“Les dernières attaques montrent le retour en puissance de Boko Haram au Nigeria”

© Capture d'écran France 24 Pour Wassim Nasr, journaliste à France 24, spécialiste des mouvements jihadistes, "la pratique de l'enlèvement fait partie de l'ADN de Boko Haram".

Boko Haram a revendiqué mardi l’enlèvement de plusieurs centaines de lycéens dans le nord-ouest du Nigeria. Une annonce qui témoigne de l’expansion territoriale du groupe jihadiste.

Le drame pourrait marquer un tournant important dans l’expansion de Boko Haram. Le groupe jihadiste a revendiqué, mardi 15 décembre, l’enlèvement de plusieurs centaines de lycéens dans le nord-ouest du Nigeria. Dans le détail, les autorités affirment que 333 adolescents sont toujours portés disparus depuis l’attaque de leur pensionnat à Kankara dans l’État de Katsina, au nord-ouest du pays, dans la nuit de vendredi à samedi.

Le nombre de lycéens actuellement entre leurs mains n’était pas clair, certains d’entre eux ayant réussi à s’échapper lors de l’attaque et pouvant s’être perdus dans la campagne environnante au moment de leur fuite. Mais de nombreuses sources locales assurent qu’ils seraient plus de 500 à être toujours introuvables.

“L’ADN de Boko Haram”

Pour Wassim Nasr, journaliste à France 24 et veilleur analyste spécialiste des mouvements jihadistes, ce kidnapping à grande échelle “fait parti de l’ADN” de Boko Haram. L’expression ‘Boko Haram’ signifie “l’éducation occidentale est un péché” en haoussa, langue la plus répandue dans le nord du Nigeria.

 

“On s’attend à ce que la procédure soit la même que celle observée lors des précédentes attaques : enlèvement, demande de rançon des familles ou des autorités pour d’éventuelles libérations de quelque-uns, voire de tous. On peut aussi imaginer que Boko Haram veuille garder quelques élèves garçons pour que certains deviennent des combattants”, précise encore Wassim Nasr. 

Autre fait qui mérite d’être souligné selon le spécialiste, l’enlèvement a eu lieu “très loin de la région du lac Tchad, une zone où le groupe reste habituellement très actif”. Le pensionnat attaqué vendredi soir se trouve situé dans l’État de Katsina, près de la frontière nigérienne soit à plusieurs centaines de kilomètres de leur bastion. Une preuve que le groupe jihadiste a poursuivi son expansion territoriale. 

“Montée en puissance du groupe au Nigeria”

Ainsi si Boko Haram apparaissait en recul pendant une période à cause d’une “scission avec l’État islamique”“les dernières attaques démontrent la montée en puissance du groupe au Nigeria”, insiste le journaliste.

Pour rappel, depuis 2016, le groupe s’est divisé en deux factions : celle d’Abubakar Shekau, le chef historique de Boko Haram, et le groupe État islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), affilié à l’EI.

“On ne savait pas exactement combien d’hommes avaient rejoint les rangs de Boko Haram, au moment de cette scission. Aujourd’hui, avec ces dernières attaques, on a la preuve que ce groupe a consolidé son rayon d’actions, mais aussi sa communication”, conclut Wassim Nasr.

Ces dix dernières années, le groupe jihadiste a semé la terreur sur des pans entiers de territoires sur les pourtours du lac Tchad. Le conflit, qui s’est étendu au Tchad, Cameroun et Niger, pays voisins, a fait 36 000 morts, essentiellement dans le nord-est du Nigeria. Plus de 2 millions de personnes ne peuvent toujours pas regagner leur foyer.

 

  Source: France 24