Vingt ans de pouvoir soldés par un long exil en France… L’ex président de Madagascar et ardent militant anticolonial, Didier Ratsiraka, surnommé « l’Amiral rouge » pour son socialisme révolutionnaire décliné à la sauce locale, est mort dimanche à 84 ans sur l’île de l’Océan Indien.
Hospitalisé à Antananarivo en début de semaine pour une grippe, Didier Ratsiraka a été président de 1975 à 1991, puis de 1997 à 2002. « Les Malagasy (Malgaches) ont perdu un illustre patriote », a déclaré l’actuel président, Andry Rajoelina, sur Twitter. Il sera enterré lundi.
Les raisons de son décès n’était pas immédiatement connus. Mais des médias locaux spéculaient sur un éventuel lien avec le Covid. Madagascar est en proie à une deuxième vague de la pandémie de coronavirus et l’arrivée du variant sud-africain réputé plus contagieux.
Instigateur de la « révolution socialiste malgache » qu’il a décrite dans son propre « Petit livre Rouge », ce « camarade » de Fidel Castro laisse en héritage une « malgachisation » de l’enseignement et du nom des villes sur la grande île.
Dirigisme économique, repli culturel, sa politique se révèlera toutefois un échec économique et social, qui a acculé le pays à la faillite et produit une nouvelle génération perdue entre le français, deuxième langue du pays, et le malgache.
En août 1991, des milliers de personnes marchent sur le palais présidentiel et réclament son départ. Ils sont accueillis par des grenades lancées depuis un hélicoptère et des tirs à balles réelles de la garde présidentielle. Une centaine de personnes sont tuées.
– « Politicien de fortune » –
La contestation durera des mois. Finalement battu à la présidentielle de 1993, l’animal politique à la silhouette frêle est obligé d’accepter la transition libérale réclamée par son opposant de l’époque, Albert Zafy, qui lui succèdera à la tête de l’État.
Mais l’ancien officier de marine, sorti de l’Ecole navale de Brest en France, reviendra au pouvoir par les urnes en 1997. « Marin de métier, politicien de fortune », disait-il de lui-même.
Une nouvelle crise de légitimité l’écarte définitivement du pouvoir à l’aube des années 2000. A l’issue d’une présidentielle contestée, des manifestations et des affrontements armés dans la rue font rage, de décembre 2001 à juillet 2002, entre ses partisans et ceux de son nouvel opposant, le maire d’Antananarivo, Marc Ravalomanana.
Ce dernier est finalement déclaré vainqueur et Didier Ratsiraka forcé à s’exiler en France pendant neuf ans.
En 2003, le président déchu est condamné par contumace à dix ans de travaux forcés pour « détournement de deniers publics » puis à cinq ans de prison ferme pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Ses peines seront toutefois annulées en 2009.
A son retour d’exil en 2011, Ratsiraka est vu comme un retraité de 75 ans. Mais il surprend à sa descente de l’avion: il embrasse le tarmac et fait des pompes devant les caméras, comme une démonstration de force.
Bon orateur pour les uns, grand baratineur et démagogue pour les autres, il tente de faire un retour raté à la présidentielle de 2013.
Toujours présent sur la scène politique malgache ces dix dernières années, celui qui était aussi surnommé « debat » en malgache, qui signifie à la fois « le méchant » et « le patron », était régulièrement invité sur les plateaux de télévision pour livrer ses analyses.
Source: La Minute Info