A Abidjan, en raison du manque de logements pour une population qui ne cesse de s’accroitre, les constructions se multiplient et les accidents aussi.
Derniers en date : à Treichville il y a 10 jours et à Cocody dans la nuit de dimanche à lundi, deux effondrements d’immeubles ont fait au total près de 15 morts et des dizaines de blessés. Problème principal : le non-respect des règles d’urbanisme.
L’immeuble qui s’est effondré à Cocody-Angré ne datait que de 2013 mais comme 80% des chantiers d’Abidjan, il avait vu le jour sans permis de construire. Le bâtiment affichait des anomalies, des fissures et malgré l’interpellation des occupants, le propriétaire n’avait rien fait.
A Treichville, il s’agissait d’une extension. La fragilité de l’édifice était connue et l’arrêt du chantier, ordonné par les autorités, n’avait pas été respecté jusqu’au drame du 27 février. La marchandisation du foncier a occasionné la fin de la planification urbaine, et donc un important désordre au profit des promoteurs.
Au sein de la société civile, on pointe du doigt les autorités : des fonctionnaires seraient corrompus ou complices de trafics de matériaux, accuse Issiaka Diaby, du collectif des victimes de Côte d’Ivoire. Son organisation affirme que sur 30 grossistes en matériaux, seuls deux vendent des fers à béton respectant les normes en vigueur.
Le ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme défend son action. Bruno Koné promet que les politiques de sensibilisation, de contrôle et de démolition vont se poursuivre. Il renvoie la responsabilité vers les maîtres d’ouvrage. Il faut qu’on comprenne que le bâtiment ou les infrastructures se réalisent avec des professionnels, renchérit l’ordre des architectes.
La nécessité de plus de contrôle
Mais face aux drames qui se multiplient, des Ivoiriens demandent aux autorités d’agir. Jean-Charles Kouakou, abidjanais et autoentrepreneur, multiplie les exemples de problèmes liés au secteur de la construction. Il souhaiterait un contrôle plus accru, explique-t-il au micro de notre correspondant à Abidjan, François Hume-Ferkatadji. « Il faut permettre aux pouvoirs de jeter un coup d’œil, d’avoir les appareils qu’il faut pour contrôler vraiment ce qu’il a mis dans sa maison, le ciment qu’il a fait, si c’est pas le cas il faut qu’on casse la maison et revoir la construction. »
Selon le ministère de la Construction, 51 démolitions ont été ordonnées en 2021. Une goutte d’eau dans un secteur en plein boom. Jean-Charles Kouakou, relate notamment une escroquerie dont son oncle a été récemment victime. Les fers à bétons n’étaient pas conformes. « Quand on a fait le constat, on a compris aussi que ces personnes ont pris de l’argent sans payer les matériels qu’il faut pour pouvoir construire la maison, parce que les fers en question qu’ils ont utilisé pour la maison, ne sont pas immédiatement les fers qu’il faut pour la maison. »
Selon l’architecte Yao Konan, les problèmes de dosage du ciment, du choix des colles, ou d’utilisation de matériaux défectueux sont effectivement très courant. « Que les dosages ne soit pas bien fait, ça je peux le confirmer, souvent sur les chantiers on voit beaucoup de choses, que les aciers ne soit pas de bonne taille (..) ça aussi je peux le confirmer. »
En 2020, selon les chiffres officiels, au moins onze immeubles se sont écroulés.
« Pour nous, il y a la recherche du gain effréné. Abidjan a besoin d’un besoin criant de 600 000 logements par an. Certains se permettent de construire des immeubles à la va-vite, sans accompagnement…. Il y a aussi la corruption. »
SUNU Afrik