« Le chef de l’État demande au Premier ministre, chef du gouvernement, d’élaborer en urgence, en collaboration avec le ministre des Transports, le ministre des Finances, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Camair-Co et la CCAA (Autorité aéronautique), un plan de restructuration, de relance et de développement de la compagnie, dans l’optique d’ouvrir son capital social à hauteur de 51% à un partenaire stratégique privé, conformément à l’article 5 du décret du 11 septembre 2006, portant création de la Camair-Co ». C’est l’extrait d’une correspondance adressée le 14 juillet 2020 au Premier ministre (PM), Joseph Dion Ngute, par le secrétaire général de la présidence de la République (SG/PR), Ferdinand Ngo Ngoh.
En clair, face aux nombreuses difficultés financières, dont fait face la compagnie aérienne publique camerounaise, depuis le lancement de ses activités en 2011, l’État opte finalement pour la cession des parts majoritaires de Camair-Co à un opérateur privé, comme prévu par les textes de création de la compagnie. Mais, avant d’y arriver, il importe préalablement de rendre l’entreprise vendable.
En effet, dans une « alerte » lancée le 19 juin 2020 en direction de l’actionnaire unique de l’entreprise, le commissaire aux comptes de Camair-Co dépeignait la situation opérationnelle et financière catastrophique de cette compagnie aérienne, devenue un gouffre à sous pour le Trésor public.
« Nous avions déjà relevé dans notre rapport de commissariat aux comptes au titre de l’exercice 2015, émis le 9 avril 2018, que les capitaux propres de Camair-Co étaient devenus inférieurs à la moitié du capital social, et que l’Assemblée générale (AG) devait décider s’il y a lieu de procéder à la dissolution anticipée de la société ou non (…) La compagnie dispose désormais d’un seul aéronef (MA 60) susceptible de voler à brève échéance (…) Le personnel cumule actuellement quatre mois d’arriérés de salaires pour une masse salariale mensuelle d’environ 500 millions de FCFA », détaillait le cabinet Okalla Ahanda & Associés.
Nouveau financement de 15 milliards de FCFA
Dans le même temps, le commissaire aux comptes de Camair-Co révélait que la compagnie traîne une dette abyssale de 110 milliards de FCFA, et que les pertes, qui ont été annulées au 31 décembre 2018, étaient de près de 99,2 milliards de FCFA. À cette enveloppe, apprend-on, il faudrait ajouter une perte prévisionnelle de 15 milliards de FCFA au titre de l’exercice 2019 et 12 milliards de FCFA au titre du premier semestre 2020 (soit 126,2 milliards de FCFA de pertes au total), le tout pour un capital social de 21,8 milliards de FCFA.
Afin d’embellir cette mariée plutôt hideuse, dans la perspective de ses noces futures avec un partenaire privé, la correspondance, adressée le 14 juillet dernier au PM, révèle que le chef de l’État a récemment ordonné une nouvelle allocation de 15 milliards de FCFA au profit de Camair-Co. Ces financements, apprend-on, serviront à « l’envoi en maintenance de l’un des Boeing 737-700 NG ; l’acquisition de deux aéronefs Dash Bombardier Q400, mieux adaptés aux lignes de courte distance ; et la location de deux moteurs susceptibles de permettre la remise en vol du deuxième Boeing 737-700 NG » de la compagnie.
En dehors de ce renforcement des capacités techniques et opérationnelles de Camair-Co, le plan de restructuration de la compagnie, souligne la correspondance du SG/PR, devra intégrer la rationalisation de la gestion des ressources humaines et la réduction de la masse salariale. Traduction : l’on s’achemine inéluctablement vers les licenciements à Camair-Co, dont 65% du personnel est déjà en congé technique depuis juin 2020, pour une période de trois mois.
Source : Investir au Cameroun