Les combats font rage entre forces éthiopiennes et rebelles tigréens autour de la ville de Kombolcha, ont raconté lundi des habitants, au lendemain de l’annonce par les rebelles de la prise de ce carrefour stratégique du nord de l’Ethiopie.
Les combattants du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) ont affirmé dimanche s’être emparés de Kombolcha, après avoir revendiqué la veille la prise de la ville voisine de Dessie.
Ces deux villes voisines de l’Amhara, au sud du Tigré, sont situées à un carrefour routier stratégique à environ 400 kilomètres au nord de la capitale éthiopienne Addis Abeba et 300 km à l’ouest de Djibouti.
Si leur prise se confirmait, elle marquerait une nouvelle étape majeure dans ce conflit qui dure depuis un an.
Les communications sont coupées dans une grande partie du nord de l’Ethiopie et l’accès des journalistes est restreint, rendant pratiquement impossible toute vérification indépendante des informations données par les deux parties.
Lundi, des habitants de Kombolcha joints par l’AFP ont raconté avoir entendu des coups de feu sans interruption jusqu’au petit matin, certains affirmant avoir entendu une frappe aérienne.
« La nuit a été marquée par de nombreux coups de feu », a déclaré Mohammed, qui, comme d’autres habitants, a refusé de donner son nom de famille pour des raisons de sécurité. « J’ai entendu une frappe aérienne après minuit en dehors des frontières de Kombolcha », a-t-il ajouté.
Hamdiu, un commerçant, a lui aussi déclaré avoir entendu ce qui ressemblait à une frappe aérienne vers minuit, en plus « d’énormes coups de feu (…) jusqu’à ce matin ».
Ces dernières semaines, l’armée éthiopienne a mené des bombardements aériens sur le Tigré. Mais « il n’y a pas eu de frappe aérienne sur Kombolcha durant la nuit », a déclaré lundi à l’AFP une porte-parole du gouvernement.
L’AFP n’a pu joindre lundi des habitants de Dessie, où des combats ont été rapportés dimanche.
– Les Etats-Unis « alarmés » –
« Les Etats-Unis sont alarmés par les informations faisant état de la prise de contrôle » des deux villes par le TPLF, a écrit lundi sur Twitter le secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken, en appelant « toutes les parties (à) cesser les opérations militaires et entamer des négociations de cessez-le-feu sans conditions préalables ».
Débuté en novembre 2020, le conflit du Tigré connaît un spectaculaire revirement de situation depuis juin.
Le Premier ministre Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, avait proclamé la victoire le 28 novembre, quelques semaines après avoir envoyé l’armée au Tigré pour destituer les autorités régionales dissidentes, issues du TPLF.
Mais les rebelles ont repris la majeure partie de la région en juin, forçant les troupes gouvernementales à se retirer largement. Ils ont poursuivi leur offensive dans les régions voisines de l’Amhara et de l’Afar.
Le porte-parole du TPLF Getachew Reda – qui a menacé en juillet de « marcher sur Addis Abeba (…) pour défendre le Tigré » – a déclaré dimanche sur Twitter que le TPLF n’avait « d’autre motivation que de briser le siège meurtrier » sur la région, en proie à une grave crise humanitaire.
Les douze mois de conflit, marqué par de nombreux récits d’exactions sur les civils, ont notamment poussé 400.000 personnes au bord de la famine au Tigré, selon l’ONU.
La propagation des combats en Afar et Amhara a déplacé des centaines de milliers de personnes et étendu encore la détresse humanitaire humanitaire. En septembre, les autorités amhara estimaient qu’au moins 233.000 civils fuyant l’avancée rebelle avaient trouvé refuge à Dessie et Kombolcha.
– « Mourir pour l’Ethiopie » –
Dans un message posté sur Facebook, Abiy Ahmed a exhorté les Éthiopiens à utiliser « n »importe quelle arme (…) pour bloquer le TPLF destructeur, le renverser et l’enterrer ».
« Mourir pour l’Éthiopie est un devoir pour nous tous », a-t-il déclaré, faisant écho à l’appel lancé aux habitants par le gouvernement régional de l’Amhara pour se mobiliser et défendre leurs terres.
L’administration amhara a publié un décret ordonnant à toutes les institutions de suspendre leurs services réguliers et de consacrer leurs budgets et leur énergie à « la campagne de survie ».
L’Armée de libération oromo (OLA), un groupe rebelle de l’ethnie oromo avec qui le TPLF a fait alliance en août, a également annoncé dimanche que ses combattants étaient entrés dans les villes de Kemise et Senbete, situées au sud de Kombolcha sur l’autoroute A2 menant à Addis Abeba. Senbete est située à 260 kilomètres d’Addis.
Source: La minute info