La province du Tigré est située au nord de l’Ethiopie, à la frontière avec l’Érythrée. L’offensive a été lancée par le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, dans la nuit du mardi 3 au mercredi 4 novembre, pour reprendre le contrôle de la province qui souhaite faire sécession. Une offensive qu’il entend bien continuer. Toutes les communications sont toujours coupées avec le Tigré. Difficile, pour l’heure, d’établir un bilan des combats.
La guerre des mots s’est rapidement transformée en une guerre ouverte au Tigré, à 700km au nord de la capitale Addis Abeba. Les deux camps estiment être pleinement entrés en guerre. Du côté tigréen, les autorités provinciales assurent que la survie du Tigré dépend de ce conflit. Du côté du Premier ministre, Abiy Ahmed, l’intention est clairement d’en découdre une bonne fois pour toute avec le TPLF, le parti tigréen. Pas de négociations pour l’instant selon l’armée, même si des sources diplomatiques assurent que les deux camps communiquent en coulisses.
Pour l’heure, il est difficile de connaître l’étendue des pertes des deux côtés. Difficile aussi d’y voir clair sur le déroulé exact des combats, à cause de la coupure des communications.
Ce que l’on sait, quand même, c’est que les affrontements ont principalement lieu le long de la frontière entre les provinces du Tigré et de l’Amhara, longue de 400 kilomètres, avec de violents combats, en particulier près de la frontière soudanaise.
Des généraux sortis de leur retraite, des machines de guerre capturées par le gouvernement tigréen
Dans l’après-midi du jeudi 5 novembre, des avions ont été entendus dans le ciel tigréen. Différentes sources font état de bombardements, sans connaître la cible exacte. Certains parlent de Mekele, la capitale provinciale, d’autres parlent de positions militaires du parti TPLF (Front de libération du peuple du Tigré), aux abords de Mekele.
Des mouvements de troupes ont aussi été observés en provenance des différentes régions éthiopiennes pour renforcer le contingent fédéral aux abords du Tigré. Par ailleurs, trois anciens généraux ont été priés de sortir de leur retraite mercredi pour venir aider l’armée nationale.
À Mekele, le gouvernement tigréen a assuré s’être emparé des pièces d’artillerie et des tanks appartenant à la division stationnée dans la ville. « Nous allons détruire quiconque tente de nous attaquer », affirme le président de la province. « Nous ne sommes pas inférieurs à eux, nous sommes peut-être même meilleurs », déclare le président de la province, une province réputée pour être la plus militarisée d’Éthiopie.
Une communauté internationale peu alarmée
Malgré la gravité de la situation, les réactions internationales sont pour l’instant plutôt modérées et plutôt rares. La plupart des pays et institutions publient des communiqués courts à la rhétorique similaire.
James Duddridge, le monsieur Afrique du gouvernement britannique, s’est dit « profondément inquiet ». Il a appelé à « une désescalade et à la fin des violences ». Stéphane Dujarric, porte-parole de l’ONU, demande lui des mesures immédiates pour une « désescalade et une résolution pacifique du conflit ». L’Union européenne utilise quasiment les mêmes mots en déclarant que « l’escalade militaire ouvrait une voie dangereuse pour la stabilité du pays »…
Il faut dire que le manque criant d’informations en provenance du Tigré, où internet et liaisons téléphoniques ont été coupés, rendent difficiles la diffusion de réactions circonstanciées.
Kjetil Tronvoll estime aussi que « les yeux sont braqués sur les élections américaines ». Mais ce chercheur spécialiste de l’Éthiopie estime qu’il n’est « pas trop tard pour éviter une guerre totale, si la communauté internationale » se mobilise.
En tout cas, les partenaires d’Addis Abeba se gardent bien de critiquer l’engagement militaire du pouvoir central. Hier, Mike Pompeo s’est même dit « profondément inquiet par l’attaque du TPLF contre une base de l’armée éthiopienne ». Or c’est l’assaut qui avait entraîné l’envoi de l’armée par Addis Abéba. Certains voient là un soutien du secrétaire d’État américain à l’offensive du pouvoir fédéral.
Au passage, plusieurs acteurs de poids, notamment ONU et Union européenne, ont renouvelé leur soutien au gouvernement central et à ses réformes de la société éthiopienne.
Source : rfi