Le Burkina Faso, « pays des hommes intègres » a été victime d’un coup d’Etat militaire. En effet, une junte militaire dirigée par le Lieutenant-Colonel, Sandaogo Henri Paul Damiba a mis fin au pouvoir du désormais ancien Président, Roch Marc Christian Kaboré. Les causes réelles d’une situation de gangrène qui a emporté le régime Kaboré.
L’ancien Président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré a été plus victime de sa naïveté que d’un manque de charisme ou de vision dans la gestion du pays. En effet, comment a-t-il pu croire qu’il pouvait gouverner tranquillement lorsqu’on sait dans quelles conditions, il a accédé au pouvoir d’Etat ? En rappel, le Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP) a été créé en son temps, sur les chaudes cendres de son « père » en perte de vitesse et du pouvoir, le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP). Alors parti au pouvoir et dont son président également Président du Faso d’alors, Blaise Compaoré venait d’être balayé par la rue. Au détour d’une insurrection populaire et dans des conditions assez troubles. En effet, on se rappelle que l’actuel Président du MPP, Bala Alassane Sakandé et le légendaire et regretté Salif Diallo qui est en réalité le concepteur du MPP, n’ont pas manqué de revendiquer haut et fort la paternité de cette insurrection. Certains analystes ont même fait remarquer que si la rue n’arrivait pas à faire partir le Président d’alors Blaise Compaoré, une fraction de l’armée était en coulisse et devait terminer le travail d’insurrection populaire qui allait dès lors, se transformer purement et simplement en coup d’Etat. L’un dans l’autre, le régime de Blaise Compaoré était arrivé à son terme en 2014 après 27 ans de règne. Un long règne partagé ; revendiqué et assumé par les principaux bonzes et fondateurs du MPP qui étaient Salif Diallo ; Roch Marc Christian Kaboré ; Simon Compaoré et d’autres camarades. En effet, après avoir été les fidèles compagnons politiques et amis de Blaise Compaoré, ces derniers s’étaient retournés contre lui et avaient planifiés sa chute. En dénonçant la volonté de Blaise Compaoré de vouloir à nouveau modifier l’article 37 de la constitution pour se maintenir au pouvoir. Ils n’ont pas manqué aussi par contrainte et réalisme politique sans doute, de dénoncer les autres tares qui existaient et qu’ils avaient grandement contribué à installer. Ils avaient pour noms : mal gouvernance ; corruption et enrichissement illicite ; copinage ; laxisme ; la gabégie entre autres.
Le président déchu Roch Marc Christian Kaboré
Le MPP avait bien anticipé et manœuvré
Le moins qu’on puisse dire est que les camarades d’antan et au temps fort du CDP étaient devenus ouvertement entre temps des ennemis jurés. Et Salif Diallo et les autres, certains du fait que les choses allaient changés et que le régime Compaoré était pratiquement à son terme, avait pris les devants en s’affranchissant du système qu’ils avaient bâti. Ils avaient donc anticipé et quitté le régime Compaoré, instinct de survie oblige aussi sans doute. Dès lors, ils étaient bien placés pour savoir quel serait leur sort s’ils ne parvenaient pas à l’ultime objectif qui était : « Blaise dégage ! ». Une partie importante des militants et militantes du CDP allèrent donc grossir les rangs de l’opposition politique conduite alors par Zéphirin Diabré, ministre d’Etat en charge de la réconciliation nationale et de la cohésion nationale dans le gouvernement dissout par la junte au pouvoir. Le MPP contre vent et marée à tout mis en œuvre pour la chute de l’ancien Président, Blaise Compaoré. Et il est connu que son stratège en chef, Salif Diallo n’à ménagé aucun effort pour signer l’acte de décès de ce qui restait du régime de Blaise Compaoré. La mobilisation en terme de moyens humains ; politiques et financiers lui a permis d’une part de mettre en place le MPP et d’autre part de contribuer grandement à la chute de Blaise Compaoré. Il connaissait bien l’homme ; ses défauts et qualités pour avoir été pendant très longtemps son bras droit. C’est dans un tel contexte et sous la pression populaire qu’est survenue la chute du régime Compaoré. Dès lors, il va s’en dire que l’ancien Président Compaoré qui a été obligé de prendre le chemin de l’exil vers la Côte d’Ivoire, patrie de son épouse et République frère, n’a jamais pardonné à ses amis d’hier. Le pouvoir transmis à Roch Marc Christian Kaboré était bien fragile en réalité et a fini par basculer. Car le grand stratège du parti est parti, laissant les grandes failles qui existaient dans le système ou qui sont apparues sans un remplaçant digne et capable de les combler.
A la guerre comme à la guerre
Blaise Compaoré chassé du pouvoir en 2014, la transition politique qui s’est installée avec le Président, Michel Kafando et Yacouba Isaac Zida, a essayé tant bien que mal de remettre le pays sur les rails. Mais du fait du temps imparti d’une part et de la complexité du cas burkinabè d’autre part, la transition a pris fin laissant de nombreux dossiers importants en suspens et de nombreux chantiers inachevés. Dont celui justement de la réconciliation nationale ; les dossiers en justice concernant les crimes de sang et les crimes économiques ; la paix et la sécurité des biens et des personnes et bien d’autres. La transition politique n’a donc pas permis de vider en réalité les nombreux contentieux avant de passer la main. Elle-même, victime et otage des partis politiques et de leurs intérêts partisans ; de certaines organisations de la société civile et syndicats affiliés et divers forces et courants. Tandis que les mêmes tares qui existaient sous le régime de Blaise Compaoré n’ont pas été bannies à jamais dans le mode de gouvernance. Toute chose qui a fini par exacerber le courroux du peuple. En effet, la corruption ; l’enrichissement illicite ; le népotisme ; le laxisme avaient bien pris pieds. Et la bonne volonté et discours du Président Roch Kaboré, arrivé au pouvoir en 2015, n’y ont pas pu faire grande chose. Plusieurs situations ont été dénoncées par la presse et certaines organisations de la société civile et même étatiques. Avec des preuves à l’appui sans pour autant que des sanctions ne suivent. Donnant alors cette impression d’impunité généralisée sur laquelle n’ont pas manqué de s’appuyer les détracteurs de Roch pour fragiliser le régime et dire qu’en réalité rien n’a changé pour autant et après le départ du Président Compaoré. Sinon que les choses sont même devenues pires avec la situation d’insécurité et les attaques terroristes. Accusé par certains d’être derrière ces attaques qui ne laissaient aucun répit à l’ancien Président Kaboré et dès la prise de son pouvoir, Blaise Compaoré et ses partisans ont plutôt parlé d’incapacité notoire de Roch Kaboré d’apporter des solutions aux attaques et problèmes des Burkinabè. Attaques qui ont occasionnées des centaines de morts et près de deux millions de déplacés et qui sont devenus quasi quotidienne et monnaie courante. Donnant finalement une raison de taille à l’armée pour prendre le pouvoir. C’est un secret de polichinelle que de dire que l’ancien Président Compaoré, sous le couvert d’une diplomatie rayonnante avait ses entrées avec des groupes identifiés et reconnus terroristes. D’ailleurs des manifestants n’ont pas manqué d’exiger la libération de certains fidèles lieutenants de Blaise Compaoré dont Gilbert Diendéré et Djibril Bassolet emprisonnés. Des personnes que certains disent d’eux être des spécialistes des questions terroristes et de sécurité. En tout cas, ce sont surtout eux qui rencontraient des organisations ou personnes fichées comme terroristes ou appartenant à des organisations jugées terroristes. L’ancien Président Compaoré a-t-il d’une manière ou d’une autre pris sa revanche sur ses ennemis jurés en les empêchant d’une manière ou d’une autre de gouverner ?
Le vin est tiré, il faut le boire
Le nouvel homme fort du Burkina, le lieutenant-colonel Sandaogo Paul Henri Damiba
La situation Burkinabè est tellement complexe ou a été rendue telle qu’il est difficile d’avoir des certitudes sur certains sujets. Mais force est de constater que le pouvoir MPP n’a pas su convaincre beaucoup de Burkinabè quant à sa réelle capacité et volonté à faire changer les choses. En effet, elle a refusé de poser des actes forts et sans équivoques sur des sujets comme la corruption ; l’enrichissement illicite ; l’affairisme à outrance de certains cadres et membres du parti. Ajouté à cela un manque d’humilité ; un zèle suicidaire et une arrogance sans pareille, ils ont fini par lier l’ancien Président Kaboré et à le donner à ses bourreaux et autres détracteurs. Qui ont surfé à fond sur son incapacité supposée ou avérée à gouverner pour exiger et finir par avoir son départ. Sous le prétexte surtout de son incapacité à lutter contre cette hydre qui n’a que trop fait de ravage. L’un dans l’autre, toutes les raisons évoquées ont contribuées à l’arrivée de la junte militaire désormais au pouvoir au Burkina Faso, pouvoir si toutefois , il ne s’agit pas de changement de consignes ou des loups de la même galère . Un mouvement qui vient chassé un mouvement .Une junte qui a suspendu la constitution et dissout le dernier gouvernement de l’ancien Président, Roch Marc Christian Kaboré ainsi que l’Assemblée nationale. Les différents acteurs politiques et sociaux s’ils condamnent pour beaucoup ce coup de force par principe disent prendre acte. Si certaines voix s’élèvent pour demander le retour immédiat à l’Etat de droit comme le parti au pouvoir et affiliés de l’ex majorité et certaines organisations de la société civile, d’autres disent soutenir la junte et l’incite à prendre toutes les mesures et le temps qu’elle jugera nécessaire et utile pour le retour surtout de la sécurité et de la paix au Burkina Faso. Les yeux sont donc tournés vers elle et les prochains jours permettront de lire davantage les intentions réelles des uns et des autres et leurs moyens effectifs d’action de mise en œuvre de leurs plans et stratégies. En tout état de cause, il appartient au Lieutenant-Colonel Damiba et ses hommes de montrer patte blanche. Ils doivent travailler à équidistances des différentes chapelles politiques et seulement dans l’intérêt supérieur du peuple Burkinabè. Il y va de leur crédibilité et même de la survie de leur mouvement.Si l’ancien chef de l’Etat n’obtient pas la clémence des nouveaux dirigeants tout pourrait être mise en œuvre pour le poursuivre pour homicide volontaire exemple , le cas de Yirgou. A suivre…
Charles Bako et ANGELIN DABIRE ( Rédaction Burkina Faso )