(Agence Ecofin) – Suite au putsch ayant renversé Alpha Condé, la CEDEAO avait proposé une courte période de transition en Guinée d’environ six mois. Alors que le gouvernement de transition au pouvoir souhaitait gouverner pendant encore 39 mois, le CNT, organe tenant lieu de Parlement, vient de faire passer ce délai à 36 mois.
Le Conseil national de la transition (CNT) vient de fixer à 3 ans la durée de la transition en Guinée. L’institution qui tient lieu d’organe législatif transitoire a annoncé sa décision, le mercredi 11 mai.
Cette période légèrement moins longue que celle proposée par le gouvernement de transition actuellement au pouvoir est censée permettre au gouvernement de stabiliser suffisamment la situation économique et politique du pays, pour organiser des élections libres. Bien que cette décision semble désormais définitive, elle intervient à contre-courant des demandes de la communauté internationale et semble rencontrer l’opposition de plusieurs partis politiques dans le pays.
En effet, suite au putsch de septembre 2021 ayant abouti à la chute de l’ancien président Alpha Condé, la CEDEAO avait proposé aux nouveaux dirigeants guinéens une transition « très courte » ne dépassant pas les six mois. Cependant, le colonel Mamady Doumbouya (photo), actuellement à la tête du pays, avait indiqué que son gouvernement aurait plutôt besoin de 39 mois pour stabiliser le pays, un délai réduit de seulement 3 mois par le CNT.
Mercredi, plusieurs partis politiques et mouvements d’opposition se sont insurgés contre cette décision du CNT. Dans un communiqué, le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) a ainsi déclaré son rejet de la décision du CNT, qu’elle estime être « en violation délibérée de l’article 77 de la charte de la transition, élaborée et adoptée de façon solitaire par le CNRD ».
« La Coordination nationale du FNDC rappelle que le Conseil national de la transition n’a ni la légitimité ni les prérogatives de déterminer la durée de la transition. [Elle] rejette avec force ce délai adopté [et] dénonce l’arrogance et la volonté du CNRD de saboter cette transition chèrement acquise au prix du sang des militants pro-démocratie », précise le document. Une déclaration qui semble présager de nouveaux jours de contestation, le mouvement ayant indiqué qu’il organiserait de nouvelles « manifestations citoyennes pacifiques sur les voies et places publiques, pour s’opposer à la volonté du CNRD de s’offrir un mandat, par des manœuvres illégales et illégitimes ».
Pour rappel, la Guinée est avec le Mali et le Burkina Faso, le troisième pays de la CEDEAO en pleine transition après avoir subi un putsch. Suspendu par l’institution, Conakry s’est lancé dans un processus de réparation des torts causés sous la présidence d’Alpha Condé. Le 4 mai dernier, on apprenait d’ailleurs que ce dernier était visé avec 26 anciens membres de son régime par une procédure judiciaire pour des crimes économiques et d’atteinte à la vie humaine.
Pour l’heure, la CEDEAO ne s’est toujours pas prononcée sur la décision du CNT, mais de nombreux observateurs craignent que de nouvelles sanctions ne soient annoncées par l’institution contre le pays ouest-africain.