Dans une déclaration retransmise sur les réseaux sociaux, l’ancien président de l’Assemblée nationale appelle à la mise en place d’une transition et demande aux forces de défense et de sécurité de faire barrage à Alassane Ouattara.
En privé, Alassane Ouattara ne s’en cache pas. Parmi les différents opposants qui conteste sa réélection à un troisième mandat, il en est un dont il se méfie tout particulièrement et dont il aurait aimé ne plus entendre parler : Guillaume Soro.
Ce mercredi soir, son ancien allié, en exil depuis leur séparation violente en 2019, a sûrement irrité encore un peu plus le chef de l’État ivoirien. Dans une adresse à la nation publiée sur sa page Facebook, suivie en direct par environ 50 000 personnes, Guillaume Soro a sévèrement chargé celui qu’il appelle « l’ex-président », cet homme qui, selon lui, est « installé dans le schéma mental de tous les dictateurs tropicaux ».
« Vacance du pouvoir présidentiel »
« Devant la violation flagrante de notre Constitution, le sang de nos compatriotes qui est versé chaque jour et le parjure déshonorant dont s’est rendu coupable l’ex-président, j’ai décidé de m’assumer et de prendre la parole », entame Soro, posant en costume complet bleu marine devant un drapeau ivoirien.
Le leader de Générations et peuples solidaires (GPS), qui a vu sa candidature à la présidentielle du 31 octobre recalée par le Conseil constitutionnel, poursuit en saluant la « mobilisation exemplaire » de ses compatriotes « qui a permis de faire échec à la pire farce électorale de notre nation, orchestrée piteusement par Alassane Ouattara engagé dans son aventure effrénée et périlleuse de s’éterniser au pouvoir ».
Refusant toute légitimité au président sortant et considérant que son pays se trouve désormais dans une situation de « vacance du pouvoir présidentiel », Soro dénonce ensuite la « répression brutale » qui vise les différents leaders de l’opposition qui ont annoncé, lundi, leur adhésion à un « Conseil national de transition » présidé par l’ancien président Henri Konan Bédié.
Mardi après-midi, la police et la gendarmerie ont arrêté une vingtaine de proches du leader du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) à son domicile d’Abidjan – domicile depuis placé en résidence surveillée comme ceux de plusieurs autres opposants.
« Vu la traque contre les principaux dirigeants du CNT, je décide en toute responsabilité de m’inscrire dans la continuité de l’oeuvre entamée en contribuant à la mise en place effective des organes de la transition, affirme Soro. Avec l’ensemble des forces vives de notre nation, nous conduirons la transition démocratique en vue d’élections libres, inclusives et transparentes dans les meilleurs délais. »
Appel à l’armée
Puis l’ex-chef de la rébellion des Forces nouvelles (FN), que Ouattara et son premier cercle accusent depuis des mois de tentatives de déstabilisation, se montre encore plus offensif, en s’adressant directement aux forces de défense et de sécurité pour leur demander de faire barrage à Alassane Ouattara.
« Vous me connaissez, chers soldats […]. Je voudrais vous dire que nous ne pouvons pas, nous ne devons pas, par peur et par poltronnerie, laisser s’installer durablement la dictature clanique d’Alassane Ouattara […]. C’est pourquoi, je demande à vous soldats, sous-officiers, officiers, officiers supérieurs, et officiers généraux de notre armée de vous regarder dans le miroir de votre âme et de votre conscience et d’agir pour stopper les tueries, agir pour préserver notre pays de pogroms intercommunautaires, agir pour rétablir la paix et la concorde, agir pour redonner à notre Constitution ses lettres de noblesse. »
Affirmant que Ouattara a « épuisé son deuxième et dernier mandat » et qu’il « ne peut plus exercer les charges et la fonction de chef de l’État », Soro conclut en leur demandant, « dans l’honneur et la dignité », « de mettre un terme au spectre de la guerre civile qui menace tous les jours notre pays ».
Des propos bellicistes qui ne manqueront pas de faire réagir sur les bords de la lagune Ébrié et dans les couloirs du palais présidentiel.
Source : Jeune Afrique