ouverte similaire à l’ancien président français François Hollande lors de sa visite au Cameroun en juillet 2015. Comme ce fût le cas lors de ce séjour, la question n’a pas été abordée en public lors de la conférence de presse entre les présidents Paul Biya et Emmanuel Macron. En décembre 2019, les chefs d’État de la Cemac ont chargé la Commission de la Cemac et la Beac de réfléchir à une réforme du FCFA. On ignore à quel niveau se trouve cette réflexion à ce jour.
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