Les factions rebelles armées menacent de prendre les armes et de rejoindre la contestation anti-junte si le bain de sang se poursuit en Birmanie. Déjà 510 personnes, dont de nombreux étudiants et adolescents, sont en effet mortes ces deux derniers mois, d’après l’AAPP, l’Association d’assistance aux prisonniers politiques.
Si les forces de sécurité « continuent à tuer des civils, nous collaborerons avec les manifestants et nous riposterons », ont-elles écrit dans un communiqué commun signé notamment par l’Armée d’Arakan (AA), une guérilla qui demande plus d’autonomie pour l’ethnie bouddhiste arakanaise.
Depuis l’indépendance de la Birmanie en 1948, une multitude de minorités ethniques demeure en conflit avec le gouvernement central. Elles réclament plus d’autonomie, l’accès aux nombreuses richesses naturelles du pays ou une part du lucratif trafic de drogue.
Si ces groupes ethniques armés rejoignent la contestation, ce serait un tournant important. « La situation risque d’évoluer vers une guerre civile totale, a commenté auprès de l’AFP Debbie Stothard, de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH). La junte ne veut rien céder et des contestataires, largement pacifiques jusqu’à présent, sont tentés d’appeler à l’aide des factions armées pour se protéger. »
La tension monte à la frontière thaïlandaise
Certains leaders du mouvement de résistance ont trouvé refuge auprès de groupes armés rebelles, notamment dans la région frontalière avec la Thaïlande. Mais sur place, la situation avec les autorités locales est tendue, rapporte notre correspondante en Thaïlande, Carol Isoux.
Des frappes aériennes, dimanche matin, sur le territoire de l’ethnie minoritaire karen, à la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie, ont provoqué la fuite de 3 000 villageois vers la Thaïlande. Mais alors que le gouvernement thaïlandais avait initialement annoncé qu’il accueillerait d’éventuels réfugiés dans des camps installés le long de la frontière, beaucoup ont été reconduits en territoire birman.
De nombreuses photographies publiées sur les réseaux sociaux montrent que les soldats thaïlandais ont ensuite posé des fils barbelés à plusieurs endroits de la rivière Moei, qui marque la frontière entre les deux pays.
Les autorités karens se disent très inquiètes de ce rejet des réfugiés alors qu’elles doivent elles-mêmes faire face à un afflux de citadins birmans, pour la plupart des leaders du mouvement de désobéissance civile qui cherchent à échapper aux arrestations. Village Karenni, une ONG qui s’occupe de l’aide au développement agricole et scolaire de la population Karenni, interrogée par RFI, note la position ambiguë de la Thaïlande. L’ONG ne voit pas de sortie de crise à cour terme et craint des épisodes à venir sanglants.
L’armée essaie de mettre en place un sentiment de terreur auprès des populations. Elle mène des représailles contre les populations karen pour lutter contre l’armée karen. Si on meurt peu des bombardements, on meurt du déplacement…On n’a plus accès aux soins, on n’a plus accès à l’hygiène…
Dans ces zones difficiles d’accès, composées en majorité de villages de jungle, les ressources en eau, en nourriture ainsi qu’en moyens de communication et de transport sont rares. D’autres ethnies voisines avec la Thaïlande, comme les Shans et les Kachins au Nord, annoncent, elles aussi, devoir faire face à un flux de réfugiés qui se rapproche de la frontière.
Source: Rfi