À la Une: la tension baisse d’un cran au Sénégal

© REUTERS - COOPER INVEEN L'opposant sénégalais Ousmane Sonko lors d'une conférence de presse, lundi 8 mars à Dakar, après sa libération.

L’opposant Ousmane Sonko a été libéré et placé, hier lundi, sous contrôle judiciaire, sous la pression de la rue. Le président Macky Sall est pour sa part sorti de son silence pour appeler à l’apaisement. La tension retombe donc…

En tout cas, pointe WalfQuotidien, « au-delà de la personne de Ousmane Sonko dont le dossier a été l’étincelle qui a mis le feu à la paille, c’est une série de messages que le peuple sénégalais, à travers sa jeunesse, a envoyés au pouvoir. D’abord, que les institutions ne doivent pas être au service de personnes mais de tout le peuple. La Constitution ne doit pas être un cahier de brouillon qu’on remplit, rature ou déchire selon ses propres ambitions de conservation du pouvoir. (…) L’autre signal à décoder, poursuit WalfQuotidien, c’est que, au-delà de l’affaire du salon de massage, ceux qui sont sortis dans la rue ont exprimé un sentiment de révolte. Révolte contre la faim et le chômage qui les tenaillent dans les foyers. Depuis un an, du fait du Covid-19, la majorité des Sénégalais qui, pour la plupart, vivent dans l’informel, sont semi-confinés. Les fonds dégagés pour leur venir en aide sont gérés de façon opaque. Sans que cela ne prête à conséquence. Ces Sénégalais qui sont sortis pour aller piller les rayons alimentaires des magasins, saccager des gares de péage ne le font pas pour Ousmane Sonko. Ils le font pour leurs poches et pour leur ventre. »

Pour un État de droit…

Le quotidien 24 Heures est sur la même ligne : « au révélateur des manifestations qui secouent actuellement le Sénégal et des revendications du Mouvement M2D, le régime nage en eaux troubles. Ousmane Sonko apparaît comme un élément qui a cristallisé les affres sociales et économiques de la majorité des populations. Des frustrations latentes ont explosé à la figure du régime. »

Et « attention à la réorganisation de l’opposition, prévient 24 Heures, qui ne va plus céder au pouvoir en place un pouce du terrain politique. Les manifestations, les marches et les attaques risquent de venir de partout pour lutter pour un État de droit et secouer son tabouret. »

Révolution ?

D’ailleurs, Ousmane Sonko n’a pas perdu de temps hier… Sitôt libéré, l’opposant s’est exprimé, relate le quotidien Enquête : « fatigué, amaigri, c’est un Ousmane Sonko pourtant déterminé qui a fait face hier aux journalistes. Le leader de PASTEF-Les Patriotes s’est présenté en chef de l’opposition, prêt à regarder le président Macky Sall, les yeux dans les yeux. En une semaine, beaucoup de choses ont changé. Un rapport de forces a eu lieu. Et le peuple a parlé. “La révolution est déjà lancée. Rien ne peut l’arrêter”, a affirmé Ousmane Sonko. Aucune puissance interne ou externe, car le peuple a compris les enjeux et pris ses responsabilités. Conduisons-la à son terme, c’est-à-dire en 2024, au plus tard. » 2024, année de l’élection présidentielle…

Goutte d’eau ?

Et encore beaucoup de réactions dans la presse de la sous-région…

« Macky recule face à la rue dakaroise », s’exclame Ledjely en Guinée. « ll avait refusé d’écouter la raison et le bon sens. Mais le président sénégalais a fini par entendre la colère de ses compatriotes. (…) Ainsi, il a fallu les manifestations de ces derniers jours, malheureusement avec morts d’hommes et grabuges regrettables, pour que le président sénégalais, prenant subitement conscience de sa vulnérabilité face à ses compatriotes unis et remontés, finisse par lâcher du lest ce lundi. Mais à coup sûr, prévient le site guinéen, il en faudra davantage pour calmer la furie de la jeunesse sénégalaise qui s’est exprimée dans la rue ces derniers jours. Parce que finalement, l’affaire Sonko n’aura été que la goutte d’eau qui a fait déborder un vase qui demeure rempli de frustrations et de malaise trop longtemps accumulés. »

« Force doit rester à la loi »

Enfin, pour Le Pays au Burkina, la loi devra trancher… « Certes, le président Macky Sall travaillerait à faire le vide autour de lui en cherchant des noises à tous ses adversaires capables de lui tailler des croupières. Mais faut-il pour autant donner le bon Dieu sans confession à Ousmane Sonko que l’on accuse de viol ? Assurément, non !, s’exclame le quotidien ouagalais. C’est pourquoi force doit rester à la loi. Si, à l’issue de l’enquête en cours, Ousmane Sonko est reconnu coupable, qu’il soit puni conformément à la loi. S’il s’avère qu’il s’agit d’une cabale montée de toutes pièces contre sa personne aux fins de nuire à sa carrière politique, qu’il soit purement et simplement relaxé. C’est ainsi, conclut Le Pays, que doit fonctionner un État de droit digne de ce nom. »

  Source: Rfi